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Obama dans le symbole : la prescription en matière de discrimination est supprimée
Après des années de procédure en Alabama, Lilly Ledbetter a perdu son combat judiciaire contre Goodyear, en 2007 devant la Cour Suprême des USA. Elle demandait réparation de 20 ans de discrimination salariale, parce qu’elle était payée moins que ses collègues masculins.
Tout un symbole
La Cour a pris une position à rebrousse-poil de toute la jurisprudence américaine établie, dont la sienne propre, provoquant un tollé dans les cercles de lutte contre la discrimination en particulier salariale : les demandes de Lilly étaient toutes prescrites, certaines remontant à 20 ans. Or, dans la plupart des Etats américains, la prescription en matière de discrimination est courte : 180 jours parfois 300. Jusque là, les tribunaux considéraient que chaque nouvel acte de discrimination interrompait la prescription. Chaque paye (tous les 15 jours au USA) relançait un délai de 180 jours pour demander des dommages et intérêts sur la totalité de la période de salariat, même plusieurs dizaines d’années en arrière. En pratique, la prescription n’était jamais atteinte, si le salarié restait fidèlement dans son entreprise, et attaquait durant son emploi, ou dans les 180 jours de son départ.
Perdu, alors le combat de Lilly ? Devenue le chantre de la lutte contre les discriminations salariales contre les femmes, Lilly a milité dans la camp Obama très activement. Et avec succès. Hier matin, 29 janvier 2009, le Président Obama a signé à Washington (DC) le “Lilly Ledbetter Fair Pay Act”, qui efface définitivement la position de la Cour Suprême de 2007.
Désormais, c’est dans la loi, donc gravé dans le marbre ! Chaque acte matérialisant la discrimination salariale (virement bancaire du salaire, remise du chèque de la quinzaine, bulletin de paie) fera repartir la prescription de la discrimination pour 180 jours. Pour autant que moins de six mois après son départ de l’entreprise, le salarié américain victime d’une discrimination, introduise une action judiciaire, il pourra réclamer des dommages et intérêts sur les 40 dernières années ! Un système vertueux qui va obliger les entreprises américaines à éradiquer de façon volontariste toutes les discriminations portant sur les salaires.
Et en France ?
En France, la loi du 17 juin 2008 a ramené la prescription de la plupart des actes civils à 5 ans, sauf pour les affaires de discrimination. Le nouvel article 1134-5 prévoit: «L'action en réparation du préjudice résultant d'une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination. Ce délai n'est pas susceptible d'aménagement conventionnel. Les dommages et intérêts réparent l'entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée » Alors l’Obamania avait-elle atteinte notre législateur avant l’heure ? Non, mais nous sommes plus subtils dans la rédaction : si le salarié discriminé prouve qu’il ignorait – qu’il n’avait pas eu « révélation » de cette situation discriminante - la prescription ne commence pas à courir…. du tout. Et étant plus longue (5 ans au lieu de 180 jours), elle protège mieux les salariés et fonctionnaires, donc incite nos entreprises et administrations à rattraper leur retard sur les USA en matière de lutte contre les discriminations. Un tout petit ajout dans le code civil, mais un pas de géant dans la lutte pour la diversité, et contre les discriminations, notamment salariales.