Pas question de remettre en cause l'indexation du SMIC sur l'inflation
Lors de l’audition de notre organisation syndicale par le groupe d’experts sur le SMIC le 9 novembre 2023, Gilbert Cette, président du groupe d’experts, est revenu principalement sur une recommandation formulée dans leur dernier rapport : la suppression de la revalorisation automatique du SMIC fondée sur l’inflation, proposant d’indexer le SMIC sur les minima de branches.
Force Ouvrière s’y est vivement opposé !
La revalorisation automatique du SMIC qui, en vertu de la loi, tient compte de l’évolution du niveau des prix, a démontré son absolue nécessité pour maintenir le pouvoir d’achat des plus bas salaires, en particulier dans la période de forte inflation que nous connaissons actuellement.
Chaque année, au 1er janvier, le SMIC est revalorisé grâce à une formule qui tient compte :
➢ de la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du SHBOE (salaire horaire de base moyen des ouvriers et des employés) ;
➢ et de l’évolution de l’indice national des prix à la consommation (IPC hors tabac), mesuré pour les ménages du premier quintile de la distribution des niveaux de vie (c'est-à-dire des 20 % des ménages ayant les revenus par unité de consommation les plus faibles).
Il est en outre prévu une revalorisation automatique du SMIC lorsque l’indice national des prix connaît une augmentation d’au moins 2 %. Le SMIC est alors augmenté automatiquement dans les mêmes proportions (article L 3231-5 du Code du travail).
Eu égard à l’inflation, en 2023, le SMIC a été revalorisé le 1er janvier de 1,81 %, puis augmenté de 2,22 % au 1er mai 2023. Il s’établit actuellement à 1 747,20 € euros bruts mensuels, soit 1 383,09 € euros nets.
Ces augmentations résultent de la stricte application du mécanisme légal et automatique de revalorisation du SMIC, indispensable pour faire obstacle à la baisse des salaires en période d’inflation.
Cela vient encore d’être confirmé par l’INSEE dans une étude publiée le 8 novembre 2023 et qui rapporte qu’en 2022, seul le pouvoir d’achat des plus bas salaires s’est maintenu, grâce aux revalorisations du SMIC à hauteur de l’inflation. A l’inverse, le pouvoir d’achat des autres salariés a baissé, et cela de plus en plus fortement à mesure que l’on grimpe dans les niveaux de rémunération.
Malgré ce constat indéniable, le groupe d’experts sur le SMIC persiste à considérer que les modalités d’indexation du SMIC mériteraient d’être modifiées. Au contraire, nous souhaitons élargir ce mécanisme d’indexation sur l’inflation à l’ensemble des salaires et revendique le rétablissement de l’échelle mobile des salaires. Ce mécanisme permet en effet de limiter le tassement des grilles de salaires et de stopper le rattrapage des plus bas coefficients par le SMIC, en particulier en période de forte inflation et de revalorisations successives du SMIC.
Dans une contribution écrite - réalisée conjointement par le secteur de l’économie et le secteur de la négociation collective - nous avons développé nos arguments et propositions.
Les principaux points développés
➢ Le rapport du groupe d’experts sur le SMIC devrait être présenté dans le cadre de la prochaine réunion de la Commission Nationale de la Négociation Collective, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle (CNNCEFP) qui se tiendra courant décembre. Une fois de plus, il est à craindre qu’il ne tienne aucunement compte des points de vue divergents exprimés par les interlocuteurs sociaux (confédérations syndicales et organisations patronales). C’est pourquoi nous revendiquons une participation effective et en temps utile des interlocuteurs sociaux dans la fixation et l’actualisation du niveau du SMIC ;
La Confédération FO revendique :
➢ un SMIC à hauteur de 2 000 € bruts par mois, hors prime d’activité, cet artifice de pouvoir d’achat ne pouvant se substituer au salaire et ne constitue qu’une subvention de l’Etat aux bas salaires ;
➢un retour au mécanisme de l’échelle mobile des salaires (ce qui passe notamment par la suppression de l’article L 3231-3 du Code du travail), afin de mettre fin au tassement des grilles salariales ainsi qu’aux trappes à bas salaires et préserver le pouvoir d’achat des travailleurs, nécessaire en période de forte inflation ;
➢ Au-delà des périodes d’inflation, l’instauration d’une obligation de négocier sur les écarts de salaires dans le cadre des négociations annuelles tant au niveau des branches que des entreprises ;
➢ que les éventails des salaires minima du niveau minimum et du niveau maximum de chaque catégorie socioprofessionnelle (pour les ouvriers, les employés, les professions intermédiaires et les cadres), par rapport au pied de grille, soient fixés conventionnellement afin de garantir de véritables évolutions et trajectoires salariales dans les grilles de classification au niveau des branches, mais aussi des entreprises lorsqu’elles existent ;
➢ la conditionnalité des exonérations de cotisations patronales sur les salaires mais également sur les primes d’épargne salariale et de partage de la valeur à la conformité de la branche au SMIC ;
➢ la suppression progressive des allègements de cotisations sociales sur les bas salaires pour lutter contre les trappes à bas salaires. Une première étape pourrait consister à revoir le seuil d’exonérations aujourd’hui à 1,6 SMIC, et à l’abaisser à 1,3 ou 1,4. Cela permettrait également de dynamiser les négociations salariales
Par ailleurs, nous avons rappelé notre opposition à la politique de baisse du « coût du travail » qui remet en cause une part du salaire différé et dénonce en particulier les exonérations de cotisations qui conduisent les entreprises à privilégier des emplois peu rémunérés et les incitent à limiter les augmentations de salaires, phénomène dit de « trappes à bas salaires » sans qu’aucune contrepartie ne soit jamais exigée ;
➢ Plus largement, notre organisation estime qu’une vraie répartition des richesses passe notamment par une taxation des profits et une réforme fiscale.