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08 / 03 / 2018 | 6 vues
Philippe Grasset / Membre
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CPF au ministère des Finances : un groupe de travail déconnecté de l’actualité

Le CPF a pris effet dans la fonction publique le 1er janvier 2017. Un groupe de travail s’est réuni le 2 mars 2018, sous la présidence de la secrétaire générale adjointe, Mylène Orange-Louboutin, pour les étudier au sein des directions de Bercy.

À l’heure où celui-ci disparaît, son échec est patent avec seulement 1 784 agents dans les ministères économique et financier qui l’ont utilisé en 2016 (bilan social).

Ce groupe de travail a paru déconnecté de l’actualité. En même temps que les discussions s’engagent à Bercy pour mettre le CPF en place, la négociation interprofessionnelle entérinait la semaine dernière de nouvelles règles d’acquisition plus favorables aux salariés sur lesquelles, à peine l’encre séchée de la signature des organisations syndicales, la ministre du Travail a jeté le discrédit lundi 5 mars.

De fait, les débats lors de ce groupe de travail se sont engagés sans connaître les fondements actualisés du CPF. Exercice pour le moins délicat et assez surréaliste pour tout dire.

En ouverture des débats, la secrétaire générale adjointe de Bercy a affirmé que le CPF venait en complément de tout le dispositif de formation ministériel existant. Elle n'a pas caché que le CPF était un « dispositif complexe, confus qui nécessiterait une période transitoire et un temps d'adaptation dans sa mise en œuvre ».
 
Les annonces de Muriel Pénicaud troublent encore un peu plus la situation. De fait, tout le processus détaillé ci-après est d'ores et déjà mis à mal. Tel est le cas notamment de la comptabilisation en euros plutôt qu'en heures des règles d'acquisition du CPF.

Notre organisation s’oppose à la logique de l’individualisation des droits que sous-tend la mise en place de ces différents comptes. Il en a été ainsi dès la création du droit  individuel à la formation (DIF). Notre fédération plaide pour des droits collectifs statutaires dans le cadre du paritarisme.

Ce groupe de travail ayant eu lieu 3 jours avant les annonces de la ministre, les règles étudiées sont celles actuellement en vigueur dans la fonction publique. Elles risquent de rapidement devenir obsolètes.

Règles actuelles d’acquisition du CPF

Le CPF permet aux agents publics d’acquérir des droits à la formation au regard du temps de travail accompli, dans la limite de 150 heures. Le travail à temps partiel ne fait pas l’objet d’une proratisation des droits CPF, contrairement aux emplois à temps incomplet.
 
L’alimentation de ce compte s’effectue chaque année, à hauteur de 24 heures maximum par année de travail jusqu’à l’acquisition d’un crédit de 120 heures, puis de 12 heures maximum par année de travail, dans la limite d’un plafond total de 150 heures.
 
Pour les agents de la catégorie C n’ayant pas atteint un niveau de formation sanctionné par un diplôme supérieur au BEPC ou titre professionnel (CAP, BEP), l’alimentation du CPF se fait à hauteur de 48 heures maximum par an et le plafond est porté à 400 heures.
En cas d’une inaptitude à l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire peut bénéficier d’un crédit d’heures supplémentaires, dans la limite de 150 heures, en complément des droits acquis. L’agent doit produire un avis du médecin de prévention attestant que son état de santé l’expose, compte tenu de ses conditions de travail, à un risque d’inaptitude à l’exercice de ses fonctions.
 
Les droits acquis au titre du CPF sont transférés d’un employeur à l’autre (privé ou public).
Lorsque la durée de la formation est supérieure aux droits acquis au titre du CPF, l’agent peut, avec l’accord de son employeur, consommer par anticipation des droits non encore acquis. Cette possibilité est limitée : d’une part, aux droits que l’agent est susceptible d’acquérir au titre des deux prochaines années (ainsi qu’aux droits restant à acquérir sur la durée du contrat pour un agent en CDD) et, d’autre part, au plafond total de 150 heures.

Utilisation du CPF

D'ici juin 2018, l'administration doit ouvrir pour chaque agent du MEF son compte personnel de formation avec les droits acquis en 2017 et l'alimentera chaque année. Les agents pourront le consulter sur le site www.compteactivité.gouv.fr. À son initiative et avec l’accord de son administration, l'agent utilise les heures qu’il a acquises sur ce compte pour la préparation et la mise en œuvre d’un projet d’évolution professionnelle. Ce projet peut s’inscrire dans le cadre de la préparation d’une future mobilité, d’une promotion ou d’une reconversion professionnelle. L’agent est à l’initiative de l’utilisation de son CPF. Cette demande porte sur la nature, le calendrier et le financement de la formation souhaitée. Il peut bénéficier d’un accompagnement personnalisé pour l’aider à définir et à construire son projet d’évolution professionnelle.

Mise en œuvre dans les directions de Bercy 

Le CPF s’applique à tous les agents rémunérés sur un programme budgétaire ou appartenant à un corps relevant des MEF, sauf si une convention prévoit des dispositions contraires.
 
Il peut également s’appliquer :

  • à des agents issus d’autres administrations si des conventions de délégation de gestion le prévoient ;
  • aux établissements publics sous tutelle des ministères économique et financier, sous réserve qu’une délibération ait été prise en ce sens par les instances compétentes.

À partir du moment où le dispositif s'inscrit dans une enveloppe budgétaire contrainte, la circulaire de la DGAFP définit les priorités interministérielles à prendre en considération dans l’examen des demandes d’utilisation des droits au CPF.
 
De son côté, Bercy a égrené en plus ses propres priorités ministérielles.
 
Priorités interministérielles :

  • les formations qui relèvent du « socle de connaissances et de compétences professionnelles » défini par le décret n° 2015-172 du 13 février 2015 : leur bénéfice est de droit pour les agents qui en font la demande, le suivi de ces formations pouvant néanmoins être reporté à l’année suivante pour nécessité de service ;
  • les formations, accompagnements ou bilans de compétences permettant de prévenir une situation d’inaptitude à l’exercice des fonctions ;
  • les formations ou accompagnements à la validation des acquis de l’expérience (VAE) par un diplôme, un titre ou une certification figurant au répertoire national des formations professionnelles (RNCP).

Priorités ministérielles :

  • les demandes d’utilisation du CPF formulées par des agents concernés par des opérations de restructuration ;
  • les formations accompagnant des mobilités au sein de la fonction publique ;
  • les formations dispensées au titre de la promotion interne (préparation aux concours) ;
  • les formations dispensées en interne aux MEF.

Ces priorités ont fait l'objet de nombreux débats au cours de ce groupe de travail.
L'administration a convenu d'en revoir les termes ou d'en préciser la définition dans une circulaire ministérielle à venir.
 
Conditions et modalités de prise en charge des frais pédagogiques

 
Interrogée sur l'enveloppe budgétaire ouverte pour le CPF dans les ministères de Bercy, la secrétaire générale adjointe a convenu que dans cette phase de montée en charge du dispositif, aucun montant précis n'a été déterminé.
 
Un projet d’arrêté sera présenté à un prochain comité technique ministériel. Il précisera les conditions et modalités de prise en charge des frais pédagogiques au titre du CPF pour les agents relevant des périmètres des MEF.
 
Les frais pédagogiques qui se rattachent aux formations suivies au titre du CPF seraient pris en charge par l’administration dans la limite des plafonds cumulatifs suivants :

  • plafond horaire : 35 euros TTC ;
  • plafond par action de formation au titre du même projet d’évolution professionnelle : 1 500 euros TTC au titre d’une année civile pour un même agent.

L’agent devra présenter les justificatifs d’inscription et d’assiduité à la formation. En cas de constat d’absence de suivi de tout ou d'une partie de la formation sans motif valable, l’agent devra les rembourser.
 
Par dérogation à ces dispositions, la participation forfaitaire aux frais des préparations aux concours et examens professionnels délivrées par l’IGPDE demeure à la charge des agents concernés.

Les autres frais de toute nature (par exemple, frais de déplacement) demeurent à la charge des agents.

Par dérogation à cette disposition, les frais de déplacement engagés pour participer aux préparations aux concours et examens professionnels organisées par les MEF et pour le compte des MEF, peuvent être pris en charge par l’administration dans les conditions prévues par le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires du personnel civil de l'État et l’arrêté du 1er novembre 2006.
 
La question a été posée de savoir si un agent pourrait utiliser son CPF, sans demande de prise en charge financière par sa direction. À ce stade, la réponse est restée très évasive.
 
Dispositions relatives aux préparations aux concours et examens professionnels
 
Le CPF peut compléter les droits existants en matière d’actions de préparation aux concours et examens professionnels. Si l’agent est inscrit à une préparation :

  • il peut bénéficier de 5 jours maximum par année civile de décharge de service de droit. Au-delà, il peut utiliser son CPF pour suivre sa préparation, le cas échéant en combinaison avec le compte épargne temps ou demander à bénéficier du congé de formation professionnelle ;
  • en outre, il peut utiliser son CPF pour dégager du temps de préparation personnelle et combiner l’utilisation du CPF avec le compte épargne temps, dans une limite de 5 jours par année civile.

Dans l’hypothèse où les droits ouverts au titre du CPF ne seraient pas suffisants, il sera proposé à l’agent d’utiliser le mécanisme de consommation anticipée des droits CPF.

Si l’agent n’est pas inscrit à une préparation mais inscrit à un concours ou examen professionnel, l’agent peut utiliser son CPF pour dégager du temps de préparation personnelle. Il peut combiner l’utilisation du CPF avec le compte épargne temps, dans une limite de 5 jours par année civile. Il devra justifier de sa présence aux épreuves du concours ou examen professionnel.
 
Abrogation du DIF
 
Le droit individuel à la formation (DIF) a été abrogé par le décret du 6 mai 2017 créant le CPF.
 
Depuis le 1er janvier 2017, le DIF a été automatiquement transformé en CPF. Les agents ont conservé les heures acquises au titre du DIF et ils peuvent les utiliser via leur CPF. Le compte personnel de formation est un nouveau droit accordé aux agents, en complément du plan de formation, depuis de nombreuses années dans les directions de Bercy.

Pour autant, ce droit trouve très rapidement ses limites et ceux qui pensaient en disposer en toute liberté et pour un projet professionnel quelconque en seront pour leurs frais. Non seulement l'enveloppe budgétaire consacrée au CPF par le ministère en limitera automatiquement les potentiels bénéficiaires mais les priorités interministérielles et ministérielles mentionnées en restreindront de fait l'utilisation.
 
Tous les agents ne pourront donc pas mettre leur CPF en œuvre quand bon leur semblera.
En résumé, une vraie fausse liberté d'un droit individuel à la formation.

Avec les annonces gouvernementales de ce lundi, la complexité et la confusion sur la mise en œuvre du CPF, déjà relevées en début de séance, s'en trouvent démultipliées...

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