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Ryanair veut régler ses conflits sociaux en augmentant les salaires
Récemment, la compagnie irlandaise Ryanair a fait savoir qu'elle augmenterait de 10 % les revenus de son personnel naviguant et de certains de ses pilotes. Refusant toujours le dialogue et la syndicalisation, la « low-cost » a néanmoins pris conscience que sans un mouvement de sa part, la gronde sociale risquait d'exploser. Mais l'augmentation des salaries suffira-t-elle à calmer les esprits alors que les contrats sont toujours précaires et que les accusations d'évasion fiscale s'étendent désormais aux pilotes ?
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Mardi 26 mars, Ryanair annonce dans un communiqué que cette augmentation toucherait tout son personnel naviguant commercial (PNC) ainsi que certains pilotes (principalement ceux dont la base d'affection se trouvent en Angleterre ou en Espagne) à partir d'avril 2013. La nouvelle pourrait surprendre, quand on sait le besoin compulsif de réductions des coûts de la compagnie dans tous les domaines (celui des ressources humaines étant loin d'être épargné). Pour autant, il s'agit d'un coup médiatique pour la « low-cost » qui évoque un « succès considérable » alors qu'à l'étranger, « les syndicats (ndlr : des autres compagnies) doivent négocier des coupes dans les emplois, les salaires, les retraites ». Après l'annonce de la méga-commande à Boeing de 17 avions, l'image de la compagnie florissante où il fait bon vivre pourrait être entérinée aux yeux d'un public peu averti.
Pour autant, ces annonces visent avant tout à redorer l'image de la compagnie « low-cost » dans sa gestion de ses ressources humaines, gravement écornée ces derniers mois par des documentaires vidéo accablants et des poursuites judiciaires en cours pour travail dissimulé.
Dans les faits, cette augmentation de 10 % est le minimum syndical puisque le PNC de la compagnie, souvent constitué de contractants, touche dans la première année entre 1 000 et 1 400 euros bruts par mois, auxquels s'ajoutent les frais : remboursement de la formation et location de l'uniforme. À titre de comparaison, chez Air France le salaire d'un membre du PNC débutant hors prime navigue entre 1 500 et 2 000 euros bruts (2 150 selon Challenges). L'augmentation des salaires permet juste à Ryanair de se rapprocher du niveau des compagnies historiques. Elle n'en demeure pas moins symbolique : il est assez rare de voir Ryanair fléchir sur la question des prix.
Un mouvement d'apaisement
Cette augmentation est aussi un moyen d’obtenir la paix sociale à moindre coût. Avec l'éclosion de groupes sur les réseaux sociaux dénonçant les pratiques de la compagnie et appelant à une meilleure représentativité (notamment le Ryanair pilot group), Ryanair est à l'orée d'un conflit social larvé. Cette annonce intervient quelques mois à peine après le vote des pilotes de Ryanair pour la création d'un système de représentation syndicale.
Parallèlement, les pilotes de Ryanair ont également fait entendre leur colère par rapport à un incident jusque-là passé inaperçu dans la presse. En mars, de nombreux pilotes, en Allemagne et en Italie, ont reçu, à leur domicile, la visite d’enquêteurs du fisc qui ont réquisitionné dossiers, documents personnels et ordinateurs. Or, cette fois, ce n’est pas Ryanair qui est mis en cause, mais les pilotes eux-mêmes pour évasion fiscale ! Les enquêturs espèrent en effet pouvoir faire levier par le biais des pilotes sur les pratiques bien connues de dumping de la compagnie irlandaise, aux dépens du personnel.
Dans ces conditions, ce mouvement ne risque pas d’obtenir les effets escomptés. Déjà, des voix s’élèvent en interne pour rejeter l'accord jugé non représentatif du personnel et antidémocratique.
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