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La protection sociale comme moteur du lien social
Le Cercle de recherche et d’analyse sur la protection sociale (CRAPS) vient de présenter la publication d'un essai qui propose « cinq leçons pour penser le social au XXIe siècle ».
Les auteurs, Hervé Chapron et Michel Monier, respectivement ancien directeur général adjoint de Pôle Emploi et ancien directeur général adjoint de l’UNÉDIC, observateurs privilégiés des politiques sociales, refusent l’État-pourboire et plaident en faveur d’un débat conciliant durabilité budgétaire et durabilité sociale afin que la protection sociale demeure une idée d’avenir. À cette occasion, ils invitent à refonder la démocratie sociale et à retrouver le sens et le rôle de l’État.
Si le système de protection sociale à la française a permis et permet encore de pouvoir envisager « demain » avec sérénité, les auteurs constatent que la protection sociale au cœur de notre société n’est plus perçue comme moteur du lien social mais comme une charge. « Le travail est devenu un coût et les cotisations une charge. Le financement du système s’est fiscalisé, l’État devenant gérant en lieu et place de garant de l’ensemble ». De façon cruelle, la pandémie de covid-19 a révélé une vérité différente selon les auteurs, mettant en lumière que des pans entiers de la protection sociale étaient « les filets de sécurité » de l’économie et les amortisseurs sociaux d’une société en mouvement.
Par mesures ponctuelles et pour parer au plus pressé, dans la hâte, par absence de prévision et par ajouts successifs sans mesurer les effets tant en termes de philosophie du système que de sa propre cohérence interne, « un mélange des genres, un amalgame silencieusement disruptif ont dénaturé le jardin à la française qu’était la protection sociale à sa création ». L’impératif de l’immédiateté politique et l’objectif d’universalité ont, selon les auteurs, transformé un système qui associait assurance sociale et solidarité pour en faire un tout uniforme, sans vision prospective, « l’amalgame a prévalu sur la complémentarité et, sans qu’aucun débat ne se fasse, un choix de société s’est imposé par touches successives ».
À cet égard, ils considèrent que les termes du débat sur le protection sociale sont aujourd’hui mal posés car « on ne sait plus de quoi l’on parle, on ne sait plus ce qu’est la protection sociale, ce qu’est la solidarité, ce qu’est l’assistance, ce que doit être l’action humanitaire ». Une nouvelle morale (celle de la solidarité universelle) a dissous le modèle social et une exigence de protection universelle s'est substituée au lien social. La prestation sociale est devenue un bien de consommation, placebo des excès du néolibéralisme.
Pour les auteurs, si le moment était déjà propice pour un débat, il est, après la crise sanitaire, inévitable. Ces derniers considèrent qu’il est nécessaire de penser le social au XXIe siècle en termes de choix de société plus qu’en correction des insuffisances du modèle. Ainsi, il ne s’agit pas de donner un sens à une succession de réformes mais de trouver le sens à donner à un nouveau modèle social « qui ne peut éviter un débat tant sur le périmètre, le contenu et la finalité de la protection sociale ». Par une réflexion nourrie de l’Histoire, ils invitent les lecteurs et plus généralement les citoyens à participer au débat public sur l’avenir de la protection sociale et souhaitent poser les éléments de ce débat « rien de plus mais rien de moins ».
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