EDF à nouveau dans la tourmente : un choc pour les salariés
Le bras de fer avec l’État sur la question du nucléaire et du nouveau modèle commercial a conduit au non-renouvellement du PDG actuel du Groupe.
Cette éviction révèle une fois de plus la force des lobbyistes qui, en défendant le maintien de l’Arenh, semblent toujours obtenir gain de cause, et ce quel que soit le gouvernement en place.
Espérons qu’ils ne réussiront pas à déterminer le futur prix de l’électricité à l’aune de leurs seuls intérêts propres. La brutalité de cette éviction soulève une interrogation cruciale : EDF devra-t-elle continuer à réduire ses coûts et produire toujours plus pour satisfaire des appétits privés, sans contrepartie sociale?
Ce genre de message, dicté par des considérations commerciales, ne fait qu’alimenter un sentiment d’injustice parmi les salariés. Si EDF doit être un acteur clé de la transition énergétique, il est essentiel de la libérer de ses injonctions contradictoires, comme la vente à perte de son électricité et une politique de taxation instable dépassant l’entendement.
Malgré le redressement de la production et les efforts des salariés pour garantir la stabilité économique de l’entreprise, EDF continue de souffrir d’une réglementation incohérente et des conséquences de la désindustrialisation du pays.
La souveraineté énergétique de la France et la pérennité d’EDF sont indissociables.
Pour y parvenir, l’entreprise a besoin d’une trajectoire stable, avec des objectifs à long terme.
Quel que soit le futur PDG, il devra relever le défi de clarifier cette trajectoire, en trouvant un équilibre entre service public, rentabilité et transition énergétique. Mais est-ce que de son côté l’État pourra donner un cap clair et pérenne à EDF?
N’est-il pas plus simple de nationaliser véritablement EDF si son objectif est d’en faire un outil de souveraineté énergétique pour le pays?
Cela permettrait à l’entreprise de se concentrer sur ses missions de service public à long terme, sans être constamment soumise aux pressions du marché et aux impératifs de rentabilité à court terme. Pour cela, encore faudrait-il pouvoir sortir du dogme de la concurrence imposé par Bruxelles.
Malgré une crise énergétique sans précédent, on le voit bien, l’ouverture du marché, imposée par l’Union européenne, continue. Or cette dernière est un échec inavoué au regard des constantes augmentations de factures d’énergie. Cependant, un changement de cap est peut-être en cours. À Bruxelles, certains députés européens, tels que Marina Mesure (députée européenne et membre de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie au parlement européen), plaident pour un retour à une régulation des prix par l’État et proposent même de permettre aux États membres de sortir du marché européen de l’électricité, tout en maintenant les interconnexions.
Cette idée semble faire son chemin là où des décisions déterminantes sur la politique énergétique de la France se prennent.
D’ailleurs, d’autres parties du monde, comme les États-Unis, fonctionnent de cette façon : chaque État américain gère son propre modèle énergétique avec un certain degré d’indépendance. En effet, les États-Unis ont un réseau électrique national interconnecté, et chaque État a la possibilité de réguler, développer et exploiter ses propres ressources énergétiques selon ses priorités locales.
Et pourtant, nous ne pouvons pas soupçonner ce pays de ne pas être le champion du libéralisme économique et de la concurrence.
Dans un contexte où la souveraineté énergétique redevient une priorité, il est évident que le système actuel ne peut plus fonctionner selon le modèle concurrentiel imposé par l’Europe. Malheureusement, ce n’est toujours pas la priorité de tous les acteurs. Le profit à court terme semble souvent l’emporter sur les investissements indispensables pour assurer la transition énergétique.
N.B. La nomination de Bernard FONTANA, comme nouveau PDG du groupe, devra passer par des auditions parlementaires le 30 avril prochain, et un Conseil d’Administration sera nécessaire avant sa confirmation par le président de la République début mai.
PPE 3 : 2 ans de retard et toujours sous haute tension politique
La dernière version de la PPE 3 (Programmation pluriannuelle de l’énergie), fruit d’un compromis politique, peine à convaincre tant sur la forme que sur le fond. Cette feuille de route, censée orienter la stratégie énergétique du pays pour les dix prochaines années, témoigne d’un malaise plus profond : notre démocratie peine à se montrer à la hauteur des défis énergétiques.
Manque de cap, absence de débat réel, court-termisme politique… autant de symptômes d’un système en crise de décision. La version actuelle du décret PPE 3 suscite notamment des critiques de la part des parlementaires, qui se disent mis à l’écart du processus.
En réaction, les députés ont adopté un amendement supprimant la possibilité de fixer la PPE uniquement par décret, comme c’est le cas aujourd’hui : une loi pourrait être adoptée avant le 1er juillet 2026.
Toutefois, dans l’immédiat, la PPE 3 restera encadrée par un décret, qui pourrait être validé dès mai 2025, après un débat sans vote prévu le 28 avril à l’Assemblée nationale. Une loi climat viendrait ensuite, possiblement inscrite à l’ordre du jour en juin, pour donner un cadre législatif plus large à cette programmation.
Une incertitude industrielle croissante
Cette instabilité institutionnelle a des conséquences concrètes. La PPE actuelle est obsolète : elle prévoit encore la fermeture de 14 réacteurs nucléaires d’ici 2035. À l’inverse, la PPE 3 propose leur maintien au-delà de 50, voire 60 ans d’exploitation, et annonce le lancement de six réacteurs EPR2, la construction de SMR dès le début des années 2030, le renouvellement du cycle nucléaire d’ici 2026, et l’élaboration d’une feuille de route pour les réacteurs à neutrons rapides (RNR). Ces derniers sont essentiels pour le recyclage du combustible usé, une filière longtemps délaissée après l’abandon des projets Superphénix, Phénix et Astrid.
Pourquoi une telle fronde politique?
La contestation s’explique d’abord par l’absence de débat démocratique autour de cette PPE. Elle s’inscrit aussi dans une volonté de certains de prioriser les énergies renouvelables (ENR) en triplant leur volume, quitte à continuer de déséquilibrer le système électrique français.
Ce choix pourrait s’avérer risqué : selon certains scénarios, d’ici dix ans, la saturation du réseau due à un excès d’ENR pourrait obliger à arrêter temporairement plusieurs centrales nucléaires chaque année, menaçant la sûreté et la maintenance des installations. Le rapport de l’Inspecteur général pour la sûreté nucléaire et la radioprotection (IGSNR) alerte d’ailleurs sur les effets négatifs d’une modulation excessive du parc nucléaire dû à ce phénomène. En 2024, 30 TWh de production nucléaire ont déjà été supprimés en raison de ces déséquilibres.
Ce phénomène soulève également une inquiétude budgétaire : celle de financer deux parcs énergétiques – nucléaire et renouvelable – tout en n’en utilisant chacun qu’à moitié, dans un contexte où la consommation électrique reste stable depuis 2005.
Le manque de flexibilité du système, notamment en stockage (batteries, STEP…), aggrave cette situation.
Pourtant, ces technologies permettraient de lisser la production des ENR, tout en préservant les autres sources pilotables comme le nucléaire. Réactualiser la feuille de route pour plus de cohérence Il devient urgent de réévaluer le rythme de développement des ENR pour préserver un équilibre cohérent du mix énergétique. Actuellement, de nombreux projets photovoltaïques attendent un raccordement, ce qui met à rude épreuve les équipes sur le terrain.
Les énergies pilotables sont elles aussi impactées, générant des coûts économiques élevés. RTE et Enedis prévoient d’investir 200 milliards d’euros d’ici 2040, dont 37 milliards rien que pour le raccordement des parcs éoliens offshore.
Or, dans un contexte de demande électrique stagnante depuis 20 ans, cette trajectoire semble à la fois coûteuse et irréaliste.
Maintenir l’investissement dans l’hydraulique et le nucléaire
Cela ne doit pas pour autant remettre en cause les investissements dans l’hydraulique ni l’électrification des usages, qui demeure un axe majeur de la PPE. Mais cette électrification est freinée par les subventions massives aux ENR (100 milliards d’euros) et par une fiscalité élevée (près d’un tiers de la facture d’électricité), qui alourdit la charge pour les consommateurs.
Les besoins en raccordement et en renforcement du réseau sont estimés à 10 milliards d’euros par an jusqu’en 2030, un coût considérable.
Une étude d’impact scientifique indispensable Il est désormais indispensable de réaliser une étude d’impact scientifique indépendante pour redéfinir un mix énergétique optimal pour la France. Une telle démarche permettrait de guider les choix politiques sur des bases rationnelles, et d’éviter les décisions erratiques ou précipitées, comme la fermeture de Fessenheim. Elle garantirait un avenir énergétique sûr, durable et économiquement soutenable. Enfin, cette étude est également essentielle pour les salariés du secteur, afin que leurs besoins soient intégrés à la transition : politiques de reconversion, formations, garanties sociales…
Autant d’enjeux pour éviter un choc économique et social majeur. Dans un contexte énergétique aussi mouvant que complexe, il est essentiel que chacun d’entre nous puisse comprendre les orientations en cours et les tensions qu’elles génèrent.
La PPE 3, malgré son flou actuel, façonnera durablement notre environnement de travail, nos métiers, nos investissements, et nos priorités.
En tant que salariés du groupe EDF, nous sommes directement concernés par ces choix. Nos expertises, notre engagement quotidien et notre capacité à anticiper les évolutions sont plus que jamais indispensables pour garantir une transition énergétique cohérente, sûre et soutenable.
Le dossier hydraulique va-t-il enfin sortir du bois ?
Depuis 2003, la France est en conflit avec Bruxelles concernant la gestion de ses barrages hydrauliques. Plusieurs solutions sont à l’étude, comme la quasi-régie, le passage du régime concessif au régime d’autorisation, ou encore un mécanisme de compensation permettant aux fournisseurs alternatifs d’accéder à l’hydroélectricité produite par EDF.
Début mars, une proposition de résolution a été déposée à l’Assemblée nationale par les députés Marie Noëlle BATTISTEL et Philippe BOLO pour préserver les concessions hydroélectriques de la mise en concurrence. L’examen de cette proposition commencera le 30 avril.
Parallèlement, la Commission européenne révise sa directive sur les concessions : dans ce contexte, il serait crucial que nos parlementaires convainquent le gouvernement de défendre l’exclusion des concessions hydroélectriques de cette directive. Cela permettrait d’éviter des contreparties et un démantèlement du groupe à la manière du projet Hercule.
Les gestionnaires de réseau doivent recruter massivement pour réussir la 2e électrification de la France mais manquent de bras
Avec la modernisation du réseau, l’essor des ENR et une consommation d’électricité prévue en augmentation de 40 % d’ici 2035, les gestionnaires de réseau devront recruter massivement. Selon un rapport de PwC, 43000 postes seront nécessaires dans les cinq prochaines années, et 6900 personnes devront être embauchées en 2025.
Les métiers concernés sont principalement techniques, comme monteur de réseaux, technicien de maintenance et chef de chantier.
En 2030, ces métiers devront passer de 49000 à 79000 salariés.
Dans toutes les régions, on manque déjà d’ingénieurs pour les réseaux électriques ainsi que de chefs de chantier. L’offre de formation initiale, «bien qu’importante, est souvent trop généraliste et inégalement répartie sur le territoire», insiste PwC. Enedis va recruter en 2025 20000 personnes, dont 10000 en CDI, 4500 alternants et 5000 stagiaires. Les salariés, très sollicités, ne chôment pas et effectuent une connexion au réseau toutes les 45 secondes. Près d’un million de producteurs d’ENR sont désormais raccordés grâce à leur travail. Et ce, tout en devant faire face aux défis liés au changement climatique, avec des tempêtes et des inondations de plus en plus fréquentes.
Pour les salariés du secteur des gestionnaires de réseau, cette période de transformation énergétique offre à la fois des opportunités de croissance professionnelle et des défis importants liés à la charge de travail, à l’adaptation des compétences et à l’évolution rapide des technologies. Il est crucial que les entreprises du secteur, comme Enedis, mettent en place des programmes de formation continue, de reconversion et soutiennent les services de santé au travail pour accompagner ces transitions et éviter que la pression excessive n’affecte la santé des salariés.
Framatome sécurise ses approvisionnements pour les futurs EPR2 en rachetant des sociétés
Framatome a acquis en 2024 Vanatome, fabricant de vannes et de robinets pour le nucléaire, et a récemment racheté Velan et une partie de Segault pour 170 millions d’euros. Ces acquisitions, validées par le Conseil d’Administration d’EDF en mars dernier, permettront de renforcer la chaîne d’approvisionnement pour les futurs EPR2. Velan, spécialisé dans les centrales nucléaires, et Segault, fournisseur des réacteurs et des chaufferies nucléaires, seront intégrés au groupe Framatome.
Ces entreprises étaient sur le point d’être vendues à des investisseurs américains, mais l’État a judicieusement bloqué cette vente en raison de leur sensibilité stratégique. Nous souhaitons une excellente intégration des employés de ces deux sociétés au sein du groupe EDF.
L’usine Framatome de Saint-Marcel s’agrandit pour livrer 2 EPR2 par an
Les composants nécessaires à la construction des futurs EPR2 impliquent l’agrandissement de l’usine Framatome de Saint-Marcel, avec un doublement de sa surface. Les travaux ont commencé cet hiver. Le site forme également des spécialistes dans des domaines uniques à la filière, tels que les inspecteurs nucléaires et les experts en soudage.
Framatome prévoit 500 à 600 recrutements en Bourgogne en 2025, dont 300 dans les usines de Saône-et-Loire. Framatome met ainsi en place des actions concrètes pour garantir la réussite des futurs EPR2, tout en renforçant l’intégration et la compétence des acteurs clés de la filière.
Ces acquisitions et investissements dans l’agrandissement des usines témoignent de l’engagement de l’entreprise à soutenir l’innovation dans le nucléaire et à contribuer à la transition énergétique du pays. En parallèle, ces initiatives auront un impact direct sur l’emploi local et la formation, avec des perspectives de recrutement significatives dans la région.
Le financement du NNF toujours en attente
L’annonce d’un retard de trois ans sur les prévisions de lancement du projet soulève toujours des inquiétudes. Cependant, il vaut mieux prendre ce délai supplémentaire afin de s’assurer que le projet se déroule dans de bonnes conditions. À ces fins, le design des principaux bâtiments de l’îlot nucléaire est toujours en cours, mené par nos collègues d’Edvance et de Framatome.
La décision finale d’investissement devrait être prise au second semestre 2026 et le coût et le calendrier des six réacteurs seront précisés fin 2025.
Une fois ce retard pris en compte, il est essentiel que l’État maintienne une politique stable et prévisible concernant les prélèvements fiscaux et taxes à venir sur nos outils de production. Ces éléments sont cruciaux pour garantir la viabilité financière du projet à long terme, et il est primordial que les décisions concernant ces aspects ne varient pas de manière imprévisible. Espérons donc que cette situation reste stable, afin d’assurer une planification sereine des futurs investissements. Équipe FO Edvance, Framatome et EDF SA à l’usine Saint Marcel devant un Générateur de Vapeur
Pour nos collègues, les retards dans le financement et l’incertitude autour du projet des nouveaux réacteurs nucléaires risquent de créer une pression supplémentaire, en particulier ceux impliqués dans la conception et la construction, avec des risques d’augmentation de charge de travail et de démotivation. Il est donc essentiel de donner rapidement des gages financiers au projet tout en assurant une gestion claire des recrutements, des formations et des conditions de travail.
Quelle sera l’organisation du marché français post-Arenh à partir du 1er janvier 2026?
La fin de l’ARENH est prévue à la fin de l’année 2025, après 15 ans de fixation des prix à 42 €/MWh non indexés. Dès 2026, EDF proposera de nouveaux contrats de moyen et long terme à ses clients, dont de gros industriels. Un nouveau mécanisme est prévu par la loi de finances 2025, modifiant le modèle commercial actuel d’EDF.
Ce dispositif sera fondé sur le coût complet de production déterminé par la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie) avec une marge supplémentaire qui variera en fonction du prix. Si EDF génère de bons résultats, ceux-ci seront redistribués aux clients sous forme de réductions, dans un mécanisme régulateur.
Cependant, cela fait déjà 15 ans que les concurrents d’EDF n’ont pas apporté d’innovation à leurs offres, profitant d’un tarif inférieur au prix de marché. Cette situation a permis à la concurrence de bénéficier de tarifs avantageux sur le dos des clients, du contribuable, et d’EDF, dont le travail a été sous-évalué. Rien qu’en 2022, EDF a perdu plus de 8,5 milliards d’euros à cause de l’ARENH.
Sur les 15 années d’existence du dispositif, les pertes sont difficiles à chiffrer, mais elles se comptent en plusieurs milliards d’euros, montant qui aurait pu être investi dans les EPR2 ou dans le maintien et développement de notre outil industriel ou de nos réseaux.
Le gouvernement doit encore se décider sur le mécanisme de versement universel nucléaire, destiné à remplacer l’ARENH en 2026. Il s’agit d’un enjeu politique majeur pour notre pays et sa compétitivité. Et il y a tout à craindre que le pouvoir politique actuel soit tenté de choisir une formule de mécanisme peu favorable à l’entreprise.
Les TRVE maintenus jusqu’en 2030
Les alternatifs et l’Autorité de la concurrence française vont être déçus ! Les TRVE sont maintenus jusqu’en 2030. Ainsi, les consommateurs auront-ils encore cinq ans de répit, avant la prochaine évaluation de la CRE et du gouvernement en place à cet horizon ?
Les raisons invoquées pour leur maintien résident dans leur effet sur la cohésion sociale et territoriale et la stabilisation des prix, comme FO Énergie l’a toujours affirmé. Une fois de plus, les tentatives du lobbying anti-TRVE et anti-EDF ont échoué, mais pas complètement.
En effet, la CRE a tout de même demandé à EDF de revoir son tarif TEMPO à la hausse, alors que, tout comme les offres heures creuses/heures pleines, cette tarification offre au système électrique une flexibilité essentielle.
Est-ce le captage de 900000 foyers ayant souscrit à l’offre TEMPO qui fait de l’ombre aux alternatifs ?
Les clients ne s’y trompaient pas, puisque leur facture annuelle pouvait baisser jusqu’à 27 % par rapport aux TRV.
Il est donc demandé de réduire cet écart à 14 %!
À part cela, certains oseront dire que la concurrence dans l’énergie fait baisser les prix!