Organisations
Orange ne doit pas se substituer aux prévenus dans le paiement des indemnités de harcèlement moral institutionnalisé
Suite au jugement pour harcèlement moral rendu le 20 décembre dernier par la 31ème Chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris, la CFE-CGC Orange a écrit à son président Stéphane Richard pour demander expressément qu’Orange ne se substitue pas aux prévenus personnes physiques pour le paiement des indemnités qui se montent à 5,7 millions d’euros dont plus de 5 millions à titre exécutoire.
Au-delà des condamnations pénales, le Tribunal condamne légitimement les huit prévenus à verser plus de 5,7 millions d’euros d’indemnités (dommages Intérêts au titre des préjudices matériel ou moral des victimes, de leurs ayant-droits, d’organisations syndicales et d’associations, outre le paiement des frais de défense au titre de l’article 475-1), dont environ 5 millions avec exécution provisoire.
La CFE-CGC Orange considère que l’entreprise Orange est un bien commun et qu’elle n’a pas vocation à payer une nouvelle fois le prix de la politique de violence sociale des dirigeants de l’époque.
La CFE-CGC Orange s’est émue de ce que la Direction d’Orange ne se soit pas rangée du côté des parties civiles, nonobstant le fait qu’elle ait été prévenue dans le cadre de cette procédure, venant aux droits de France Télécom SA. Cela n’empêchait absolument pas que la position de l’entreprise eût pu être toute autre, fondée sur la reconnaissance des agissements gravement répréhensibles des dirigeants de la période en cause et le soutien de leurs nombreuses victimes.
Or, c’est un choix radical qui a été inexplicablement fait puisque tout au long de l’instruction puis, durant les deux mois et demi d’audience, l’actuelle direction s’est illustrée par un soutien total apporté aux anciens dirigeants, contestant tous les chefs de poursuites, ne reconnaissant pas une seule des trente-neuf parties-civiles retenues par les juges d’instruction et renvoyant à celles-ci leurs prétendues fragilités de la manière parfois la plus indécente.
Malgré ce positionnement infiniment regrettable, notamment en terme d’image pour l’entreprise, la CFE-CGC a fait le choix de ne réclamer qu’un euro symbolique de dommages intérêts à Orange, ce que le tribunal lui a accordé, condamnant par ailleurs solidairement à 40 000 euros de dommages intérêts les sept anciens dirigeants au titre du préjudice moral spécifique de la CFE-CGC.
Par ailleurs, le tribunal a condamné solidairement les huit prévenus au même montant - à savoir 40 000 euros de dommages intérêts au titre du préjudice moral – au bénéfice de SUD, co-fondateur avec la CFE-CGC de l’Observatoire du Stress et des mobilités forcées.
Dès lors, l’intention du tribunal est claire, le préjudice doit être à la seule charge des prévenus personnes physiques, Orange n’étant qu’une caution en cas d’insolvabilité des prévenus.
A notre connaissance, compte tenu des frais d’avocats de près d’une douzaine de millions d’euros des prévenus pris en charge par les assureurs, du versement de près de dix millions d’euros de rétribution de Didier Lombard en tant que PDG de France Telecom, de sa retraite chapeau de 346 715 euros annuels, de sa rétribution en tant que Directeur de la Stratégie du fonds Iris Venture dont Orange est actionnaire, de sa rétribution en tant que Président de STMicroelectronics après son départ de France Télécom, de sa retraite de fonctionnaire se cumulant avec celle de salarié de droit privé, rien ne s’oppose à ce que les prévenus soient en mesure de payer solidairement les 5 millions d’euros.
Plus encore, il serait particulièrement choquant que l’entreprise, et au-delà ses collaborateurs, pâtissent d’une prise en charge même partielle, par Orange SA, de tout ou partie des sommes devant être acquittées par les sept anciens dirigeants pénalement et civilement condamnés.
L’appel des condamnations par les prévenus a suscité une vive indignation surtout au regard de la légèreté des peines prononcées compte-tenu de ce que la seule incrimination de harcèlement moral a été retenue contrairement à la demande la CFE-CGC de requalification en mise en danger d’autrui.
Ni les victimes, ni les familles des victimes, ni les actionnaires, ni l’opinion publique ne comprendraient qu’Orange prenne en charge tout ou partie du montant des indemnités de ceux qui ont imaginé, décidé et mis en place minutieusement la crise sociale non seulement humainement dramatique mais aussi économiquement dévastatrice.
Au-delà du caractère juridique risqué pour Orange, l’impact sur l’image déjà malmenée serait encore plus important si la Direction d’Orange faisait un tel choix. Elle doit au contraire se positionner fortement en se démarquant de cette ancienne direction - constituée de personnes condamnées à des peines de prison fermes par la justice française - et refuser absolument toute solution de compromis visant à alléger le poids financier de ces condamnations pour ces dernières, sauf à leur apporter un soutien qui sera dénoncé sans relâche par notre organisation syndicale.
- Santé au travail parrainé par Groupe Technologia