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16 / 06 / 2014 | 1 vue
Rémi Aufrere-Privel / Membre
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La bataille du rail (réforme ferroviaire - 1ère partie) : avril-juillet 2013, premiers échanges...

En lançant l’idée d’une grande réforme ferroviaire au printemps 2013, le gouvernement savait sans doute qu’il s’engageait dans un débat politique et économique à nombreuses conséquences.

La réforme proposée doit résoudre les multiples écueils qui heurtent quotidiennement notre système ferroviaire à la fois sur l’efficacité de ce mode de transport tant apprécié de nos concitoyens, sa pertinence, sa modernisation, son développement et les coups de boutoirs des principes et outils de la libéralisation engagée par l’UE.

Depuis plusieurs années, l’attrait du train est battu en brèche par le désamour qu’il subit de la part de tous ses usagers. Sans doute parce qu’il est aimé, on lui en demande trop et on lui reproche beaucoup. Le corps social cheminots, autrefois admiré pour ses forces syndicales et l’esprit du service public, se considère à tort (et excessivement sans doute) méprisé par la nation.

Pourtant, le train fonctionne tant bien que mal. Plutôt bien devant l’explosion de sa fréquentation par les usagers du quotidien qui ont laissé leur voiture au garage face à la congestion des routes et l’augmentation des prix des carburants et assurances.

La CFDT a décidé, dès l’écriture du brouillon du projet de loi du gouvernement, d’investir sa capacité à négocier dans une démarche d’avenir. Un premier résultat positif de son action a été l’introduction du principe de respect de hiérarchie des normes du travail dans le texte du ministre Frédéric Cuvillier. Précisons que la CFDT a été la première et la seule organisation pendant des mois a formuler cette exigence qui paraissait audacieuse pour certains et prématurée par l’organisation patronale du secteur (l’UTP) (1). Cet ajout essentiel a permis de montrer que le gouvernement n’entendait pas construire l’avenir du ferroviaire par le dumping social. Ces quelques lignes sont une vraie rupture avec les lois conservatrices des précédents gouvernements Sarkozy qui considéraient, contre toute logique (et tout respect) du dialogue social de branche, qu’un accord d’entreprise pouvait déroger au Code du travail et aux conventions collectives de branche.

Nul doute que pour la CFDT, ces dispositions législatives scélérates seront à répudier avant la fin du quinquennat de François Hollande pour dynamiser  un dialogue social de qualité au-delà des acquis des différents accords nationaux interprofessionnels (2).

Le second moment fort a été les auditions dans le cadre des commissions Bianco et Duron sur les transports ferroviaires. La première commission portait sur « réussir la réforme ferroviaire ». Animée par un ancien ministre et élu provincial, Jean-Louis Bianco a pris la mesure des difficultés et défis du projet gouvernemental. Mais aussi des formidables contradictions entre les propos constructifs (voire compréhensifs) sur les enjeux de la réforme y compris par des acteurs syndicaux aux postures vindicatives souvent ritualisées. Ainsi, en décidant de mettre en exergue une citation extraite d’une réponse du secrétaire général de la CGT cheminots (3), le rapporteur montrait les possibilités d’une conduite du changement négociée car comprise, comprise car négociée.

Quand au rapport de Philippe Duron « Mobilité 21 », il confirmait la logique d’un calendrier de priorités à définir selon les besoins de transport du pays. Ce faisant, il affirmait ce que de nombreux experts indiquaient depuis plusieurs années, à savoir de redonner la priorité aux transports de la vie quotidienne en détérioration constante.

La troisième étape a été la première rencontre officielle entre toutes les organisations syndicales (y compris celles qui ne sont pas représentatives dans l’EPIC et le groupe SNCF) et le ministre Frédéric Cuvillier le 2 juillet 2013. Comme dans une plénière d’un comité central d’entreprise SNCF, les représentants syndicaux ont proclamé leurs revendications visant à conserver les règlementations actuelles applicables à la SNCF et fruit des retours d’expériences de l’entreprise historique. Selon la CGT, c’est la « voie du service public » qu’il faut prendre.

Derrière cette formule difficilement contestable, il s’agit de presque tout conserver en l’état, sauf une modeste modification des structures liées à l’impartialité nécessaire pour l’attribution des sillons aux opérateurs. Changer peut-être mais très peu, tout en indiquant à sa base syndicale qu’on ne changeait rien.

Il fallait oser le dire après avoir indiqué une « construction nouvelle » à envisager devant le rapporteur Jean-Louis Bianco peu de semaines auparavant.

À suivre...

 

(1) Reconnaissons que pour celui qui deviendra président de la commission mixte paritaire nationale de la future branche ferroviaire (première réunion 21 décembre 2013), il était peu probable de voir cette revendication forte CFDT intégrée dès l’origine dans le projet de loi gouvernemental. Quant au délégué général de l’UTP (organisation patronale des transports publics), cette exigence ne devait surtout pas être satisfaite par le gouvernement mais acquise par la future négociation… Pour la CFDT, un premier engagement était à l’origine de sa stratégie de négociation même si elle a participé à la grève SNCF en juin 2013.

(2) Ce serait là un vrai « marqueur de gauche ». On se souvient encore de la déclaration du Président François Mitterrand le 14 juillet 1994, précisant sa volonté de voir tous les salariés couvert par une CCN. Personne ne se doutait qu’une décennie plus tard, deux lois successives (2004 et 2008) allaient remettre en cause un principe essentiel du droit du travail valorisant la négociation collective de branche et le Code du travail et la hiérarchie entre les textes. Ainsi, par accord d’entreprise, il est possible juridiquement de s’extraire des CCN et du Code du travail, souvent au mépris des droits des salariés et en favorisant le dumping social. Le secrétaire général de la CGT cheminots s’est souvent exprimé avec plus de sagesse auprès des différentes commissions parlementaires et ministérielles, prouvant une aptitude à comprendre les réalités du monde tout en défendant fermement ses revendications. Au fur et à mesure, ce décalage entre les propos prospectifs et ceux portés sur « le terrain des luttes » n’a pas manqué de virer au double langage et à l'hypocrisie.

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