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13 / 12 / 2022 | 70 vues
Fabien Brisard / Abonné
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Assurance chômage : une réforme qui ne dit pas son nom

Pour Hervé Chapron, membre du Comité directeur du CRAPS,  ancien Directeur général de Pôle emploi et Michel Monier , ancien Directeur général de l’Unedic,  membre du CRAPS, cette réforme poursuit la transformation d'un système d'assurance en un système de solidarité...

 

La nouvelle réforme de l’Assurance chômage est désormais connue. Aux habituels changements paramétriques elle ajoute une ambition contracyclique. Le pari macroéconomique mérite d’être souligné.  Décidée par les seuls Pouvoirs publics cette réforme poursuit la transformation d’un système d’assurance en un système de solidarité, tout entier à la main de l’État, ignorant les partenaires sociaux et les réalités des bassins d’emploi.


Les angles morts de la réforme



En visant le plein emploi par l’incitation des chômeurs indemnisés la réforme oublie les chômeurs non indemnisés, les chômeurs de longue durée les plus éloignés de l’emploi. Avec cet angle mort la réforme est insuffisante, sauf à accepter le chômage de longue durée indemnisé par les minima sociaux.


En fixant à 9% le taux de chômage national déterminant du déclenchement de l’incitation par la diminution de la durée d’indemnisation, la réforme ignore les réalités des bassins d’emploi qu’un taux national ne représente pas. Les chômeurs des territoires à fort taux de chômage seront indemnisés selon le nouveau régime commun.


Si l’incitation des chômeurs indemnisés, particulièrement les seniors, à reprendre rapidement un emploi est une bonne chose, la réforme omet les incitations, pour les employeurs, à conserver les vieux salariés dans l’emploi. Pour ambitieuse qu’elle se veut elle est incomplète, déconnectée de la réforme des retraites annoncée. L’ambition serait donc, davantage que contracyclique, celle d’un changement de culture de l’Entreprise.


Ainsi, si l’ambition contracyclique se présente boiteuse, l’ambition comptable est, elle, une fois encore ignorante des charges qui pèsent sur l’Unedic. Au-delà de la stricte indemnisation de la perte d’emploi le financement de Pôle emploi, des cotisations de retraites complémentaire des indemnisés, le régime des frontaliers sont des causes structurelles du déficit de l’Unédic.


Il faudra réformer la réforme…
 

Cette nouvelle réforme de l’Assurance chômage est une étape supplémentaire de sa transformation d’un régime d’assurance du risque de la perte d’emploi en un régime de solidarité nationale avec, chose nouvelle pour un dispositif de solidarité, une forme de sanction par le mécanisme de la contracyclicité. Il faudra réformer cette réforme qui fait fi des transferts sur les minima sociaux des économies attendues sur l’indemnisation. À ce stade, l’indemnisation du chômage est un modèle hybride. L’employeur, reste le seul cotisant écarté de facto de la gouvernance du dispositif. Le modèle doit finir sa mutation en s’affirmant système de solidarité nationale tout entier à la main de l’État, et non plus interprofessionnel. Cette perspective ouvre la possibilité d’une réelle refondation du système.


Dans un système de solidarité nationale la cotisation employeur perd sa raison d’être et le coût du travail, dénoncé comme cause de notre préférence pour le chômage, n’a pas à supporter une cotisation chômage. C’est la compétitivité de l’appareil productif qui bénéficierait, non plus d’un allègement mais de la disparition du coût du chômage tout entier financé par la collectivité.


…et sortir du modèle hybride


La réforme de l’indemnisation du chômage se présente, au-delà de ses aspects paramétriques et de son ambition contracyclique, comme une étape vers un système de solidarité nationale. À ce titre elle ne dit son nom, cette nouvelle réforme préfigure un premier niveau de solidarité, étatisée. Espérons qu’il fera place à un régime complémentaire d’assurance volontaire hors des critères maastrichtiens. Ce deuxième niveau peut être celui des assurances privées mais il peut être aussi celui qui fait réinventer un paritarisme de gestion créateur de droits sociaux contributifs.


Parions que ce soit là le point de rencontre des Pouvoirs publics et des acteurs économiques et sociaux. Si les uns et les autres sortent de fausses certitudes, évitent les cadrages qui bloquent toute négociation ils redonneront un sens commun à la démocratie sociale qui, ballottée entre les revendications de ronds-points et les 49-3, ne peut pas rester l’enfant illégitime de la démocratie.

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