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Permis et cartes grises : vers la suppression d'un millier d'emplois en quelques clics ?
Fin de l’histoire. Depuis la semaine dernière, les préfectures n’accueillent plus les usagers pour la délivrance des cartes grises et permis de conduire. Pour obtenir ces titres, il faut se tourner vers les procédures dématérialisées. Autrement dit, utiliser internet.
Certains se réjouiront d’échapper aux files d’attente dans les services concernés… Certes, mais la disparition de cette mission publique d’accueil constitue toutefois un signe inquiétant.
Annoncée en 2015 dans le cadre du « plan préfectures nouvelle génération » (PPNG) elle traduit en effet une réduction de voilure et des moyens au plan du service apporté à l’usager. Cette dématérialisation induit aussi la perte de plus d’un millier d’emplois, dont des postes d’agents de catégorie C (la plus basse) alors que par les différentes réformes (RGPP, MAP…) ont déjà fait perdre 3 000 emplois en moins de dix ans aux services des préfectures.
Depuis plus de quarante ans, les préfectures accueillaient les usagers pour la délivrance de titres tels que le permis de conduire (2,5 millions d’opérations par an dans les guichets des préfectures) et la carte grise (11 millions d’opérations par an). Cette mission publique vient d’être envoyée aux oubliettes de l’Histoire.
Depuis lundi 6 novembre en effet, l’usager doit pianoter sur son ordinateur pour faire sa demande de titre en ligne. Seules quelques procédures exceptionnelles (suspension de permis, échange de permis étranger…) impliquent de se rendre encore physiquement dans une préfecture.
Le plan gouvernemental général modifiant les missions des préfectures (en en supprimant certaines au passage) a été baptisé « plan préfectures nouvelle génération » en 2015.
Les représentations de l’État sur le territoire devront concentrer leurs missions sur quelques axes : la gestion des crises, la lutte contre la fraude documentaire, l’expertise juridique, le contrôle de légalité et la coordination territoriale des politiques publiques.
Nous n’avons toutefois constaté aucun apport en effectifs supplémentaires sur ces missions prioritaires, regrette Marie-Line Mistretta pour le syndicat national FO du personnel de préfecture et services du ministère de l’Intérieur. Il aura fallu un an et demi de combat syndical pour obtenir 150 postes supplémentaires sur le secteur de « l’accueil des étrangers », précise le syndicat.
Désormais, la délivrance d’une carte grise ou d’un permis de conduire se fera donc en règle générale de façon dématérialisée, c’est-à-dire en suivant les instructions des sites numériques concernés. Dès lors, les demandes des usagers seront traitées par des centres d’expertise et de ressources des titres (CERT). Les usagers recevront ensuite ces titres par courrier. Pour prendre en charge le traitement des demandes dématérialisées de titres, le PPNG a prévu 47 CERT répartis sur tout le territoire et comptant chacun une quarantaine d’agents.
Des « médiateurs numériques » remplaceront les agents.
Vingt-et-une de ces plates-formes traiteront les demandes de cartes d’identité ou de passeport faites en ligne par les usagers. Vingt-et-une autres traiteront les demandes concernant les permis de conduire et cinq autres CERT les demandes portant sur les certificats d’immatriculation ou cartes grises.
C’est un tournant pour les usagers et citoyens. Le syndicat s’interroge : la dématérialisation à outrance permettra-t-elle réellement un meilleur service public auquel beaucoup d’entre nous sommes très attachés ?
Tandis que le PPNG explique que sa finalité consiste à se rapprocher des usagers par le biais d’internet, tout en précisant (selon le projet de loi de finances pour 2017) qu’il s’inscrit dans une logique de réduction des effectifs, la question n’a rien de saugrenu. Tellement peu que le plan de dématérialisation de la mission sur les titres a dû prévoir l’organisation d’un soutien (bien matériel celui-là) aux usagers.
De fait, si le plan PPNG signe la fin des services spécifiques à l’accueil et à la délivrance des titres en préfectures (services qui employaient 4 000 agents environ), il a fallu prévoir la présence de « médiateurs numériques » dans 285 points (préfectures, sous-préfectures et espaces publics numériques).
Vers la suppression d’un millier d’emplois ?
Ces gens (qui ne seront pas forcément des agents sous statut) devront renseigner les usagers ne disposant pas d’internet ou ne parvenant pas à réaliser des démarches pas si simples que cela.Pour le syndicat FO des préfectures, qui craint par ailleurs que le nombre de CERT ne diminue au fil du temps, la question du devenir des agents des préfectures, notamment ceux de catégorie C (53 % des effectifs des préfectures) se pose. Cela malgré le lancement d’un plan de qualification du personnel.
Déjà, dans le cadre de la mise en place par le ministère de l’Intérieur d’un accompagnement du personnel concerné par la réforme PPNG, les agents sont invités à la mobilité depuis deux ans. On les a priés d’aller voir ailleurs, dans les autres services du ministère, dans le périmètre de la police ou de la gendarmerie, voire dans les collectivités locales. Il a fallu une grande combativité syndicale pour lutter contre cette invitation à la mobilité.
Quant aux CERT, ils ont débuté leur activité en étant dotés de personnel contractuel et de vacataires. Le syndicat redoute que la fin de ces contrats ne soit l’occasion d’une nouvelle réduction d’effectifs. Cette modernité des nouvelles procédures numériques appliquées à la délivrance des titres risque ainsi de devenir un outil de suppression d’emplois.
Alors qu’un premier bilan du PPNG devrait être réalisé dans un an, le syndicat des préfectures craint que la réforme des missions des préfectures n’entraîne la suppression de plus d’un millier d’emplois.
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