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04 / 08 / 2014 | 6 vues
Nadia Rakib / Membre
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Lutter contre le risque psychosocial et « en faire son cheval de bataille »

D’antan, un cheval de bataille était un cheval spécialement entraîné pour servir au combat. Au sens figuré, faire d’un argument, d’un sujet, d’un thème « son cheval de bataille » revient à défendre un point de vue ou une revendication dans une discussion. C’est ce que l’on observe avec la lutte contre les risques psychosociaux…

Liés aux conditions générales de travail, les risques professionnels font peser sur les salariés la menace d’une altération de leur santé qui peut se traduire par une maladie ou un accident. Il appartient à l’employeur de supprimer ou de réduire ces risques afin d’assurer la sécurité des salariés et de protéger leur santé physique et mentale. Pour ce faire, il doit prendre les mesures appropriées et les mettre en œuvre conformément aux principes généraux de prévention énumérés par le Code du travail.

L’évaluation des risques consiste à appréhender les dangers pour la santé et la sécurité des travailleurs dans tous les aspects liés à l’activité de l’entreprise. Il s’agit d’un travail d’analyse des modalités d’exposition des salariés à : 

  • des dangers (repérage d’un équipement, d’une substance, d’une méthode de travail susceptible de causer un dommage pour la santé…) ;
  • des facteurs de risques (conditions de travail, contraintes subies, marges de manœuvre dont disposent les salariés dans l’exercice de leur activité).
Quid juris : Qu’en est-il des risques psychosociaux (RPS) ? Sont-ils à part entière des risques professionnels ?

Le risque psychosocial (RPS) se définit comme un trouble menant à l’apparition chez quelqu'un de signes souvent faiblement perceptibles qui, faute d’attention, peuvent progressivement s’aggraver jusqu’à devenir pathologiques.

Le risque qu’un trouble se manifeste reste encore au stade de probabilité, tout dépendra de l’individu qui le vit. Voilà pourquoi il s’avère difficile de parler de risques professionnels au sens propre car, si une situation est un risque pour un salarié, elle peut n’être qu’une situation de fait pour un autre...

En effet, parmi les différents risques existants au travail, les RPS ont la particularité de s'intéresser à deux éléments : l'effet psychologique sur le salarié et l'effet relationnel entre les salariés et le travail.

Pour le ministère du Travail, les RPS recouvrent des risques professionnels d’origine et de natures variées, qui mettent en jeu l’intégrité physique et la santé mentale des salariés et ont, par conséquent, une conséquence sur le bon fonctionnement des organisations.

Nombreux sont les RPS qui induisent des troubles psychosociaux tels que le stress, la violence, un mal-être ou du harcèlement. De plus, les RPS peuvent déclencher tout un ensemble de pathologies comme les troubles musculo-squelettiques, la dépression ou, pire encore, un « burn-out ».

  • Aussi, une proposition de résolution a été déposée au Sénat fin juillet, visant à ce que les principes généraux de prévention figurant à l'article L. 4121-2 du Code du travail soient complétés en vue de tenir compte des évolutions relatives à l'organisation et aux méthodes de travail qui ont eu lieu depuis deux décennies.

Celle-ci préconise la réalisation systématique d'une étude d'impact sur les RPS d'origine professionnelle en cas de projet de restructuration, transmise au comité d'entreprise (CE), au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ou, à défaut, aux délégués du personnel (DP).

Elle appelle l'ensemble des pouvoirs publics et les partenaires sociaux à réfléchir aux modalités qui permettraient une reconnaissance en maladies professionnelles des affections résultant d'une exposition à des RPS d'origine professionnelle et qui se caractérisent notamment par un état de stress post-traumatique, d'épuisement manifeste, par une dépression ou par des complications somatiques spécifiques.

Celle-ci insiste aussi sur le fait que dans la situation actuelle, il n’est pas juste que la branche maladie prenne en charge des affections qui découlent de la réalisation de RPS d'origine professionnelle, alors que la branche AT-MP (financée à 97 % par les cotisations patronales) semble plus légitime au regard de la nature des risques précités.

Elle invite les partenaires sociaux et les représentants du personnel (CHSCT, CE, DP) à se saisir davantage de l'enjeu que représente la prévention des RPS d'origine professionnelle.

Par ailleurs, la proposition de résolution met l’accent sur la formation des professionnels des ressources humaines qui doit mieux intégrer la prévention des RPS et, par conséquent, la protection de la santé des travailleurs.

Elle note aussi que l’utilisation mal maîtrisée des nouvelles technologies (ordinateurs portables, smartphones, tablettes etc.) contribue à la porosité des frontières entre vie privée et vie professionnelle. Ceci devenant dangereux puisqu’il en résulte une forme d'épuisement par manque de « déconnexion réelle » du travail. Or, il y a un temps pour tout et le travail et les loisirs doivent vivre en alternance pour qu’un individu puisse s’accorder un temps de repos nécessaire à sa récupération (tant physique que mentale).  

Enfin, la proposition de résolution attire l’attention sur le fait qu’il est indispensable de prévenir plus efficacement les RPS d'origine professionnelle qui affectent tant le secteur privé que le personnel de la fonction publique.

Quid juris : Qu’adviendra-t-il de cette proposition de résolution ? Va-t-elle rester « lettre morte » ou bien allons-nous véritablement « prendre le cheval par les sabots » pour combattre ces maux au travail du XXIème siècle ?

Relevons qu’il y a déjà un peu plus d’un an que le Conseil économique social et environnemental avait préconisé dans un rapport (en mai 2013) qu’il fallait mobiliser davantage les différents acteurs de la prévention en vue de mieux accompagner les entreprises par les pouvoirs publics en matière de santé et de sécurité au travail.

Pour le moment, il convient de poursuivre les efforts engagés s’agissant du renforcement des moyens d’action des CHSCT et de la mission de veille sanitaire des services de santé au travail. Pour conclure, on ne saurait trop rappeler que la diminution des RPS passe aussi par la promotion d’un bon usage des technologies de l’information et de la communication et la mise en place de bonnes pratiques managériales comme le management équitable. Alors, n’attendons pas le devenir de cette proposition de résolution pour agir…

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