Violation du secret de la correspondance chez un éditeur de logiciel de santé au travail
Une société française, éditrice de logiciels dédiés aux services de la santé au travail et à la prévention des risques professionnels, réfute une dénonciation de harcèlement moral basée sur des faits concrets, par cinq de ses salariés et décide de les punir pour cet acte.
Cette entreprise, qui prône la protection des données envers ses clients, se rend complice de la violation du secret de la correspondance, en prenant connaissance d’une conversation privée et cryptée entre ces cinq employées. En effet celles-ci conversaient sur un groupe privé via WhatsApp qui leurs servait de défouloir, pour éviter d’exploser à leur poste, mais également de soutien pour supporter ce mal-être grandissant sur leur lieu de travail. La manager mise en cause dans cette alerte, connue pour avoir des comportements équivoques depuis des années, se serait procuré l’export de cette discussion sur un téléphone privé et l’aurait communiqué à la direction pour que celle-ci en prenne connaissance.
Accompagné de sa responsable des ressources humaines, le président de l'entreprise a décidé de convoquer les salariées appartenant à ce groupe par surprise, en leurs faisant subir un véritable interrogatoire sur cette conversation privée. Suite à cette enquête RH, comme l’appelle la direction de l’entreprise, les cinq collaboratrices ont été convoquées à un entretien préalable à sanction disciplinaire voire à licenciement pour l’une d’entre elles. Après avoir vécu un véritable calvaire depuis presque deux mois, les cinq employées, victimes d’un vol manifeste de données privées ayant gravement entaché leurs regards sur les valeurs de l’entreprise et la confiance envers leur direction, attendent avec impatience la remise de cette « enquête RH » au CSE.
Comment cette entreprise, qui doit être au cœur de la RGPD, en traitant des données sensibles médicales et confidentielles, peut-elle se rendre complice de la violation de cette règle au sein même de son entreprise ?
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Harcèlement Moral
Je pense que cette entreprise rencontre un problème avec cette manager qui semble exercer un harcèlement moral sur plusieurs salariées. Au lieu d'enquêter sur le comportement de cette manager, car rappelons que le harcèlement moral est un délit et d'entendre les salarié(e)s concerné(e)s afin d'évaluer l'étendue des dégats , elle déporte son attention sur ce qui peut apparaître comme un des symptômes du harcèlement vécu à savoir des échanges dans un cadre strictement privé pour évacuer le stresse ressenti.
Rappel important sur le harcèlement moral (source www.service-public.fr) :
Définition du harcèlement moral :
Le harcèlement moral se manifeste par des agissements répétés susceptibles d'entraîner, pour la personne qui les subit, une dégradation de ses conditions de travail pouvant aboutir à :
Si vous êtes victime de harcèlement moral, vous pouvez bénéficier de la protection de la loi, que vous soyez salarié, stagiaire ou apprenti.
Ces agissements sont interdits, même en l'absence de lien hiérarchique entre vous et l'auteur des faits.
Deux types de sanctions peuvent se cumuler : les sanctions prises par l'employeur et celles prises par la justice.
Sanction prises par l'employeur
Tout salarié ayant commis des agissements de harcèlement moral est passible de sanctions disciplinaires prises par l'employeur : mutation, mise à pied voire licenciement.
Sanctions prises par la justice
Le harcèlement moral est un délit puni d'une amende pouvant aller jusqu'à :
De plus, l'auteur de harcèlement moral peut être condamné à vous verser des dommages-intérêts (préjudice moral, frais médicaux...)
secret des correspondances
Les échanges via les messageries instantanées personnelles (MSN, Messenger, WhatsApp...) sont couverts par le secret des correspondances
Saisie d'un pourvoi par la société, la Cour de cassation valide le raisonnement des juges du fond considérant que « les messages électroniques litigieux, échangés au moyen d'une messagerie instantanée, provenaient d'une boîte à lettre électronique personnelle distincte de la messagerie professionnelle dont la salariée disposait pour les besoins de son activité, la cour d'appel en a exactement déduit qu'ils étaient couverts par le secret des correspondances ».La Haute juridiction réaffirme le principe de protection du secret des correspondances des salariés dans le cadre de l'utilisation de leur messagerie personnelle en prenant en compte l'évolution des technologies de communication.Une confirmation de la protection du secret des correspondances dans le cadre de l'utilisation d'une messagerie personnelleLa Cour de cassation confirme par cet arrêt que sont couverts par le secret des correspondances les messages échangés par les salariés depuis une messagerie personnelle.
Cette décision semble concilier le respect de la vie privée du salarié, et notamment le secret des correspondances avec les pouvoirs de l'employeur en matière de contrôle, décidant qu'il ne pouvait avoir un accès légitime aux messages litigieux.
sources : Les Cahiers Lamy du CSE, Nº 200, Février 2020
Procédé déloyal d'obtention des échanges entre salariés
Un salarié ne peut produire en justice des courriels échangés par des tiers, obtenus par un procédé déloyal
À l’appui de son pourvoi, la salariée a fait valoir que lorsque cela est strictement nécessaire à l’exercice de ses droits en justice, un salarié peut produire des documents dont il a eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, quand bien même il en résulterait une atteinte à un droit fondamental ou au secret des correspondances, pour autant que l’atteinte est proportionnée au but poursuivi.
En conséquence, ceux-ci devaient demeurer couverts par le secret des correspondances et protégés de toute violation par des tiers.
source : Le dossier jurisprudence hebdo, Nº 09/2020, Section Zoom, 14 janvier 2020