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Annulation de la désignation des conseillers du salarié dans les Hauts-de-Seine
Le demandeur est le Syndicat Anti Précarité (SAP), basé à Chatou. Il a demandé au tribunal d’annuler l’arrêté de désignation des conseillers du salarié du 8 septembre 2014 pris par le préfet des Hauts-de-Seine. La liste retenue par le préfet ne contenait aucun des candidats présentés par le syndicat SAP, ce qui a entraîné l’ire du SAP. À noter que les candidats individuels n’ont pas non plus été retenus.
Le syndicat basait sa motivation sur le fait que la DIRECCTE (qui a la charge de la préparation de la liste) n’avait pas appliqué l’article D1232-4 du Code du travail qui impose à l’autorité administrative de n’établir la liste des conseillers qu’après avoir consulté les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national siégeant à la commission nationale de la négociation collective. Or la DIRECCTE n’avait pas organisé de réunion formelle ni informelle pour établir les listes. La procédure était de ce fait irrégulière. Le tribunal a donné raison au syndicat SAP qui estimait que la décision administrative les privait de la garantie de faire valoir leur défense puisque la décision était implicite, donc sans motivation.
Depuis la notification de cette décision, il n’y a donc officiellement plus de conseillers du salarié dans les Hauts-de-Seine, sans que ceux-ci en soient officiellement informés. Cela ouvre des perspectives de contentieux inédits :
- des salariés qui ne peuvent se faire assister, en violation de l’article 6.1 de la CEDH ;
- des employeurs qui découvriront a posteriori que le conseiller du salarié qui était présent lors de l’entretien n’avait pas le droit d’y assister ;
- que vaudra l’attestation en justice d’une personne ayant perdu, sans le savoir, toute qualité pour assister à l’entretien ?
Un syndicat procédurier
Ce syndicat s’est fait connaître en 2012 pour sa velléité à se présenter aux élections professionnelles des TPE. Il s’était fait débouter, son activité étant, selon le tribunal d’instance de Paris XVème, « exclusivement tournée vers le conseil juridique, l’assistance juridique et l’action en justice et s’apparente à l’exploitation rémunérée d’un cabinet d’avocat ».
Ce syndicat avait déjà présenté un nombre considérable de conseillers dans les Yvelines en 2010, sans commune mesure avec sa représentativité, avant que la DIRECCTE décide de ne pas les renouveler fin 2013.
Comme le fait remarquer le SAP, la DIRECCTE s’appuie sur des syndicats ayant « une audience certaine ». Faut-il accorder le droit exorbitant de pouvoir proposer des candidats à la mission de conseiller du salarié à des syndicats à l’audience incertaine ?
Cette volonté du syndicat de pouvoir bénéficier de nombreux conseillers du salarié s’inscrit-elle dans la démarche de s’appuyer sur eux afin d’alimenter un service de défense syndicale, générateur de revenus ?
Ce jugement pose toutefois la question de la pertinence du maintien du recours à la consultation des organisations d’employeurs pour la désignation de conseillers dont la mission est de conseiller et de défendre uniquement les salariés. Espérons que la nouvelle majorité qui émanera des futurs scrutins répondra de façon appropriée.