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16 / 05 / 2012 | 26 vues
Robert Fénart / Membre
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Contre conflits et risques psychosociaux : l'esprit de médiation

« Vivre ensemble, il n’y a rien de plus difficile ». Georges Potriquet qui s’exprime ici est médiateur et rappelle que « depuis Cro-Magon, ou Caïn et Abel si l’on préfère, le conflit se résout par la force, y compris la force exécutoire de la Justice ». Mais la Justice par manque de moyens essentiellement apparaît lente, distante, incompréhensible… Alors face à la montée des tensions et des atteintes aux personnes au sein des entreprises, la médiation offre un processus pour dénouer les premières et empêcher les secondes, rapidement, discrètement et sereinement ; le tout pour un coût inférieur à celui d’une procédure judiciaire.

Depuis la palabre avec son bâton et son temps de parole imparti, les choses ont évolué. Mais tiers indépendant, neutre, impartial et loyal, le médiateur organise toujours aujourd’hui le dialogue pour conduire les parties à résoudre elles-mêmes leur conflit. Et qu’on ne s’avise pas d’utiliser le terme d’« accord gagnant-gagnant ». Devant une assemblée d’une cinquantaine de délégués syndicaux et d’élus de comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) réunie par le cabinet Technologia, Georges Potriquet ne veut pas de cette expression qu’il qualifie de « gnangnan » et dont il dit que « c’est un leurre ou une utopie ».

  • Non, il préfère parler d’« équilibre gagnant-perdant pour l’un comme pour l’autre ; chacun acceptant une part de pertes et une part de gains ».

Processus lent et délicat de déminage

Opération à hauts risques, la médiation peut se pratiquer de différentes manières selon les cas. On peut chercher un compromis en creusant le moins possible, chercher à faire dire aux parties ce qui dans leurs relations s’est dégradé, chercher à transformer le regard porté sur l’autre, chercher à faire changer le récit que chacun fait du conflit, jusqu’à chercher à modifier tout le système de communication.

Mais quoi qu’il en soit, la médiation se doit toujours d’être un processus fondé sur l’information et le consentement des parties, la parole, l’écoute et l’égalité de traitement, la liberté de chacun à tout moment, la confidentialité des entretiens… Certes, le cadre juridique en France est encore à parfaire. Toutefois, des codes de déontologie sont élaborés, des formations se font jour (hélas encore assez inégales) et surtout, les accords de médiation peuvent donner lieu à une homologation par un juge, ce qui leur confère la force exécutoire et une garantie supplémentaire.

Rétablir un lien par la parole

Thucydide écrit dans La Guerre du Péloponnèse : « Lorsque les rois partent en guerre, ils finissent toujours par faire, après avoir beaucoup souffert, ce par quoi ils auraient dû commencer : négocier ».

À la différence de la Justice, chacun dans une médiation est acteur de la solution. La médiation finit par une négociation mais commence par explorer le conflit, ses raisons, les non-dits, les malentendus… « Au départ, les parties viennent avec des postures, des positionnements… Il faut arriver à une vraie parole », insiste Georges Potriquet

Et s’il y a une obligation pour le médiateur, c’est une obligation de moyens. À la fin, il se peut qu’il n’y ait pas d’accord ou un accord partiel. Mais « pas d’accord » explique encore Georges Potriquet, « ne veut pas forcément dire échec ». Souvent ce qui compte, c’est qu’« on s’est expliqué ».

Changement en mieux ?

Une question se pose néanmoins. Le dernier numéro de la revue de l’association nationale des médiateurs (ANM) souligne une phrase de l’anthropologue Etienne Le Roy : « la médiation doit devenir la voie privilégiée dans le règlement des différends pour un changement de société ». Par ailleurs, on peut lire au sujet de la formation et du professionnalisme nécessaires, que « Raymond Soubie, actuellement membre du Conseil économique et social, est (…) en faveur d’un « corps de médiateurs parfaitement crédibles », car l’inspecteur du travail manque d’impartialité. Il considère d’une manière générale que l’esprit de médiation est un levier de changement capital (…) ». Se pourrait-il que la médiation participe de ce vaste mouvement visant au développement des relations contractuelles entre salariés et employeurs au détriment du droit du travail ?
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