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13 / 06 / 2017 | 28 vues
Corinne Joiris / Membre
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Comment améliorer la qualité de vie au travail avec la démarche « entreprise en santé » ?

Compte rendu de la conférence du 16 mai dernier organisée par Psya en partenariat avec Afnor compétences.
La démarche de santé et qualité de vie au travail est une démarche canadienne adaptée aux entreprises françaises. Elle propose d’intégrer, sur le long terme, la promotion de pratiques organisationnelles favorables à la santé en milieu de travail dans les stratégies d’entreprises. Le concept de santé est ici compris dans une perspective globale de santé physique, psychologique et sociale. L’objectif est d’implanter de manière opérationnelle des actions en faveur de la santé globale qui auront un effet sur les performances de l’entreprise et l’engagement des collaborateurs.

Richard Lavergne, directeur du développement de Psya, rappelle quelques chiffres important.
  • Le stress lié au travail coûte aux entreprises américaines plus de 30 milliards de dollars par an (Pazzanese, C. « The high price of workplace stress », Harvard Gazette, 2016).
  • 1 travailleur sur 5 se sent extrêmement stressé en raison du travail ou de ses finances. (Lockton Retirement Services, « Finding the links between retirement », Stress and Health, 2016).
  • 1 travailleur sur 4 se déclare stressé en Europe. (Rapport commun EU-OSHA et Eurofound publié en 2014).
  • 22 % des salariés en France déclarent être régulièrement confrontés à un ou des comportements hostiles : marques de mépris, dénis de reconnaissance ou atteintes dégradantes (analyse DARES, juin 2010, enquête Sumer 2010).
  • 50 % des infarctus seraient dus aux stress (source Lancet 2012).

L’affaire de tous

Au Canada, la santé globale est bien comprise par l’entreprise comme par le collaborateur. C’est une action volontaire qui, pour l’entreprise, augmente sa productivité et donc sa rentabilité et, pour le collaborateur, diminue les risques de maladies chroniques ou non et améliore son bien-être.

Pour accompagner l’entreprise dans cette démarche « vertueuse », il existe au Québec une norme « entreprise en santé », la norme BNQ. Cette norme est un guide de bonnes pratiques à mettre en place sur 4 sphères d’intervention identifiées : les habitudes de vie, les pratiques de management, l’équilibre vie privée/vie professionnelle et l’environnement de travail. Les entreprises sont ensuite labellisées selon l’atteinte des objectifs dans chaque sphère.

Répondre aux obligations légales

« En France, c’est bien la réglementation et l’obligation faites aux entreprises qui les ont incitées dans un premier temps à prendre en compte les risques psychosociaux et la santé mentale de leurs collaborateurs », souligne Valérie Combette-Javault, responsable du pôle audit-conseil de Psya et psychologue du travail. L’entreprise agit sur l’activité de travail, les conditions de travail et d’emploi, répondant ainsi à la réglementation. Sa responsabilité est alors engagée.

Si au Canada (et plus particulièrement au Québec), les entreprises agissent dans un premier temps sur les habitudes de vie (alimentation, activité physique, addictions…), en France on se saisit du sujet plutôt par les pratiques de gestion et le dialogue social. L’objectif final étant bien la santé globale sous tous ses aspects. Cela implique alors des pratiques quotidiennes favorisant le bien-être des collaborateurs en milieu professionnel et l’engagement de tous, entreprise et collaborateurs.

Les performances économiques intimement liées aux performances sociales

Quels bénéfices tirer de cette démarche ?

Une diminution : de l’absentéisme, du renouvellement, des cotisations d’assurances de santé et de sécurité au travail (mutuelle, taux d’accident du travail en France), des assurances collectives (prévoyance en France), des effets du présentéisme, du nombre de griefs et de conflits de travail (dossiers contentieux internes et recours aux conseils de prud’hommes en France).

Une augmentation et/ou une amélioration : du climat de travail, de la motivation, de l’engagement, de la qualité du service aux clients et/ou aux citoyens, de la créativité, de la qualité des décisions.

Au Québec, le groupe Entreprises en santé suit les nouvelles études canadiennes sur le sujet et évalue le retour sur investissement de 1,50 à 3,80 dollars canadiens par dollar investi.

Afnor : une  énergie volontariste

Laurence Breton-Kueny, DRH de l’AFNOR, embrasse la démarche québécoise depuis de nombreuses années, convaincue que la santé en entreprise est essentielle pour tous. Elle a mis en place une démarche globale de santé et bien-être au sein même du groupe Afnor en s’appuyant sur :

1.   l’engagement de la haute direction,
2.   l’implication de tous les partenaires,
3.   une démarche structurée et intégrée,
4.   des objectifs du programme liés à ceux de l’entreprise,
5.   des communications efficaces,
6.   l’évaluation du programme,
7.   et un budget suffisant.

Outre l’engagement fort de la direction, un comité de santé piloté par la DRH a été mis en place, composé de la médecine du travail (médecin et infirmière), de représentants des instances représentatives du personnel (2 membres du CHSCT et 2 membres du CE), de personnel du groupe (2 managers de directions différentes) et de la responsable des ressources humaines.

S’inspirant de la norme québécoise, un dispositif structuré et bien intégré a été constitué pour chaque sphère d’intervention : un ou plusieurs animateurs, un budget, des objectifs liés à ceux de l’entreprise, un plan de communication et une évaluation.

Exemples :

  • Dans la sphère « habitudes de vie » : promotion de la semaine « fraîch’attitude » touchant à l’alimentation pour petit à petit donner une connaissance des habitudes de vie saines.
  • Dans la sphère « équilibre vie privée /vie professionnelle » : horaires variables, télétravail, co-voiturage, présence d’une assistante sociale et don de jours aux aidants…
Quant à l’évaluation de la démarche, plusieurs outils suivent ses résultats : un baromètre social tous les 2 ans, un bilan de la politique de santé présenté tous les ans au CE, des bilans de santé tous les 2 ans, une commission mutuelle, des tableaux de bord de RH, avec renouvellement, formation, absentéisme…

Dans sa conclusion, Valérie Combette-Javault insiste sur quelques différences culturelles : « En France, il faut avant tout avoir travaillé le socle RPS avant de parler de qualité de vie au travail. De plus, notre attachement à nos libertés individuelles impliquent et imposent une confidentialité totale, l’anonymat des réponses aux différents questionnaires que nous administrons dans la phase d’audit et une participation basée sur le volontariat ».

Les intervenants Psya sont certifiés par l’Afnor compétences « consultant SQVT » et accompagnent les entreprises dans le déploiement de cette démarche.

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Henry Ford est l’un des pionniers du welfare capitalism (le « capitalisme du bien-être »), une pratique industrielle paternaliste destinée à améliorer le niveau de vie des travailleurs. Le 5 janvier 1914, Ford annonce l’augmentation des salaires journaliers minimum de 2,34 $ à 5 $ pour les ouvriers en apprentissage (« The Five Dollar Day ») ainsi qu’une nouvelle réduction du temps de travail journalier de 9 h à 8 h20. Qualifié de « grand humaniste » ou de « socialiste fou », Ford n’a pas mis en place cette initiative pour établir une solide classe moyenne capable d’acheter ses produits, comme on l’a parfois avancé, ni même par acte de charité. Comme il l’explique lui-même dans ses mémoires, c’est l’« un des meilleurs moyens de réduction des coûts jamais mis en place ». En effet, Henry Ford agit uniquement dans l’intérêt de son entreprise. Ses usines sont en proie à un important turnover, qui conduit de nombreux départements à devoir engager annuellement 300 personnes pour remplir 100 postes de travail, et à un absentéisme excessif. Par ailleurs, presque tous les emplois sont monotones, et le travail sur les chaînes d’assemblage est extrêmement pénible à force de réaliser la même procédure toute la journée. Embaucher et former des travailleurs « de remplacement » est par ailleurs très coûteux. L’augmentation des salaires est donc une solution pour lutter contre ces difficultés. Cette philosophie du travail permet d’augmenter rapidement la productivité, mais les salaires demeurent quasiment inchangés pendant 30 ans : 6 $ en 1919 et 7 $ en 1927. Le « Département social Ford » utilise néanmoins des enquêteurs pour s’assurer que ceux qui bénéficient d’une participation aux bénéfices soient irréprochables. On conseille d’ailleurs fortement aux ouvriers de ne pas fumer, non seulement à l’usine, mais également à la maison. « Si vous étudiez l’histoire de la plupart des criminels, vous constaterez qu’ils étaient des fumeurs invétérés », expliquait Henry Ford. L’alcool, les jeux d’argent et le billard sont également strictement interdits. L’intrusion excessive de Ford dans la vie privée de ses employés sera longtemps source de controverses. Dans ses mémoires de 1922, Ford admettra que « le paternalisme n’avait pas sa place dans l’industrie". Source: Wikipédia