La responsabilité de l’État peut être engagée en cas de non-respect de la loi par ses services
Un abattoir exploité en régie par une commune a décidé de licencier un salarié délégué du personnel pour inaptitude physique et a effectué une demande d’autorisation à l’inspecteur du travail. Celui-ci a refusé de se prononcer, se déclarant incompétent pour autoriser le licenciement d’un salarié employé par une régie municipale. L’employeur a licencié le salarié.
Celui-ci a saisi le tribunal administratif afin de faire reconnaître la compétence de l’inspecteur du travail et, par voie de conséquence, une faute de ce dernier engageant la responsabilité de l’État et obtenir une indemnisation de son préjudice.
La Cour administrative d’appel a reconnu qu’il y a eu faute de l’inspecteur du travail, qui était compétent pour donner une autorisation ou un refus d’autorisation de licenciement, mais a refusé de condamner l’employeur au versement d’indemnités, considérant que le salarié n'a pas démontré un lien de causalité directe entre l’illégalité entachant la décision de l’inspecteur du travail et le préjudice allégué. Ainsi, selon elle, le salarié n'a pas rapporté la preuve d’un préjudice direct et certain.
Le Conseil d’État a annulé la décision de la Cour administrative d’appel, qui a opéré un renversement de la charge de la preuve. Il a replacé le licenciement dans son contexte, à savoir l’inaptitude physique, et a considéré qu’en présence d’une décision illégale de l’inspection du travail, c’était au juge administratif de rechercher si des possibilités de reclassement avaient sérieusement été recherchées et non au salarié de rapporter la preuve qu’aucune possibilité de reclassement n’avait été envisagée (Conseil d’État, 7 octobre 2021, n° 430899).
Si ce n’est pas la première fois que le Conseil d’État reconnaît la responsabilité de l’État en matière de licenciement d’un salarié protégé (Conseil d’État, 4 novembre 2020, n° 428741 ; et 4 novembre 2020, n° 428198), c’est la première fois qu’il précise ce qu’il veut que le juge fasse en telle matière, c’est-à-dire se substituer à l’inspection du travail, en quelque sorte.
Cela ne préjuge pas de la décision de la Cour administrative d’appel de renvoi saisie :
- si des possibilités de reclassement sont envisageables, elle accordera une indemnité au salarié ;
- si des possibilités de reclassement ne sont pas envisageables, le salarié sera débouté.
Cela fait tout de même plus de dix ans que ce salarié a saisi les juridictions et il lui faudra encore attendre au moins deux ans…