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17 / 12 / 2010 | 1016 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Les parcours alternatifs des ex de l’inspection du travail : DRH, consultant, avocat, politique...

Avec une connaissance des entreprises conjuguée à celle des rouages de l’administration, les inspecteurs du travail disposent de bonnes cartes pour passer dans le privé. Mais la mobilité externe du corps des inspecteurs est pourtant faible, malgré l’assurance de pouvoir retrouver son poste pendant cinq ans... Témoignages croisés de celles et ceux qui ont franchi le pas... il y a déjà longtemps.
 

Peut-être encore plus qu’hier, rares sont les inspecteurs du travail qui passent dans le privé. Avec quelques années d’expérience du terrain et un passage dans une direction départementale ou régionales, ils disposent pourtant de solides atouts pour franchir le pas. Les appels du pied de la part de direction, qui cherche à la fois des techniciens mais aussi des médiateurs, ne manquent pas de se présenter.
 

Mais une culbute salariale vaut-elle le coup au regard d’un stress engendré par une immersion dans les rouages managériaux de l’entreprise ? D’autant que certains ont l’impression d’avoir perdu en technicité avec l’évolution actuelle du métier. Même l’assurance de retrouver son poste pendant un délai de cinq ans, grâce au parachute de la mise en disponibilité, n’influe pas sur les parcours.

  • « La plupart des jeunes inspecteurs ne passent que ce concours. Ils choisissent avant tout une profession avec un engagement fort. Il ne s’agit pas simplement de devenir fonctionnaire », souligne un représentant du Ministère du Travail.
     

Mystère sur le nombre et l’évolution des mobilités vers le privé. Les parcours des agents font pourtant l’objet d’un suivi attentif. Ne serait-ce qu’au travers des commissions de déontologie auxquelles sont soumis tous les dossiers de mobilité vers le secteur privé. Objectif : s’éviter de malencontreux conflits d’intérêt. Notamment en interdisant à un inspecteur d’être embauché par une entreprise relevant de sa juridiction de compétence... Les dossiers sont analysés au cas par cas et les refus sont rares.
 

Et notre représentant anonyme du ministère de lancer : « le métier d’inspecteur, on le fait plus facilement à 25 qu’à 45 ans ». Or, les perspectives d’évolution au sein des directions départementales et régionales sont limitées. Dommage qu’un pourtant très médiatique Gérard Filoche, bientôt inspecteur du travail retraité mais engagé politique de longue date, n’ait pas souhaité revenir sur son parcours.

Bouge ton corps

Celles et ceux qui ont quitté l'administration se sont pour la plupart engagés pour faire bouger le corps. Une grande partie s’est en effet croisée au sein de l’association Villermé (créée en 1981 et dissoute en 2002) qui fédérait des inspecteurs en poste, plutôt proche de la CFDT. L’association visait à « contribuer à une meilleure effectivité du droit du travail, face à un immobilisme et un cloisonnement administratif étouffant ». Comment ? En favorisant « les échanges sur les pratiques professionnelles » et en développant « la réflexion et l’action collective ».

  • Les membres de l’association L 611-10, créée en 1997 avec les relais de la CGT et de Sud sont moins enclins à la mobilité. Une association partisane d’une ligne plus rigide que celle de Villermé où il s’agit « d’affirmer en toute circonstance la mission de contrôle ». Ex-présidente de cette association, Sylvie Catala, l’inspectrice du travail en charge de l’enquête sur les suicides à France Télécom, a remis en février 2010 au parquet de Paris un rapport argumenté sur le registre de la « mise en danger d’autrui du fait de la mise en œuvre d’organisations du travail de nature à porter des atteintes graves à la santé des travailleurs » et pour « méthodes de gestion caractérisant le harcèlement moral ». Un dossier sur lequel s’appuie la plainte au pénal portée par Sud.
     

« En France, l’approche est binaire. On est soit dedans, soit dehors » Début 2010, la FSU a appelé au boycott du stage « immersif » de 12 jours proposé par l’Institut de l’entreprise, le think-tank patronal présidé par Michel Pébereau (PDG de BNP Paribas), à une vingtaine d’inspecteurs du travail, inspecteurs des impôts et magistrats. Objectif : mieux comprendre les stratégies mises en œuvre par les entreprises, leurs processus de décision dans une économie mondialisée. L’occasion pour les inspecteurs d’échanger librement avec les directeurs fiscaux, les directeurs juridiques, les directeurs des relations sociales et d’autres représentants du top management des entreprises dans lesquelles il se retrouvent immergés.


« En France, l’approche est binaire. On est soit dedans, soit dehors », regrette Monique Maigret, DRH de Dalkia et ex inspectrice du travail qui s’est un temps impliquée dans l’animation de Mobil’IT, une association qui entendait favoriser les échanges de pratiques entre les ex de l’inspection du travail, partis dans le privé et ceux encore en poste dans l’administration. L’association a fonctionné pendant 5 ans pour finalement disparaître il y a plus de 10 ans car « elle virait au club des anciens combattants ».
 

Villermé et Mobil’IT sont deux associations qui entendaient décloisonner mais qui ont disparu sans qu’une nouvelle génération d’inspecteur ne reprenne le flambeau.
 

Ces ex de l'inspection du travail qui ont accepté notre appel à témoignage


Les RH :

  • Monique Maigret, DRH de Dalkia
  • Claire Palies, responsable des avantages sociaux et de la mobilité internationale chez Sanofi Aventis ;
  • Jean-Claude Guéry, directeur des affaires sociales de l’Association Française des Banques.


Les "indépendants" :

  • Claude-Emmanuel Triomphe, fondateur de l’association Astrees et du media en ligne Metis ;
  • Emmanuel Froissart, fondateur du cabinet Idée Consultants ;
  • Bernard Doerflinger, responsable du cabinet Essor Consultants ;
  • Thierry Billet, avocat en droit social et maire adjoint d’Annecy sous l’étiquette Europe Écologie.


Ces ex de l'inspection du travail qui ont décliné notre appel à témoignage


Celles et ceux qui sont passés aux RH dans des entreprises para-publiques :

  • Sabine Eyssette, conseillère sociale à la Banque de France ;
  • Dominique Legrand, DRH de l’Opéra de Paris.
  • « Le passage à la DRH d'une entreprise para-publique, au travers d'une mise en disponibilité, nous  pose un réel problème. Il y a conflit d'intérêts », estime Luc Beal-Rainaldy, le secrétaire du SNUTEF-FSU.
     

Les RH dans le secteur privé :

  • Michel Estimbre, directeur des relations sociales de Generalli ;
  • Jean-Christophe Sciberras, DRH de Rhodia et bientôt président de l’ANDRH ;
  • Jean-Michel Bernad, ancien avocat spécialisé dans le droit des entreprises et désormais conseiller social du directeur général du groupe Snef.
     

L’un est passé dans le privé pour revenir dans le public :

  • Jean Le Gac, ex-directeur des affaires sociales de Siemens, puis du groupe Korian, est ainsi revenu 11 ans après dans le giron, à la tête de la Dirrecte (ex direction départementale de l’emploi et de la formation professionnelle) de l’Essonne.
     

L’un est aussi passé dans l’ordre judiciaire comme :

  • Hervé Gosselin, conseiller à la chambre sociale de la Cour de Cassation.
     

Dommage qu’Anne Hidalgo, première adjointe au maire de Paris et que certains voient comme une potentielle Ministre du Travail, n’ait pas tenu à revenir sur son début de carrière comme inspectrice du travail, suivi d’un passage à la fonction RH de l’ex-Générale des Eaux. Surtout que Travail au bord de la crise de nerfs, son livre publié fin octobre, a sans doute été nourri de cette expérience du terrain.

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