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04 / 05 / 2015 | 5 vues
Social Nec Mergitur / Membre
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Comment la mairie de Paris a organisé le plus long mouvement de grève de son histoire

À l’origine, le conflit est des plus simples. Février 2014, les agents techniques (catégorie C) de la Direction de la Jeunesse et des Sports (DJS) qui travaillent dans les stades, piscines, gymnases de la capitale  ont demandé une revalorisation de leur prime dominicale, actuellement de 45 euros par dimanche travaillé. Avec un argument imparable : être au moins alignés sur leurs collègues qui travaillent le dimanche dans les bibliothèques municipales, qui perçoivent 100 euros. Revendication on ne peut plus légitime aux yeux de tous les observateurs. Il a toutefois fallu attendre plusieurs semaines pour que la mairie de Paris reçoive l’intersyndicale pourtant forte de quatre organisations très représentatives du secteur (CGT, FO, SUPAP et SUD).

Qu'a alors proposé la Vile de Paris ? D’attendre le résultat des élections municipales. Rien à voir mais bon... Puis les négociations ont été repoussées aux calendes grecques, pour cause de vacances scolaires ou d’élections européennes (incroyable, non ?). Ce manège a permis de gagner trois bon mois.

Mais la Ville qui ne voulait visiblement pas sortir de cette grève (vieille désormais de cinq mois) a alors eu une idée de génie, certes des plus tordues. « Pour ne privilégier aucun syndicat (étrange alors que les grévistes sont en intersyndicale), les négociations ne reprendraient qu’après les élections professionnelles du 4 décembre 2014 ». C’était officiel, l’équipe d’Anne Hidalgo et de son adjoint en charge des  sports, Jean-François Martins, décidait que cette grève devait atteindre son dixième mois. On ne discuterait seulement qu’à partir du onzième. Au mieux. Apparemment, la Ville de Paris voulait entrer dans le Guinness book des records et rien ne la ferait dévier de son objectif.

Une année est enfin passée et Jean-François Martins, flanqué d’Emmanuel Grégoire (adjoint en charge des ressources humaines) ont fait une proposition royale : une augmentation mensuelle de 12,50 euros. Pour ceux qui travailleraient deux dimanche dans le mois, cela fait 6,25 euros (on a compté, vous pensez bien). L’intersyndicale a donc été contrainte de reconduire son préavis. De son côté, Anne Hidalgo a débouché un petit mousseux pour fêter ces douze mois de conflit.

La revalorisation des indemnités des dimanches travaillés aurait alors dû être étudiée au comité technique central de la Ville de Paris le 5 mars 2015, selon les dires de la mairie. Hélas, ce point a été  retiré in extremis de l’ordre du jour. Après tout, il n’y avait pas urgence, cela ne faisait que treize mois que le personnel était en grève mais il reste mobilisé. Une fronde de sans-dents pas vraiment du goût de la gauche mondialisée au pouvoir à Paris. Et ça, l’équipe d’Anne Hidalgo ne l’avait pas prévu.

Du coup, l’exécutif décide de recourir à des moyens on ne peut plus inavouables pour enfin faire cesser « cette maudite grève » : « caisse noire », recrutement de vacataires et de personnel de sociétés privées, menaces de sanction et de mutation pour ouvrir coûte que coûte certains gros équipements, quitte à fermer les plus petits, des méthodes épinglées sous contrôle d’huissier (lire ici). Bref, on croyait avoir installé une ancienne inspectrice à l’Hôtel de Ville et on se retrouve avec l’héritière de Margaret Thatcher (lire ici).

Le plus triste peut être dans cette histoire pour la gauche parisienne,  c’est qu'elle rejette sur les méchants ouvriers grévistes les conséquences de cette longue grève, alors qu'ils n’ont ouvert aucunes négociations pendant un an. Pourtant, dans toute entreprise qui se respecte, les syndicats doivent être reçus dans le cadre d’un préavis pour justement essayer d’éviter la grève… De nombreux élus s’en sont d'ailleurs émus (lire ici). Ainsi que les attachés d'administrations de la Ville de Paris (lire ici).

Mais pas de pot pour nos sosos, les sans-dents de la DJS ne désarment pas et vont se réunir à nouveau le 6 mai pour une grande assemblée générale. La grève va alors atteindre son quinzième mois. Le personnel attend toujours que la mairie fasse des propositions dans le cadre de véritables négociations pour sortir de ce conflit. Anne Hidalgo aura bien mérité d’entrer dans le livre des records.

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