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09 / 10 / 2014 | 38 vues
Louis Moreau / Membre
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Ces commerces de proximité qui disparaissent en Alsace

Comme partout en France, au début des années 1980, l’Alsace a connu une vague de disparition de ses commerces de proximité. Aujourd’hui, entre les difficultés rencontrées par l’emblématique Coop d’Alsace et des zones rurales qui continuent à être désertées, certaines communes redoutent l’exode.

 

Évolution du commerce de proximité en Alsace

Les commerces de proximité désignent les magasins du quotidien dans lesquels les consommateurs se rendent régulièrement : boulangeries, boucheries, épiceries ou bien encore certains petits supermarchés (1). En Alsace comme dans le reste de la France, ils ont souffert de l’essor des hypermarchés et des zones commerciales périphériques, puis de celui des discounters. Aujourd’hui, au niveau national, la tendance est à la stabilisation, voire à un léger rebond. Cependant, en Alsace, le taux d’équipement en commerce de détail alimentaire révèle que sur ce secteur, la région se situe en-deçà de la moyenne nationale, mais également de celle de la province (2).

 

Des zones rurales particulièrement touchées

Les zones rurales sont les premières concernées par les disparitions des commerces de proximité. Environ 40 % des communes rurales alsaciennes n’en disposent d’aucun (3). À La Vancelle, petit village du Bas-Rhin, tous les petits commerces ont disparu ces 20 dernières années. Si bien que c’est la mairie qui a repris le flambeau des services de proximité, en offrant une plate-forme multi-services. À Wingersheim, commune bas-rhinoise de 1 200 habitants, l’un des derniers commerces est celui du cordonnier. Il est catégorique : à son départ, il n’y aura pas de repreneur, la zone de chalandise est insuffisante. Il concède même volontiers : « Si j’avais 20 ans de moins, je ne serais pas à Wingersheim. Je serais dans une zone commerciale, comme tous mes copains » (4). Le cercle vicieux est enclenché : plus les commerces disparaissent, moins les zones sont attractives pour en attirer de nouveaux. Avec tous les problèmes que cela implique en termes de vie, d’économie et d’emplois locaux.

 

Le cas de la Coop

 

Mais l’histoire du commerce de proximité en Alsace est indissociable de celle de l’emblématique Coop d’Alsace. Ce réseau alsacien était une coopérative de magasins de notamment type « supérette », qui couvrait, du temps de l’âge d’or, l’ensemble du territoire urbain et rural. Mais faute d’avoir su évoluer, le réseau a durement souffert de la concurrence des grands distributeurs nationaux. Jusqu’à frôler le dépôt de bilan en 2011. De nombreux magasins avaient alors déjà été fermés, ce qui n'a pas été sans conséquences en termes de vie locale et d’emploi. Le plan de relance destiné à moderniser le petit réseau de distribution en valorisant les produits locaux et en élargissant les horaires d’ouverture est venu trop tard (traditionnellement les magasins avaient des horaires restreints : fermeture sur le créneau de midi et dès la fin d’après-midi). Le groupe a finalement trouvé un repreneur et cédait ainsi 129 des 144 magasins de proximité qui lui restaient à Leclerc et à Carrefour Proximité France en avril dernier. Un sursis dont il faut souhaiter qu’il augure d’une reprise durable : un échec mettrait un coup sévère à l’état du commerce de proximité alsacien. Carrefour s’est engagé à investir 18 millions d’euros pour moderniser ces magasins, et renforcer leur attractivité.

 

Quel avenir pour le commerce de proximité alsacien ?

Néanmoins le commerce de proximité reste bien un secteur d’avenir. C’est une tendance sociétale que l’on observe en Alsace comme ailleurs. « Les consommateurs seraient […] plus nombreux à valoriser le tissu économique local et les commerces à taille humaine », résume un article de Futuribles (5). Le commerce de proximité se fait en effet plus attractif, en jouant sur ses atouts : proximité bien sûr, qui permet de répondre à la tendance du retour de l’achat quotidien plutôt qu’en grandes quantités, mais aussi animation de la vie locale, lien social et services (livraison, ouverture…). Marc Weill, vice-président de la CCI de Strasbourg en charge du commerce, le rappelait à l’occasion de la journée nationale du commerce de proximité : « le commerce de proximité bien sûr a beaucoup souffert […] pourtant il renaît de nouveau ».  

Mais l’évolution des commerces de proximité pour rester attractifs ne se fait pas toujours sans heurts. À Wingen-sur-Moder, village au cœur du parc naturel des Vosges du Nord, l’ancien magasin de proximité Coop a rouvert au printemps sous enseigne Carrefour. Son gérant, afin de développer l’offre de services du magasin, a élargi les horaires d’ouverture, y compris le dimanche matin de 9h00 à 12h00. Une autorisation municipale lui avait été délivrée, « pour permettre à ce magasin de vivre ». Quant aux salariés du dimanche, ils travaillaient sur la base du volontariat et contre compensation. Mais un groupement commercial et plusieurs syndicats ont obtenu gain de cause auprès du tribunal de Saverne pour imposer sa fermeture le dimanche.

En Alsace-Moselle, la législation est en effet plus restrictive que dans le reste de la France sur le travail dominical. Il n’y a pas à Wingen-sur-Moder d’arrêté municipal autorisant explicitement l’ouverture des commerces alimentaires le dimanche matin (comme il existe désormais à Strasbourg, par exemple), ce qui cause des imbroglios juridiques sur fond de textes anciens et d’interprétations délicates. Seulement avec 200 à 300 clients le dimanche matin, le magasin réalisait près de 10 % de son chiffre d’affaires ce jour, tout en contribuant à l’animation de la vie commerciale locale. Cette fermeture menace ainsi aujourd’hui 2 à 3 emplois (le magasin compte 13 salariés) et sans doute aussi son attractivité.

C’est pourquoi toutes les parties prenantes de ce débat devront rester vigilantes car si des signes encourageants émergent, rien n’est encore acquis pour la sauvegarde pérenne du commerce de proximité en Alsace.

(1) Voir la définition de l’INSEE.
(2) http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=99&ref_id=t_4403R.
(3) Selon le dernier recensement de 2008.
(4) Interview disponible sur le site de France 3.
(5) Le renouveau du commerce de proximité.

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