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13 / 08 / 2013 | 3 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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ESS: un projet de loi d'importance qui devrait venir en débat au Sénat fin septembre

Le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire a présenté son projet de loi au Conseil des Ministres du 24 juillet, comme prévu avant l'été.

C'est un événement d'importance car il confirme la volonté gouvernementale exprimée à plusieurs reprises  de reconnaissance de l'économie sociale et solidaire et d'en faire véritablement un secteur à part entière.

Rappelons qu'aujourd'hui l'ESS représente 2,4 millions de salariés dans près de 200 000 structures (coopératives, fondations, mutuelles, associations...) dans des secteurs tels que les services d'aide aux personnes mais aussi de l'économie circulaire, de la transition énergétique, la domotique, l'aide à la mobilité, la santé et la prévoyance, les assurances...

Sur les dix dernières années, les entreprises du secteur de l'ESS ont créé environ 440 000 emplois nouveaux, soit une croissance de 23 % (contre 7% seulement pour le reste du secteur privé). À noter aussi que même dans la récente période difficile, l'ESS a continué de créé des emplois alors que l'emploi du secteur privé accusait un net recul. Alors  que 600 000 emplois sont à renouveler d'ici 2020, c'est dire tout l'intérêt et l'implusion que peuvent marquer les différentes dispositions de ce projet de loi qui, pour la première fois entend définir plus précisément le périmètre de l'ESS en s'appuyant sur un certain nombre de principes.

Seront désormais qualifiées d’entreprises de l’ESS les organismes appartenant statutairement à l’économie sociale traditionnelle (coopératives, mutuelles, associations et fondations ayant une activité économique) mais aussi les sociétés commerciales respectant plusieurs exigences découlant des principes fondateurs de ce secteur :
  • gouvernance démocratique ;
  • recherche d’un but d’utilité sociale (soutien à des publics vulnérables, mise en œuvre de missions  participant à la cohésion territoriale, contribution au développement durable) ;
  • orientation stable des excédents vers des finalités qui ne sont pas le profit mais bien la poursuite pérenne de l’activité de l’entreprise ;
  • limitation des possibilités de spéculer sur le capital et les parts sociales.

La loi n’introduira ainsi aucune nouvelle contrainte administrative.

  • Les mutuelles, coopératives, associations et fondations ayant une activité économique appartiendront de droit au champ de l’ESS, sans aucun nouveau formalisme particulier.
  • Les sociétés commerciales qui souhaiteront acquérir cette qualification se contenteront de modifier leurs statuts pour traduire le respect des exigences prévues par ce projet de loi.

Pour cela, elles utiliseront les voies classiques (dépôt de leurs statuts auprès de l’autorité compétente).

  • Les financeurs regarderont ainsi les statuts des entreprises de l’ESS pour orienter ces entreprises, désormais connues d’eux, dans leurs spécificités, vers des outils de financement particuliers, des circuits de financement dédiés et des accompagnements adaptés.

Cette qualification ouvrira droit à certains soutiens publics consacrés au secteur de l’ESS, s’agissant notamment de ceux mis en place par bpifrance. Ces soutiens seront ensuite octroyés sur la base de la doctrine et des critères spécifiques développés pour chaque catégorie d’outil de financement.

Rénover l’agrément « entreprise solidaire » pour financer l’utilité sociale


Il existe aujourd’hui un agrément solidaire qui permet aux entreprises agréées d’accéder aux fonds d’épargne salariale solidaire.

La refonte proposée par le projet de loi correspond à deux évolutions.

  • Toutes les entreprises agréées  devront désormais respecter les exigences relevant du mode d’entreprendre propre à l’ESS (gouvernance démocratique, lucrativité limitée), ainsi que les contraintes portant sur leur capital et sur la rémunération de leurs dirigeants.
  • Les critères d’attribution de l’agrément seront centrés sur la poursuite d’une mission d’utilité sociale qui contraint durablement la rentabilité de l’entreprise ; il ne suffira plus de se conformer à des principes de responsabilité sociale ou environnementale pour être agréé « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS).

Donner du pouvoir d’agir aux salariés

Au delà des précisions et des évolutions apportées à la définition du périmètre de l'ESS, le projet de loi décline en plusieurs titres nombre de mesures qu'il convient de souligner et qui visent à donner du pouvoir d’agir aux salariés :

  • en créant un droit d’information préalable des salariés pour favoriser les reprises d’entreprises en bonne santé par les salariés ;
  • en développant le modèle coopératif pour créer 40 000 emplois dans les SCOP en cinq ans ;
  • en remettant les principes coopératifs au cœur de la gouvernance des coopératives ;
  • en développant  les coopératives d’activité et d’emploi (CAE) pour multiplier les salariés-entrepreneurs.

Créer de l’emploi dans les territoires :

  • en multipliant les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) pour créer des emplois non délocalisables ;
  • en inscrivant l’ESS dans les contrats de développement territorial du « Grand Paris » ;
  • en développant l’emploi privé au service de l’intérêt général avec les sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC).

Consolider le modèle économique des entreprises de l’économie sociale et solidaire :

  • en donnant une définition législative de la subvention pour sécuriser les relations entre les associations et les acteurs publics,
  • en modernisant le cadre juridique des sociétés coopératives,
  • en modernisant le cadre institutionnel et juridique des mutuelles,
  • en confortant le modèle mutualiste en permettant la coassurance des acteurs,
  • en améliorant le contrôle des allégations sociales et équitables pour soutenir le développement du commerce équitable.

Inscrire les politiques publiques de l’économie sociale et solidaire dans la durée :

  • en renforçant les missions du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (CSESS) pour construire une politique partenariale associant les acteurs ;
  • en structurant le réseau des Chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CRESS) pour assurer la coordination territoriale de l’ESS.


Ce projet, qui a fait l'objet d'intenses consultations des acteurs concernés, a plutôt été globalement bien accueilli. Reste à voir comment le bât parlementaire va s'engager au ragard des presssions de toutes sortes qui ne manqueront certainement pas.

Restera aussi la « délicate » question de la représentativité des employeurs de l'économie sociale, toujours différée ces dernières années compte tenu des pressions exercées par le MEDEF. À suivre...

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