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Mesures sociales du PSE : le pouvoir de contrôle de l’administration
1. Modalités d’intervention de l’administration
Depuis la loi relative à la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, l’administration dispose de pouvoirs renforcés sur le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).
1.1. Transmission du PSE à la DIRECCTE
L'accord collectif déterminant le contenu du PSE ou, à défaut, le document élaboré par l'employeur à ce titre, doivent être transmis à la DIRECCTE pour validation de l’accord ou homologation du document (C. trav. art. L 1233-57-1).
En pratique, l'employeur doit désormais notifier, à la DIRECCTE, tout projet de licenciement pour motif économique d'au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours, au plus tôt le lendemain de la date prévue pour la première réunion d’information des représentants du personnel (C. trav. art. L 1233-46).
Cette notification doit mentionner, le cas échéant, la signature d'un accord collectif portant sur le PSE, auquel cas une copie de cet accord doit alors être jointe à la notification (C. trav. art. D 1233-4, 6°).
1.2. Observations et propositions de la DIRECCTE
La DIRECCTE peut, à tout moment de la procédure, émettre toute observation ou proposition à l'employeur concernant le déroulement de la procédure ou les mesures sociales du PSE (C. trav. art. L 1233-57-6, al. 1er).
Dans un tel cas, la DIRECCTE envoie simultanément copie de ses observations au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et, lorsque la négociation d’un accord collectif est engagée, aux organisations syndicales représentatives dans l'entreprise.
Il appartient alors à l’employeur de répondre à ces observations et d’adresser copie de sa réponse aux représentants du personnel et, le cas échéant, aux organisations syndicales.
NB : L’employeur doit naturellement adopter une attitude proactive face aux remarques de l’administration. En particulier, si la DIRECCTE estime que les mesures sociales du PSE sont insuffisantes, l’employeur a tout intérêt à les renforcer, pour éviter un refus de validation ou d’homologation.
1.3. Injonctions de la DIRECCTE
La procédure d'injonction, prévue à l'article L. 1233-57-5 du Code du travail, « constitue un nouvel outil permettant de faire intervenir un tiers lorsque le dialogue social entre employeur et représentants du personnel est difficile » (instruction du 19 juillet 2013, 2.2.2).
Selon ce texte, toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d'homologation, à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de fournir les éléments d'information souhaités relatifs à la procédure en cours, ou de se conformer à une règle de procédure, est adressée à l'autorité administrative qui se prononce dans un délai de 5 jours.
La demande d'injonction peut être adressée par le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, ou, en cas de négociation d'un accord collectif, par les organisations syndicales représentatives de l'entreprise (C. trav. art. D. 1233-12, al. 1er).
Dans le cadre de cette procédure, la DIRECCTE peut entendre chacune des parties, notamment pour vérifier si l'information considérée a déjà été demandée, comprendre les points de blocage…
Il peut également prendre contact avec l'inspecteur du travail qui suit l’entreprise, pour être éclairé quant aux suites à donner à la demande.
En cas d’injonction, la DIRECCTE adresse une lettre d'injonction, précisant le délai dans lequel l’employeur doit se conformer à la demande et lui rappelant son obligation d'informer la DIRECCTE sur les suites données (C. trav. art. D. 1233-12).
La DIRECCTE adresse également une copie de l'injonction à l’auteur de la demande, au comité d'entreprise et aux organisations syndicales représentatives en cas de négociation d'un accord collectif sur le PSE.
Il appartient alors à l’employeur de répondre à l’injonction de manière motivée.
Un arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles du 24 juin 2014 (n° 14VE00884) vient de juger que l’employeur n'a pas à communiquer sa réponse à l’injonction aux représentants du personnel.
2. Portée du contrôle de l’administration
À l’issue de l’élaboration du PSE, l'accord collectif ou le document unilatéral de l'employeur doit être transmis à la DIRECCTE pour validation ou homologation (C. trav. art. D. 1233-57-1).
Le contrôle de l’administration s’exerce de manière différente selon que le PSE a fait l’objet d’un accord collectif ou d’un document unilatéral de l’employeur.
2.1. Accord collectif
L’accord collectif est validé par la DIRECCTE dès lors que celle-ci a vérifié le respect des règles suivantes :
- sa conformité par rapport à ses conditions de validité (majorité, mentions obligatoires…) ;
- la régularité de la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel (CE, CHSCT…) ;
- la présence dans le PSE des mesures sociales (plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile) ;
- la présence dans le PSE de modalités de suivi de la mise en œuvre effective des mesures sociales.
En cas d’accord collectif, la DIRECCTE exerce un contrôle restreint portant sur la légalité interne et externe de l'accord (instruction du 19 juillet 2013, fiche 2, III, 3.2.2).
La décision de la DIRECCTE doit être motivée et prévoir les délais et voies de recours.
Elle doit aussi mentionner l'obligation, pour l'employeur, de transmettre à la DIRECCTE le bilan d'exécution du PSE dans le mois suivant la fin de la mise en œuvre du contrat de sécurisation professionnelle (CSP) ou du congé de reclassement.
2.2. Document unilatéral de l’employeur
Lorsque le PSE est établi par l’employeur, la DIRECCTE dispose, dans le cadre de la procédure d’homologation, de pouvoirs d’appréciation plus larges sur les mesures sociales.
En effet, ce dernier ne peut homologuer le document de l’employeur qu’après avoir vérifié la conformité de son contenu par rapport (C. trav. art. L. 1233-57-3) :
- aux moyens dont dispose l'entreprise, l’UES ou le groupe ;
- aux mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ;
- aux efforts de formation et d'adaptation.
En cas de litige, comme l’a rappelé la Cour administrative d’appel de Nancy dans son arrêt du 23 juin 2014, il appartient au juge d’apprécier le contenu du PSE.
En l’espèce, les juges ont relevé que les mesures d'aides à la mobilité géographique au sein du groupe étaient d’un montant insuffisant, alors que le groupe avait réalisé un bénéfice important l’année précédant le PSE.
2.3. Décision de la DIRECCTE
La DIRECCTE notifie à l'employeur la décision de validation dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l'accord collectif et la décision d'homologation dans un délai de 21 jours à compter de la réception du document unilatéral de l'employeur, son silence valant décision d'acceptation de validation ou d'homologation (C. trav. art. L. 1233-57-4, al. 3).
En cas de refus de validation ou d'homologation, l'employeur, s'il souhaite reprendre son projet, doit présenter une nouvelle demande à la DIRECCTE, modifiée en fonction des dispositions de la décision, laquelle est obligatoirement motivée (C. trav. art. L. 1233-57-4 et L. 1233-57-7).
Le comité d’entreprise doit alors être consulté (C. trav. art. L. 1233-57-7).