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25 / 03 / 2011 | 752 vues
Rémi Aufrere-Privel / Membre
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Les résultats des élections à la SNCF changent la donne du dialogue social

Le jeudi 24 mars 2011, ont eu lieu les élections professionnelles (comités d'entreprise régionaux et délégués du personnel) à la SNCF (155 000 électeurs).
 
Cette élection (CE) était particulièrement attendue compte tenu des conséquences sur l'évolution du paysage syndicale (avec la loi de la représentativité de 2008).
 
Les résultats (25 mars 2011, à 9h30) nationaux (CE) sont différents par rapport au scrutin de mars 2009 :

  • CGT = 37,37 % (- 1,93 %)
  • UNSA = 21,46 % (+ 3,40 %)
  • SUD Rail = 17,38 % (- 0,29 %)
  • CFDT = 13,76 % (+ 2,17 %)
  • FO = 8,58 % (+ 0,6 %)
  • CFTC = 1,03 % (- 4,37 %)

 

Les perdants

La CGT

Grand perdant de ce scrutin, la CGT avec près de 2 points. L'organisation dirigée depuis quelques mois par Gilbert Garrel semblait faire une course poursuite après SUD Rail et a payé cette situation.
 
Bien sûr, la CGT s'érodait depuis plusieurs scrutins (à peine un demi-point), perte pas assez significative pour affirmer la question de son positionnement par rapport à une actualité ferroviaire très difficile pour l'entreprise publique et les droits des cheminots.
 
Nul doute qu'elle devra engager une analyse interne dynamique de la situation pour arrêter cette baisse. Car ce 24 mars 2011 risque fort de ne plus la positionner comme syndicat incontournable dans le dialogue social.

Sur ce point d'ailleurs, vu les autres scores syndicaux, cette interrogation est d'une brûlante actualité.

La CFTC


Deuxième perdante de cette élection, mais attendue par tous, l'échec de la CFTC cheminote, qui passe de 5,40 % à 1,03 %.

Les nombreux départs de dirigeants et militants chrétiens à la CFDT et à l'UNSA, ainsi que la très modeste création d'un appendice syndical de soutien à FO (« FIRST ») ont produit ce score qui signe la disparition de la CFTC qui n'est même plus représentative ni dans sa région historique de Strasbourg (passant de 28,72 % à 7,71 %) et Metz-Nancy (de 14,75 % à 9,2 %).

FO

Avec le score modeste de 8,58 % (en légère progression de 0,6 %), FO s'installe dans la non-représentativité syndicale nationale, malgré la tentative de récupération d'une partie des voix de la CFTC « dissidente », représentée par la création d'un nouvel objet syndical, FIRST, dirigé par l'ancien secrétaire de la CFTC cheminote.
 
Manifestement, c'est un échec de grande ampleur pour cette opération qui n'a apporté à FO qu'un tout petit 0,6 %.

 
Ce résultat se traduit aussi dans le nombre de régions représentatives pour FO cheminots qui baisse, en passant de 9 à 8, tout en limitant la casse en obtenant celle de Strasbourg (de 4,99 % à 18,27 %, contre 28,72 % pour la CFTC en mars 2009) par un effet de transfert partiel de voix ex-CFTC.
 
FO enregistre la perte des régions de Rouen (de 10,51 % à 8,14 %), Paris rive gauche (11,20 % à 7,92 %), ce qui n'est pas une surprise pour certains observateurs, tout comme le résultat national qui hypothèque durablement l'avenir du syndicat de Jean-Claude Mailly dans le paysage syndical du transport ferroviaire.
 
En effet, après deux échecs aux élections de mars 2009 et de mars 2011, il sera difficile, voire impossible, à FO de devenir enfin nationalement représentative, sans forts apports extérieurs et inédits (l'effet CFTC aura disparu en 2014).

Les gagnants

L'UNSA


La grande gagnante de ce 24 mars est incontestablement l'UNSA avec un score amélioré de 3,4 % (passant de 18,06 % à 21,46 %). L'ampleur du chiffre surprendra le monde syndical cheminot autant que les dirigeants de l'entreprise. Bien sûr, un déploiement important de soutiens de propagande syndicale à la facture presque luxueuse a été effectué.
 

On notera aussi un recrutement parfois « clientéliste » dans de nombreuses régions (offre de temps syndical important pour tout nouvel adhérent, voire candidat aux élections DP et/ou CE régionaux), qui témoigne d'une façon assez matérielle d'élargir son audience. Mais cela ne peut expliquer que partiellement cette évolution.

Le positionnement très contestataire de la CGT et la faiblesse relative de la CFDT dans l'encadrement explique sans doute aussi le bon score de l'UNSA qui s'ancre durablement comme deuxième organisation syndicale à la SNCF, en se rapprochant de la CGT.
 
La CFDT
 
En passant de 11,59 % à 13,76 %, la CFDT assure sa représentativité durablement dans le paysage syndical à la SNCF. Elle gagne sa représentativité avec 7 CE supplémentaires (passant de 15 à 22 CE sur 27 au total).

Ses plus grands succès sont remarqués à Reims (de 6,06 % à 15,79 %), Lyon (de 8,03 % à 17,66 %), Marseille (7,40 % à 12,78 %), Bordeaux (9,28 % à 11,25 %), Lille (8,41 % à 10,79 %), les quatre dernières étant des « grandes régions » SNCF.
 
Elle connaît toutefois une baisse significative au CE clientèles (directions centrales) passant de 27,97 % à 22,84 %, ainsi qu'un émiettement à Clermont-Ferrand (de 12,65 % à 11,64 %) et les régions de Montpellier (-0,32 %) et Amiens (-0,20 %). Mais ces résultats devront être analysés à la lumière des circonstances locales.

La CFDT cheminote a engagé une campagne de communication syndicale assez originale dans ce scrutin, avec l'emploi des services d'un dessinateur de presse Wingz, et un déploiement important de communication écrite, complétée par des tournées sur le terrain plus nombreuses qu'en mars 2009.
 
Enfin, l'affirmation de revendications fortes, telles que chèques vacances et tickets restaurants (suivie par l'UNSA) fortement combattues par la CGT, a sans doute pesé dans son score. Sans omettre sa volonté de demeurer revendicative tout en restant à l'écoute des possibilités de négocier (notamment sur les salaires).

SUD Rail se maintient

Enfin, SUD Rail, troisième syndicat à la SNCF, n'est pas arrivé à capitaliser le produit des mécontentements sur la réforme des retraites de l'automne dernier.
 
Avec un émiettement très réduit de 0,29 %, l'organisation maintient sa position.
 
On remarquera des baisses significatives sur les régions de Dijon (de 13,30 % à 11,35 %), Metz-Nancy (de 19,86 % à 17,19 %), CE infrastructure (de 10,22 % à 8,02 %), Reims (de 17,28 % à 14,87 %) et Tours (13,72 % à 11,89 %).

SUD Rail demeure représentative dans 22 CE régionaux sur 27 (comme la CFDT).

Globalement 

  • Seules la CGT et l'UNSA sont représentatives sur les 27 CE que compose la SNCF.


L'élection de mars 2009 avait sonné le glas d'un dégel du dialogue social à la SNCF par l'impossibilité pour l'UNSA et la CFDT d'obtenir 30 %, niveau nécessaire pour conclure des accords avec la direction de la SNCF.
 

  • Le 24 mars 2011, avec 35,22 % (addition des scores UNSA et CFDT), de nouvelles opportunités et responsabilités apparaissent pour ces deux organisations qui demeurent toutefois très différentes dans certaines approches et analyses de la situation économique et sociale du transport ferroviaire en France et en Europe.


La période qui s'ouvre permettra sans doute de nouvelles évolutions dans le dialogue social à la SNCF, et potentiellement dans le transport ferroviaire dans son ensemble.

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