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13 / 12 / 2011 | 2 vues
Nadia Rakib / Membre
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Vers une prise d’acte de la rupture du contrat de travail « à effets différés » ?

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture qui se situe à mi-chemin entre le licenciement et la démission mais, qui est du « ni-ni » : ni un licenciement, ni une démission.

En l’occurrence, elle trouve toute « sa vocation » dans des situations où un salarié reproche à son employeur une inexécution de ses obligations contractuelles telles qu’un non-paiement du salaire ou encore un manquement aux règles en matière d’hygiène et de sécurité etc.

La prise d’acte peut aussi intervenir dans l’hypothèse où un salarié refuserait de subir une modification imposée de son contrat de travail. Dans ce cas, le salarié exprime de façon laconique qu’il n’assumera pas la responsabilité de la rupture et qu’il ne démissionnera pas. Ainsi, comme il ne souhaite pas laisser s’éterniser une situation qu'il refuse, il va alors prendre acte de la rupture de son contrat de travail du fait de son employeur.

Toutefois, il apparaît essentiel de rappeler que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture va produire les effets :

  • soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifient,
  • soit d'une démission dans le cas contraire.

Cela peut donc être « à double tranchant » pour le salarié qui, en cas de prise d’acte injustifiée, aura non seulement perdu son emploi et dans des circonstances ne permettant pas son indemnisation par l’assurance chômage.

Alors, une bonne analyse des faits est donc de rigueur. En effet, il faut savoir qu’un manquement ponctuel de l'employeur à ses obligations contractuelles qui serait explicable par des circonstances indépendantes de sa volonté et sans que soit en cause sa bonne foi ne peut légitimer une prise d'acte de la rupture à ses torts.

Par conséquent, ce n’est pas parce qu'un salarié sera fondé dans ses revendications à l'appui de sa prise d'acte que celle-ci sera nécessairement justifiée.

À titre d’illustration, il est arrivé que la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de Cassation prenne en considération le caractère prématuré d’une prise d’acte de la rupture de son contrat par le salarié au regard notamment d’une attitude conciliante de l'employeur.

De plus, les juges s’attachent aussi à observer si le manquement invoqué par le salarié empêchait ou non la poursuite du contrat.

En principe, lorsqu'elle est assumée comme telle, la prise d'acte s'accompagne d'une cessation immédiate du travail. Cela se justifie par le fait que les manquements de l'employeur de nature à justifier une prise d'acte doivent présenter un caractère grave.

Dès lors, c'est à la date à laquelle le salarié a pris acte que se situera la fin du contrat de travail.

Quid juris : une prise d'acte de la rupture est-elle alors incompatible avec l'exécution d'un préavis ?

Dans une récente affaire, la Cour de Cassation a répondu par la négative en considérant que si le salarié n'avait pas obligation d'exécuter un préavis, l'exécution d'un préavis était « sans incidence sur l'appréciation de la gravité des manquements invoqués à l'appui de la prise d'acte ».

Dans cet arrêt de principe, la Haute Cour a donc reconnu au salarié un droit de continuer de supporter une situation malgré qu’il en dénonce le caractère illicite.

En clair, il faut comprendre que cette décision est favorable au salarié dans la mesure où, l'exécution du préavis présente pour lui l'avantage d’éviter un éventuel dédommagement de son employeur pour non-respect du préavis.

En tout état de cause, relevons ici que lorsque la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié n'est pas tenu d'effectuer son préavis et il doit percevoir son indemnité compensatrice.

En l’espèce, il s’agissait d’une salariée qui avait pris acte de la rupture de son contrat de travail. Son employeur lui réclamait une indemnité pour préavis non effectué.

La Cour d'Appel avait retenu que la salariée était tenue d'effectuer un préavis conventionnel mais, celle-ci ne s’était ni proposée de l'exécuter et n’avait pas non plus affirmé que son employeur l’en avait dispensée.

Peu importe car, d’après la décision rendue par la Cour de Cassation : « le juge qui décide que les faits invoqués justifiaient la rupture doit accorder au salarié qui le demande, l'indemnité de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement et les dommages-intérêts auxquels il aurait eu droit en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ».

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