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Dialogue social agité à l’Agence Française de Développement (AFD)
L’Agence Française de Développement (AFD) est peu connue du grand public, même si son action a une influence certaine sur la vie quotidienne des habitants des départements et territoires d’outre-mer, où elle finance les collectivités locales, et où elle détient par ses participations un rôle essentiel dans l’habitat.
Mais le nom de l’AFD fait davantage référence à la principale agence française de financement des pays en développement. Sous divers noms, elle a été créée il y a bientôt 70 ans.
Tout d’abord, elle a été la CCFL, fondée le 2 décembre 1941 à Londres par le Général de Gaulle, avec pour mission l’émission, et la gestion de la trésorerie de la France Libre.
Dès que la paix s'est profilée, la France s’est efforcée de concevoir une nouvelle politique pour assurer le développement économique et social des populations d’outre-mer, souffrant dans ce domaine d’un lourd handicap.
C’était l’enjeu de la conférence de Brazzaville. Présidée par le Général de Gaulle, elle a débuté le 30 janvier 1944 et réuni les gouverneurs et les gouverneurs généraux, appelés à formuler des propositions sur l'avenir des colonies françaises.
De là ont émergé les grandes lignes de la politique coloniale de la France après la libération. Dans l’esprit de la conférence de Brazzaville, la Caisse Centrale de la France libre (CCFL), dont la mission couvrait déjà partiiellement certains territoires coloniaux, est devenu la Caisse Centrale de la France d’Outre-mer (CCFOM), par ordonnance du 2 février 1944. Plus tard, la loi du 30 avril 1946, a défini des missions dans le cadre de la reconstruction et du développement des territoires hors de la métropole.
Les fonctions monétaires, essentielles au début, ont progressivement été transférées à des instituts d’émission (Afrique occidentale, Afrique centrale, départements d’Outre-mer puis en 1967 Territoires d’Outre-mer). Au moment de la décolonisation, elle est devenue la CCCE (Caisse Centrale de Coopération Économique), avec pour mission le développement économique des pays où l’influence française persistait.
- Aujourd’hui, l’AFD a bien changé. Institution financière publique, l’Agence Française de Développement lutte contre la pauvreté, soutient la croissance économique et participe à la valorisation des biens publics mondiaux dans les pays en développement, les pays émergents et l’Outre-mer.
- Elle assure plus de 7 milliards d’euros de financements, en tant que banque française de développement avec 1 600 agents, au siège à Paris et dans environ 70 pays ou territoires.
- Elle est en France l’opérateur pivot de l’aide au développement.
Elle agit sous le contrôle des ministères de tutelle : Ministère des Affaires étrangères et européennes, Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, Ministère de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités territoriales et de l’Immigration.
L’AFD soutient les pouvoirs publics, le secteur privé et les réseaux associatifs locaux pour la mise en œuvre de projets économiques et sociaux très divers.
Elle intervient ainsi dans cinq continents et dans l'Outre-mer.
Ses actions en faveur de la croissance économique et de la préservation de l’environnement s’inscrivent directement dans le cadre des objectifs du millénaire (OMD).
L’AFD contribue également à la préservation des biens publics mondiaux et peut répondre à des situations de crise.
Elle développe aussi des partenariats financiers et intellectuels avec d’autres bailleurs de fonds et s’attache à défendre l’influence française dans la sphère du développement.
Cartographie syndicale
Le syndicat FO a été le premier syndicat créé à l’AFD, en mai 1957, sous la dénomination de syndicat des agents de la Caisse centrale, époque où il réunissait presque la totalité des agents. Après une série d’adaptations, et en particulier l’affiliation à la fédération Force Ouvrière des finances en 1963, les statuts du syndicat n'ont plus connu de modification jusqu'à novembre 1997 (changement de dénomination). Il est devenu Autonome-FO. Sa première responsabilité a été de contribuer à la mise au point du statut du personnel en 1959. La CGT est arrivée dans l’établissement en 1966, la CFDT en 1978, puis la CFTC en 1997, et le SNB-CGC en 1998. Après avoir longtemps été le seul syndicat, puis le deuxième en audience à l’AFD, Autonome FO représente 10 % du personnel en 2002. Sous l’impulsion d’une nouvelle génération, il est ensuite remonté à 12 % en 2004, à 16 % en 2006 et à 20 % en 2009. En l’état actuel de son audience croissante auprès du personnel, par ses actions au quotidien, lors des négociations, au comité d’entreprise, et en tant que délégués du personnel, nous pouvons raisonnablement espérer accroître sensiblement cette représentativité.
De la consolidation à la décomposition
La nomination en juin 2010 d’un nouveau directeur général (qui avait sévi de longues années aux Monnaies et Médailles) n’y est pas étrangère. Avec les mêmes méthodes de management, il a contraint le personnel et ses représentants à une contestation sans pareille, ponctuée d’une série d’une trentaine de tracts en un an, et avec en point d’orgue une assemblée générale du personnel le 28 juin, puis une manifestation le 7 juillet 2011, devant le conseil d’administration de l’agence. Les tracts ont été pour la plupart intersyndicaux. Ils ont des titres aussi fleuris que « faut reconnaître, c’est du brutal », « 1 an de gâchis : de la consolidation à la décomposition », « faites ce que je dis, pas ce que je fais », ou encore « Stratégie de l’AFD : une mort par étouffement ». FO y a pris toutes ses responsabilités.
Le 7 juillet dernier, alors que la période estivale s’annonçait, plus de 300 salariés se sont regroupés pour accueillir les administrateurs représentants des ministères de tutelle, leur faire connaître leur mécontentement, et demander un changement radical du mode de gouvernance de l’agence.
Plus de 100 autres personnes qui ne pouvaient être présentes avaient fait connaître leur soutien par messagerie. Parmi les nombreux griefs :
- l’absence de confiance du directeur général envers ses équipes et le manque de considération pour leur travail ;
- un COMEX qui ne fonctionne plus, un (micro-)management personnel ;
- une forte indifférence au processus de concertation et de dialogue ;
- un flou dans les missions et objectifs de services entiers, depuis maintenant un an ;
- une navigation à vue dans le domaine stratégique, une centralisation paralysante de la décision, des revirements permanents inexpliqués, avec la prévalence d'une logique essentiellement comptable et court-termiste ;
- des réorganisations qui se succèdent, sans plan d’ensemble et sans objectifs clairs ;
- un fort malaise des collaborateurs et du management intermédiaire qui supportent mal l’anéantissement de leur travail effectué au service de l’agence.
Ce mouvement de juillet 2011, soutenu et porté par le personnel, a malheureusement dû compter avec l’opposition de la CGT, qui a publié un tract condamnant cette action la veille de la mobilisation du 7 juillet.
Le personnel s’interroge encore aujourd’hui sur les raisons de ce tract qui a permis à un directeur général bien à la peine, de pérorer devant les tutelles.
Cette action du personnel n'a pourtant pas été vaine. Elle a amené la direction à recevoir les représentants du personnel et à s’engager sur la voie d’un changement de méthode et d’action. Nous suivons ces changements et demandons des comptes.
Elle a aussi permis d’obtenir un très bon accord sur l’égalité hommes-femmes, face à une direction qui avait besoin d’afficher sa capacité de dialogue vis-à-vis des tutelles.
L’actualité sociale en cette rentrée promet d’être riche, d’autant que s’annonce à l’IEDOM, entité rattachée à l’AFD par une UES (union économique et sociale), un transfert d’une partie de l’activité vers la Banque de France, avec une trentaine de postes (et donc de salariés) affectés par ce transfert. Une quinzaine d’entre eux au moins a dû être recasée d’ici 2015 alors que la direction demande que le service soit assuré jusqu’à la veille du transfert.
Cette actualité est également marquée par la morosité de la filiale Proparco, spécialisée dans l’aide au secteur privé (banques, entreprises…), dont les salariés supportent mal la reprise en main par la maison-mère.
Le directeur général de la filiale est parti il y a un an pour rejoindre la coopération. L’ancien directeur des opérations, rapatrié d’office à l’AFD, a démissionné 2 mois après ; le secrétaire général a rejoint l’AFD en tant que DRH, où il est devenu le bras armé de cette reprise en main.
Face à cette situation, le syndicat FO de l’AFD continue malgré tout de faire vivre le dialogue social, en étant un interlocuteur social responsable et exigeant.