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07 / 08 / 2017 | 4 vues
Jean-Max LLORCA / Membre
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CHSCT… Out ! Pour quel profit ?

Voici une fausse bonne nouvelle pour les entreprises et une vraie inquiétude sociale pour les salariés : la fin des CHSCT.

Fidèle à la promesse de campagne du Président de la République, le gouvernement entend fusionner dans le secteur privé les IRP : DP, CE et CHSCT. La mesure figure dans la loi autorisant les ordonnances.

Comme l’indique Patrice Huart, ancien DSC dans une entreprise européenne de transport, le CHSCT a grandi en France depuis sa création par les lois Auroux en 1982. Et de préciser que « ses missions sont larges et offrent aux partenaires sociaux un espace de dialogue social autre que celui des réclamations (DP) ou économique (CE) ». On n'y débat que de question de terrain et d’aspect professionnel.

CHSCT : du positif, toujours

Qui a pratiqué le CHSCT sait qu’on y aborde en premier lieu les conditions de travail au sens large, la sécurité au sens actif du terme et la santé au travail dans le seul but de la préserver. Au fil des ans, bien des employeurs ont su positivement articuler cette instance au-delà des joutes parfois partisanes syndicat/employeurs ou intersyndicales. Cette instance est un lieu privilégié atypique dans le dialogue social d’entreprise. C’est unique en Europe.

Depuis des années, les acteurs internes, avec parfois la présence effective du médecin du travail, de l’inspecteur du travail et du service de prévention de la Sécurité sociale, connaissent l’intérêt à analyser tous les accidents du travail, à réaliser ensemble des visites de prévention dans les ateliers ou les espaces de travail, à analyser un projet important tel un déménagement ou parfois même un PSE, cela sous l’angle de la prévention des risques professionnels et des performances d’entreprise.

L’expert CHSCT : la valeur ajoutée

Dans la quasi-totalité des situations, le recours à un expert agréé a pu permettre à l’instance d’élever ses connaissances, son diagnostic, ses pratiques d’analyse et donc aider à se professionnaliser.

Ce dispositif légal pour les élus est possible en cas de risques graves (RPS, amiante, risque routier et TMS) ou, dans le cadre de la mise en place par l’entreprise d’un projet important dans lequel les conditions de travail seraient modifiées. Dans ce dernier cas, le CHSCT est officiellement consulté par l’entreprise.

Ces modalités appartenant aux lois Auroux de 1982 doivent rester à l’identique dans le projet de loi, où le coût d’expertise est pris en compte par l’entreprise.

Fusion des IRP, trois dangers

Bien des cadres ont pu remercier le CHSCT.

Pour beaucoup de spécialistes de la question, la fusion des instances pourrait avoir trois effets négatifs :

  • supprimer cette « professionnalisation CHSCT » de certains représentants du personnel aura pour effet de les remplacer par des élus généralistes, moins centrés sur ces questions mais bien plus aguerris aux pratiques et relations partenariales. Les débats seront sûrement différents. Il n’est pas certains que l’entreprise et les dirigeants y trouvent leur compte ;
  • éloigner les questions de terrain du débat social, comme par exemple la sécurité en termes d'incendie d’un atelier, la sécurité électrique ou la pénibilité d’un poste de travail pour handicapé, c’est les ignorer. L’instance regroupée au niveau central se concentrera davantage sur les questions de stratégie d’entreprise, d’intérêt des actionnaires ou d’orientations sur les objectifs. Les questions d’usure des pneumatiques dans une entreprise de travaux public seront bien loin ;
  • enlever la possibilité de cette instance d’être à la fois une corde de rappel et un lanceur d’alerte sur le danger de situations, par exemple, soulève la question de l’engagement de responsabilité face à la sécurité. Bien des cadres ont pu remercier le CHSCT. Sans le signalement de danger, si le drame avait eu lieu, leur responsabilité pénale aurait pu être engagée. 

Solution politique sans bilan préalable

Comme toujours, la solution hâtive (de supprimer les CHSCT) est arrivée avant d’avoir effectué un bilan de fonctionnement des CHSCT.

Supprime-t-on l’expert-comptable, en tant que professionnel, du fait d’un malaise dans la gestion ? Supprime-t-on aussi le médecin quand le malade a de la fièvre ? Pourquoi supprimer les CHSCT ?

Loin du terrain et plutôt près des théories livresques sur les relations sociales, des économistes politiques ont pris le pouvoir. Ils sont arrivés à convaincre une certaine classe politique de l’inutilité du CHSCT, comme instance sociale spécifique.

La cause serait donc entendue, le CHSCT sera condamné demain au nom de la « libération du travail ». Mais le travail, ce n’est pas cela !

Le travail, pour l’ouvrier ou le cadre, c’est détenir l’expérience et l’expertise. C’est faire émerger le savoir-faire collectif des équipes, dans l’engagement et la motivation de tous. C’est de cela qu'il est question dans les réunions des CHSCT de notre pays, pas d’empêcher de faire fonctionner les entreprises, comme l’affirment les commentateurs politiques, enfermés dans les studios télé ou radio, sans autre démonstration que la certitude.

Les organisations syndicales souhaitent actuellement conserver le CHSCT et ses spécificités de missions et de fonctionnement. Mais des collectifs d’employeurs et de DRH le veulent aussi. Ces derniers demandent la préservation au sein du futur comité social et économique d’un réel espace structuré d’échanges, de négociation de terrain, de prise en compte des questions locales sur les thèmes de conditions de travail, de santé au travail ou de sécurité.

La raison l’emportera-t-elle ?

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