Organisations
Hôpitaux de Paris (et autres) : le dialogue social à l’épreuve du réel
Le 2 juillet 2014, plusieurs syndicats de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) signaient avec Martin Hirsch le protocole d'accord-cadre sur le dialogue social (SUD, CGT, CFDT, UNSA, SMPS et CFTC).
Aujourd’hui, contraint par le gouvernement et le pacte de responsabilité qui conduit à l’austérité dans tous les domaines, la direction de l’AP-HP remet en cause les accords passés sur les jours de RTT en indiquant clairement : « c’est ça ou on supprime des emplois ». Cette sorte de charte sur le dialogue social risque de ne pas survivre à ces premiers travaux pratiques de la confrontation sociale !
Quelques extraits donnent le ton du document :
« Si l’accord n’a pas d’effet juridique direct, il constitue un engagement moral fort qui lui donne de fait une force contraignante et engage les parties signataires (...) Le dialogue social est avant tout un état d’esprit qui implique de bâtir des relations de confiance et de respect mutuel ».
« Les représentants du personnel seront informés et associés le plus en amont possible des décisions et pas seulement au moment où il n’y a plus de marge de manœuvre pour tenir compte de leur demande ou avis (...) Les projets de réorganisation donneront lieu à un dialogue social renforcé avec les organisations syndicales (centrales et/ou locales), notamment au niveau des unités de travail, des services et des pôles, et s’accompagneront (si cela est nécessaire) d’une étude de leur effet sur l’emploi et les conditions de travail des agents concernés ».
Ainsi sont intégrés différents chapitres dont la négociation préalable à la grève :
« Lorsque les organisations syndicales déposent un préavis, précisant les motifs du recours à la grève et parvenant cinq jours francs avant le déclenchement de la grève, il est rappelé que pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier ».
Le jour des travaux pratiques est venu
150 millions d’économies à trouver à l'AP-HP en 2015 pour répondre aux exigences du pacte de responsabilité du gouvernement (approuvé par la CFDT, la CFTC, l’UNSA et la CFE-CGC).
Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP a bien convoqué les 8 syndicats de l’AP-HP le 6 mai 2015 pour remettre en cause le protocole RTT signé en 2002. À défaut d’un accord, il devrait imposer sa réforme, après consultation des instances représentatives du personnel (au niveau central puis local) avec une date d’effet au 1er janvier 2016.
L'objectif de la direction est de « réaliser des économies à hauteur de 1 000 postes en équivalents temps plein par an, sur quatre ans » ou de supprimer des jours de RTT (20 à 24 jours par agent) pour trouver l’équivalent de ces 1 000 postes.
« Le plan sur les RTT s’inscrit dans la mise en œuvre du pacte d’austérité du gouvernement et anticipe l’application du projet de loi sur la santé, qui exige 3 milliards d’euros d’économies à l’hôpital public », indique Jean-Emmanuel Cabo, secrétaire général du syndicat FO AP-HP. « Rien que pour l’année 2015, l’AP-HP doit faire 175 millions d’euros d’économies. Nous sommes très inquiets des conséquences sur l’organisation des plannings et la vie de famille du personnel mais aussi sur la qualité des soins délivrés aux patients ».
Entre Marseille et Paris, 5 000 suppressions d’emplois sont déjà programmées et la ministre de la Santé veut encore se convaincre du contraire !
- Nous sommes ici au cœur du dialogue social.
Pour les partisans du dialogue social nouveau (version crise économique), il ne s’agit aucunement de prendre en compte les demandes exprimées par les salariés mais de contenir cette dernière dans des formes et des limites qui sont décidées par l’autorité supérieure. Le MEDEF des hôpitaux (la FHF) qui approuve la rigueur gouvernementale, a dit : « Il faut supprimer des RTT ». Le directeur de l’AP-HP applique la consigne en voulant dialoguer. En fait, nous percevons ici toute la volonté des « dialoguistes » (directeurs) qui répondent au metteur en scène (Marisol Touraine) et au producteur (le Président de la République et l’Europe).
Ils veulent faire des Hôpitaux de Paris un exemple de réduction de moyens en s’attaquant aux conditions de travail des agents, à leurs RTT et autres règles statutaires. Tout ceci dans le cadre du dialogue social !
Le 21 mai, à l’appel de tous les syndicats, ils étaient plus de 56 % en grève à Paris, selon la direction.
C’est donc une énorme mobilisation pour un hôpital qui doit dans le même temps poursuivre l’accueil des patients 24 heures sur 24.
L’expression « dialogue social » est une illusion qui tente de faire oublier qu’il n’y a plus rien de positif à négocier pour les salariés.