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Ryanair prête à faire payer ses passagers mais pas à payer elle-même
L’information est passée suffisamment inaperçue en France pour qu’elle mérite d’être mentionnée dans ces pages. Il y a tout juste une semaine, Ryanair était condamnée en Espagne pour « entrave au fonctionnement de la justice ».
La condamnation s’accompagne même d’une amende, au montant toutefois très symbolique. La compagnie devra s’acquitter de 600 € auprès du tribunal de commerce de Valence. L’ironie de cette histoire, c’est que si la compagnie se retrouve ainsi condamnée, c’est pour s’être battue contre un précédent jugement l’exposant à une amende de 930,31 €. On comprend que la compagnie (qui annonçait ce mois-ci 596 millions d’euros de bénéfice au premier semestre 2012-2013) ait vu sa santé financière en péril.
La politique de l'autruche
Pour comprendre comment la compagnie en est arrivée là, revenons un petit peu en arrière. Le 18 septembre, le même tribunal de commerce de Valence a donné raison à une association de consommateurs (Unión de Consumidores de la Comunidad Valenciana) qui s’était élevée contre le refus de la compagnie d’embarquer un enfant de 6 ans sans carte d’identité alors que celui-ci était accompagné de ses parents (qui plus est munis de leurs propres pièces d’identité ainsi que d’un livret de famille). Mais chez Ryanair, la règle c’est carte d’identité obligatoire où pas de siège dans l’avion. Une règle plus stricte que la législation espagnole elle-même.
Outrée d’être ainsi déboutée au tribunal, la low-cost a instantanément cherché à faire annuler le jugement (probablement parce que ses propres avocats lui coûtaient moins cher que l’amende d’origine…), prétextant que la condamnation ne lui avait pas été signifiée en Irlande, seul pays où Ryanair l’aurait reconnue valide. Même les employés de Ryanair stationnés à l’aéroport de Valence avaient reçu pour instruction de n’accepter aucune communication juridique.
Le juge du tribunal de commerce, probablement peu amusé par le petit jeu de chat et de souris de la low-cost irlandaise, a poliment fait remarquer à la compagnie qu’à Valence le droit espagnol prévalait et que la condamnation était valable, avant d’en rajouter une seconde, pour entrave à la justice. Alors que la compagnie a tendance à systématiquement se replier derrière le fait qu’elle est domiciliée en Irlande pour toutes les affaires juridiques, il est rassurant de voir un juge pousser Ryanair dans ses derniers retranchements et lui imposer de se plier au droit local (ce qu’elle est pourtant loin de faire avec ses employés). Il reste à voir si Ryanair ne va pas trouver encore une échappatoire à cette seconde condamnation.