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Formation des élus du personnel : les contradictions des ordonnances Macron
Le 31 août, beaucoup de gens se sont contentés de ne lire que le dossier de presse, censé synthétiser le contenu des cinq projets d’ordonnances présentés par le Premier Ministre et la ministre du Travail. C'est une erreur car on ne retrouve pas dans les textes officiels les promesses reprises dans ce document. À titre d’exemple : les mesures en faveur de la formation des élus du personnel et militants syndicaux.
Ceux qui ne lisent que les titres s’en contenteront. « Des garanties pour les syndicats et les élus du personnel qui s’engagent dans le dialogue social » étaient bel et bien annoncées dans le dossier de presse du ministère du Travail le 31 août. Nous sommes nombreux à être allés directement à cette partie IV et lire avec curiosité les mesures déjà annoncées dans le programme du candidat Emmanuel Macron, à savoir :
« 31. Des moyens garantis et des formations renforcées pour exercer son mandat » ;
« 32. Un accès à la formation professionnelle et au bilan de compétences renforcé pour concilier engagement syndical et évolution professionnelle ».
Une fois, deux fois, trois fois, non vraiment : pas de trace dans les ordonnances de ces mesures annoncées, pourtant appuyées par le rapport rendu par Jean-Dominique Simonpoli à la ministre du Travail, qui reprend dans son intitulé même l’idée de favoriser « l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales ». Ceux qui ne lisent que les titres s’en contenteront.
L’INTEFP pas au courant d’un accès facilité pour les IRP
Comme le point n° 34, qui annonce la création d’un observatoire de la négociation, le point n° 35 du dossier de presse a également été omis dans les ordonnances. Il s’agit du « renforcement des possibilités d’évolution vers l’inspection du travail (par concours) pour les élus du personnel et les délégués syndicaux ».
C’est une bonne idée. Cependant, il existe déjà un troisième concours permettant aux candidats justifiant d'une expérience professionnelle en dehors de l'administration publique d'accéder à ce métier. On y trouve des profils variés comme ceux d'élus, de mandatés, de DRH, d'avocats etc. Que suggère alors ce point non développé ? De quelles possibilités supplémentaires pourront alors bénéficier les représentants des salariés ? Y aura-t-il des passerelles avec la VAE et/ou les certifications préparées par l’AFPA et le groupe de travail en cours à la DGEFP ?
Du côté de l’INTEFP, institut national chargé de la formation des inspecteurs du travail, on n’est pas plus au courant. « Le sujet est peut-être d'augmenter la proportion « de 5 à 10 % des emplois à pourvoir » indiquée comme fourchette, en cohérence avec la recommandation n° 5 du rapport de l'IGAS portant sur le « recrutement, la formation et le parcours professionnels des agents du corps de l'inspection du travail », nous répond prudemment à l’Institut, par ailleurs déjà chargé, par l’article 33 de la loi El Khomri de rédiger le cahier des charges de formations communes aux acteurs du dialogue social.
Un réseau de grandes écoles pour former les syndicalistes ?
Le dernier point (n° 36) du dossier de presse est également absent des ordonnances. Il suscite pourtant la curiosité de tous les acteurs concernés : « La mobilisation d’un réseau de grandes écoles et universités volontaires pour former chaque année des militants syndicaux ». La formulation a laissé sceptiques les confédérations qui forment leurs adhérents dans leur propre centre de formation et le réseau des dix instituts régionaux du travail (IRT) également chargés de former les militants syndicaux. Leur rôle sera-t-il modifié ou faut-il considérer qu’il s’agit d’une erreur et que ces formations annoncées s’adresseraient en priorité aux représentants du personnel non syndiqués, soit 60 % des élus du personnel ?
Du côté de la conférence des grandes écoles, qui réunit 223 grandes écoles reconnues par l’État, Francis Jouanjean, délégué général (jusqu’à début septembre 2017) confirme qu’il n’y a eu aucune concertation autour de cette mesure, ni d’initiative visant à former spécifiquement des militants syndicalistes. Pour le représentant de l’association, la réflexion en cours se situe plutôt sur l’avenir de l’enseignement supérieur en France : développer des modules de formation pour faire en sorte que la formation continue s’intègre de mieux en mieux dans le parcours professionnel de chaque salarié (donc des militants), plutôt que de continuer à pousser les jeunes à courir après un diplôme bac +5…