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20 / 07 / 2017 | 112 vues
Céline Bernard / Membre
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Développement territorial, le modèle de filière courte fait des émules

Parée de vertus écologiques et sociales, l’économie de proximité vise à la fois à répondre aux besoins des habitants et à développer un écosystème productif local. Ainsi, les circuits courts se développent (dans l’agriculture en particulier) mais sont-ils une idée vraiment nouvelle ?

À l’heure où la mondialisation, longtemps considérée comme unique moteur de la croissance, doit affronter de sérieuses remises en question, l’économie de proximité fait un retour en force, y compris dans les politiques publiques. En effet, elle apparaît de plus en plus comme une solution pour avancer sur le chemin de la transition écologique, développer l’accès à l’emploi pour le plus grand nombre, revitaliser ou consolider les zones rurales ou périphériques, renforcer les solidarités et le lien social etc. Elle est également en phase avec l’évolution des habitudes des consommateurs, qui tendent à privilégier la transparence, les produits locaux et les circuits courts d’approvisionnement.

Selon un rapport du Conseil économique social et environnemental (CESE), l’économie de proximité intègre non seulement « l’économie présentielle », centrée sur la satisfaction des besoins vitaux des populations (alimentation, agriculture, commerce de proximité, services à la personne, santé, entretien de l’habitat etc.), mais également une composante à dominante productive, fondée sur la rencontre entre activités économiques sur un marché local ou dans le cadre d’un système productif territorial (un ensemble plutôt tourné vers les activités de services et de conseil aux entreprises, l’économie sociale et solidaire, l’artisanat de pointe, l’industrie ou la construction).

L’économie de proximité peut ainsi se définir comme un mode d’organisation de l’économie autour de l’ancrage local et de la relation directe entre producteurs et consommateurs mais également entre les entreprises d’un même territoire.

Rapprocher l’agriculteur du consommateur

C’est bien sûr pour les produits agricoles et alimentaires que les filières courtes de proximité sont le plus évoquées. Selon l’IAU Île-de-France, « la relocalisation des systèmes alimentaires, la proximité et le lien producteurs/consommateurs figurent parmi les pistes à explorer pour répondre au double défi de la préservation des ressources agricoles et de l’approvisionnement des populations des villes, en quantité, en qualité, en diversité, et à un prix accessible à tous ». De son côté, l'Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) estime que ces circuits courts sont « aujourd’hui une opportunité économique non négligeable, que ce soit pour le producteur (sécurisation de son modèle économique), le consommateur (prix ajusté au coût réel) ou un territoire (création d’emplois locaux) ».

Vente à la ferme ou sur les marchés locaux, vente « au panier » avec les associations pour le maintien de l’agriculture paysanne (AMAP), vente aux restaurateurs, aux cantines scolaires, aux restaurants d’entreprises, points de vente collectifs, vente par correspondance ou via internet, ventes itinérantes, « fermes-auberges » et « tables d’hôte »… De nombreuses initiatives émergent pour rapprocher le producteur du consommateur. Ces dispositifs de circuits courts (vente directe ou avec un seul intermédiaire) concernent aujourd’hui presque toutes les filières agricoles, des fruits et légumes à la viande. Selon les chiffres du ministère de l’Agriculture, plus de 16 % des exploitations agricoles y font appel, dont près de la moitié transforment leurs produits.

Il faut dire que ces modes de commercialisation ne manquent pas d’atouts. Ils répondent d’abord aux nouvelles exigences de transparence des consommateurs et à leur intérêt croissant pour les produits locaux, la qualité, la saisonnalité, la traçabilité, la fraîcheur etc. Ils permettent ensuite aux agriculteurs de reprendre leur autonomie et de garder la plus-value de leur production. En limitant le nombre d’intermédiaires, ils contribuent également à réduire les coûts et les marges de profit. En raccourcissant les distances entre producteurs et consommateurs, ils réduisent les émissions de CO2 liées aux transports et améliorent donc le bilan carbone. Enfin, grâce au contact direct, ils contribuent à renforcer la cohésion sociale.

Matériaux de construction : une filière ancrée dans les territoires

Cette notion de circuit court s’applique également à d’autres domaines d’activité, en particulier à la fabrication et à la distribution de certains matériaux de construction, comme le béton. Cette filière s’appuie en effet sur un maillage territorial très dense d’usines, situées à proximité des carrières et des chantiers. Les matières sont donc extraites, transformées, puis consommées et éventuellement recyclées localement. Une proximité qui permet de limiter significativement les transports entre lieux d’extraction, de production et de mise en œuvre et donc de réduire les émissions de CO2 associées. Le béton prêt à l’emploi parcourt ainsi en moyenne une distance de 20 km, tandis que les produits préfabriqués avec ce matériau effectuent un trajet moyen de 50 km.

Les sites de production de béton, qui fournissent ainsi quelque 350 000 entreprises et artisans du bâtiment et des travaux publics, génèrent également sur les territoires des activités connexes : transport, maintenance, services… Répondant à des besoins essentiels des habitants (se loger et se déplacer) à partir de ressources locales, la filière propose des emplois pérennes et non délocalisables puisque les carrières recrutent le plus souvent dans un rayon d’une dizaine de kilomètres et plutôt en territoire rural... La filière a donc un effet important sur l’emploi et la création de richesses locales. Cette logique de « circuits courts » contribue aussi à prévenir la fragilisation des zones rurales, dans lesquelles les entreprises de la filière sont très présentes.

« L’ancrage dans les territoires est un atout très important de la filière béton », explique ainsi, sur le site spécialisé Batiactu, Anouk Thebault, directrice des relations avec l’environnement professionnel au Centre d’études et de recherches de l’industrie du béton (CERIB). « La filière s’adapte à la tradition agricole ou industrielle locale et travaille avec le territoire. Tout le monde est ainsi gagnant avec des filières courtes qui réduisent l'effet environnemental. Des co-produits issus d’autres filières industrielles ou de l’agriculture (comme les bagasses de canne à sucre dans les départements d’outre-mer) ou même de la conchyliculture, peuvent être utilisés dans la fabrication du béton. Ce sont autant de pistes de développement local ».

Les enjeux de l’économie de proximité

Outre les filières courtes des produits agricoles ou des matériaux de construction, l’économie de proximité intègre également l’économie résidentielle, l’artisanat, le commerce de proximité, l’économie sociale et solidaire (ESS), le tourisme mais également les liens entre les entreprises de la sphère productive au sein d’un écosystème économique territorial. Incontournables pour le vivre ensemble et l’animation des cœurs de ville, l’artisanat et le commerce représentent un enjeu économique majeur. En effet, le dynamisme de ces activités contribue à maintenir la consommation à l’intérieur du territoire et même à attirer des consommateurs en provenance d’autres bassins d’emploi.

Les acteurs de l’ESS jouent également un rôle croissant dans les secteurs de l’habitat (éco-construction, réhabilitation de logements), des services à la personne, des déchets, de la mobilité ou des circuits agricoles courts. Quant au tourisme, c’est aussi un sujet important pour l’économie de proximité, l’objectif étant de capter, grâce à l’attractivité locale, des revenus venus d’autres territoires. Plus globalement, les liens entre les entreprises au sein d’un territoire (grands groupes, PME et TPE, donneurs d’ordre, sous-traitants et sociétés de services aux entreprises etc.) constituent un facteur déterminant pour le développement de l’économie de proximité. Il s’agit de mettre en réseau des compétences, des savoir-faire et des ressources territoriales pour faire émerger une spécialisation, de développer les complémentarités entre différentes activités, de créer des synergies… C’est l’idée des grappes d’entreprises ou des pôles de compétitivité, qui doivent notamment, à terme, contribuer à la formation d’« écosystèmes locaux de croissance », grâce à des stratégies de « territoire-laboratoire », dans lesquelles le territoire devient le terrain d’expérimentation de nouvelles solutions qui répondent à des problématiques locales.
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