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01 / 09 / 2011 | 1 vue
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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CCI : statut protecteur sur la sellette sur fond de profonde restructuration, alerte sur les risques psychosociaux

Sur les 28 000 salariés des CCI (chambres de commerces et d’industrie), des établissements publics administratifs, 22 000 sont des agents de droit public qui bénéficient d’un statut proche de celui des fonctionnaires à la différence notable qu’ils peuvent être licenciés pour suppression de poste. Mais leur statut prévoit alors une indemnité minimale d’un mois de salaire par année d’ancienneté, avec une majoration de 20 % à partir de 10 ans d’ancienneté.

Un licenciement statutaire qui coûte cher

Licencier pour suppression de poste coûte donc cher. Surtout quand 16 % des effectifs ont plus de 55 ans avec beaucoup d’ancienneté au compteur. Pas question de lancer des plans de licenciements massifs, encore socialement inacceptable pour du personnel de droit public, et surtout incompatibles avec la pression budgétaire de la RGPP (révision générale des politiques publiques) qui s’impose au réseau des CCI dont la question du financement (4 milliards d’euros en 2008 sur des prélèvements essentiellement fiscaux) est un sujet des plus tendus...

On réfléchit ainsi à deux fois avant de licencier un directeur « hors grilles » (ratio de 1 pour 51 salariés...). D’où des placards entiers de directeurs sans aucun pouvoir opérationnel. En attendant, les rapports et autres audits sur les CCI convergent pour appeler au dégraissage des effectifs, notamment au niveau des services de gestion. Le plan « cap 2015 » de la CCI de Paris, lancé à la suite d’un audit facturé 540 000 Euros, a ainsi annoncé la suppression de plus de 300 postes, avec une direction qui privilégie néanmoins les reclassements sur les 187 postes créés pour développer de nouveau services. Sur les 75 emplois supprimés en 2011, outre les 25 départs naturels à la retraite, 15 salariés ont été reclassés, 16 sont en attente de l’être et 14 refusent cette alternative et seront donc licenciés. Au final, « cap 2015 » se traduit bien par des licenciements sans aucun PSE car le statut permet d’éviter d’en passer par là.

Alerte sur les risques psychosociaux

Moins de gestion, plus de services, c’est avec cette ligne directrice que la CCI de Versailles a entamé une profonde réorganisation dans un plan stratégique prévu pour 5 ans (2008-2012). Un plan « modifiant en profondeur un mode de fonctionnement voulu comme plus transversal, plus décloisonné et plus orienté vers un mode de projet ». Au cours des trois dernières années, ce sont près de 20 % des emplois qui ont connu un changement de titulaire et/ou de contenu. Début 2011, le médecin du travail a été « amené à signaler des indicateurs de santé au travail présentant des caractéristiques d’alerte ». Une démarche d’évaluation du stress est en cours. À Paris, l’accord sur la prévention des risques psychosociaux qui se met en place prévoit au sein de chaque direction la désignation de référents, collaborateurs volontaires, ayant pour mission de participer à la détection des risques individuels et collectifs pouvant exister.

  • Le risque psychosocial est bien identifié par les CCI qui vont devoir trouver d’autres solutions que le plan social classique pour dégraisser alors qu’il s’agit pourtant bien de supprimer au minimum 1 500 postes consulaires dans le cadre de la régionalisation qui se met en place. Il s’agit ni plus, ni moins de passer de 175 CCI à une petite centaine, tandis 22 chambres régionales verront le jour pour mutualiser les fonctions de soutien. D’où un nombre important de poste en doublons et de nombreuses mobilités géographiques et fonctionnelles au programme.

Un statut chahuté

Un risque psychosocial d’autant plus important que le statut protecteur est pour le moins chahuté. La pression sur les syndicats est en effet forte depuis 2007 pour introduire un nouveau motif de licenciement en cas de refus de mobilité et réduire les indemnités. En 2010, le projet d’introduire un nouveau critère de licenciement des salariés qui se trouvaient à trois ans d’une retraite à taux plein, avec des conditions d’indemnisations moins intéressantes pour les partants que celles prévus par le statut, a ainsi été mis sur la table. Socialement innaceptable, le projet n'est pas passé mais il est revenu sur la table dans le groupe de travail début septembre sous une autre forme. De même que celui de la mobilité. Deux axes de travail qui feront l'objet d'un nouveau vote en commission paritaire nationale (CPN) fin 2011.

En attendant, à charge des directions de trouver les arguments pour convaincre des salariés de se reclasser ou de bouger géographiquement plutôt que de partir dans des conditions souvent intéressantes pour les plus anciens. Puisque le licenciement de ces derniers coûte cher, le risque est de voir la pression retomber sur les salariés permanents ayant le moins d’ancienneté.

  • Une chose est certaine, les départs naturels ne suffiront pas à absorber les sur-effectifs. A fortiori avec les nouvelles conditions de départs à la retraite. D'où la volonté de la CFDT de voir se mettre en place un plan de départs anticipés.

Dialogue social atypique

Dans ce contexte de profonde remise en cause du statut et des métiers, les modalités du dialogue social restent paradoxalement figées. Alors que la CGT et la CFE-CGC ont recueilli plus de 10 % des voix aux dernières élections professionnelles de la fin 2010, seules la CFDT et l’Unsa gardent le pouvoir de négocier en CPN puisque le protocole électoral prévoit par exemple que l’on puisse obtenir deux tiers des sièges avec 40 % des voix comme c’est le cas de la CFDT. La CGT et la CFE-CGC se sont même vu refuser le droit de participer, en qualité d’observateurs, aux groupes de travail préparatoire aux commissions. C’est pourtant à ce niveau que se négocient notamment les évolutions statutaires, les préretraites...

Ce protocole électoral fait l’objet d’un recours au Conseil d’État, déposé par les deux syndicats jugés comme représentatifs au regard de la loi sur la représentativité. Et pendant ce temps-là, le taux de participation des chefs d’entreprise aux élections consulaires de décembre 2010 n’a pas dépassé les 17 %...

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