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Réforme des retraites et interruptions de carrière
La réforme des retraites ne semble pas prendre en compte un des phénomènes les plus importants des économies européennes depuis plusieurs décennies, le chômage de masse et durable, pénalisant gravement une partie des actifs, qui devront aussi subir, lors de leur retraite, de très graves conséquences de leur exclusion professionnelle pendant leur vie active.
A l'ère des TIC (technologies de l'information et de la communication), les lois peuvent pourtant prendre en compte un plus grand nombre de cas particuliers et donc être plus justes à partir d'un noyau générique dans lequel réside les principes essentiels, qui enserrent aussi l'appréhension des cas particuliers. L'articulation des lois et règlements ne suffit pas à illustrer ce principe rénové. Les idées trop simples ou uniformisantes génèrent trop de variabilité imprévue. Leur temps est révolu.
- La contrepartie nécessaire à la sophistication des lois (et donc à leur robustesse accrue) est une plus grande transparence, un administré devant pouvoir accéder aux calculs qui ont par exemple permis de déterminer un niveau de cotisation ou de prestation.
Options de compensation de préjudice constitué par les carrières interrompues
La relation entre le niveau des pensions et les conditions d'activité pendant la vie active semble surannée, dès lors que l'activité professionnelle et la possibilité de cotiser ont été en quelque sorte une chance et que les parcours aléatoires se multiplient dans un monde hyperconcurrentiel. De toute façon, les salariés aux carrières continues cotisent toute leur vie professionnelle, mais pas pour le montant exact de leurs pensions, dont il est impossible d'établir l'équivalence avec les cotisations puisqu'on ne connaît pas leur durée de vie individuelle. Il s'agit par conséquent au sein de générations successives, d'accepter un rééquilibrage par rapport au choix collectif d'exclure une partie des actifs à différents moments de leur vie professionnelle et d'éviter une double peine. Des formes de rattrapage doivent donc être envisagées afin de compenser dans le cadre des retraites les injustices constituées par les interruptions forcées de carrière.
- Le montant de la pension de retraite est obtenu à partir de la formule suivante : SAM x Taux x (D1/D2)
SAM = salaire annuel moyen ; taux plein = 50 % du SAM ; D1 = durée d'assurance réelle dans le régime général ; D2 = durée d'assurance prise en compte dans le régime général (160 trimestres avant le 1er janvier 2009).
Proposition 1 - Indexation des pension sur la durée d'activité dans le dernier poste
Daniele Karniewicz, présidente de la CNAV, a proposé une forme d'indexation des pensions de retraite sur le dernier salaire.
- Plutôt qu'appliquer un pourcentage garanti uniforme sur le dernier salaire (si c'est bien la proposition de Mme D. Karniewicz), il devrait plutôt être calculé en fonction de la durée d'activité dans le dernier poste ou la dernière entreprise.
Un minimum devrait néanmoins être fixé uniformément, par exemple 20 %, mais le pourcentage augmenterait chaque année pour atteindre, par exemple, 25 % pour 5 ans, 30 % pour 10 ans etc. On retiendrait alors le pourcentage atteint pour le dernier salaire annuel (par exemple 30 % pour 10 ans d'activité). Il y aurait aussi un maximum, par exemple 30 %, qui le maintiendrait assez éloigné du taux plein du régime général (50 %).
Le principe serait équitable, le coût réduit et les situations paradoxales évitées si le montant résultant du pourcentage garanti ne pouvait dépasser le taux plein (50 %) appliqué au salaire annuel moyen (25 meilleures années), en tenant compte des inflexions éventuelles de la réforme à cet égard, pour l'ensemble des retraités de poste équivalent lors des années antérieures et en cours (pour les 3 ou 5 dernières années, par exemple).
Sur le plan strictement individuel, ce mode de calcul ne serait appliqué qu'au cas où le montant résultant du pourcentage garanti dépasse celui calculé sur les 25 meilleures années, mais à condition que le nombre de trimestres pris en compte dans le calcul soit inférieur à un certain nombre (par exemple, la moitié pour l'année de naissance considérée), puisque la durée de cotisation/assurance intervient aussi dans le calcul et pénalise aussi les carrières interrompues.
Proposition 2 : Mécanisme compensatoire
Cette proposition de calcul d'un niveau de pension établi en fonction d'un % du salaire selon le nombre d'années dans le dernier poste ou la dernière entreprise comporte toutefois une faille : pourquoi traiter différemment une situation de stabilité dans un poste ou une entreprise par rapport à des changements de situation entre différents emplois ou entreprises ? Le même principe et les mêmes modalités pourraient éventuellement s'appliquer, mais de brèves périodes d'inactivité impliqueraient des biais inéquitables.
- Cela suggère de s'attacher prioritairement à la notion de mécanisme compensatoire fondé sur un % de revenus d'activité antérieure, en inversant la corrélation positive entre durée de cotisation et niveau de prestation. La corrélation peut être inversée en faisant varier le % de façon dégressive selon le nombre de trimestres de cotisation/assurance (D1/D2 en fait). Afin que l'équité soit la plus complète possible, tous les retraités du régime général percevraient ce % compensatoire, qui s'ajouterait au résultat de la formule du régime général. Il serait toutefois nul si le bénéficiaire atteignait la totalité des trimestes de cotisation/assurance (160 avant le 1.01.09).
Notons que si l'on cherchait de surcroît à faire varier l'assiette de revenus à laquelle s'applique le % compensatoire en fonction de tranches périodiques d'activité, comme dans la proposition 1, on se rapprocherait alors de la proposition 3 et de la variation de la durée de référence du SAM puisqu'on ne prend plus pour référence le dernier poste ou la dernière entreprise.
- D'ailleurs, les dernières années pourrait être défavorables par rapport aux meilleures années prises actuellement comme référence pour le SAM. Alternativement, le % compensatoire devrait donc s'appliquer au dernier salaire comme le propose Mme Daniele Karniewicz...mais à condition qu'il figure parmi ceux de la durée de référence du SAM.
Dans la mesure où le montant résultant du % compensatoire s'ajouterait à celui de la formule du régime général, le % compensatoire serait alors beaucoup plus faible que ceux évoqués comme exemples dans la proposirtion 1 et il y aurait aussi un nombre minimum de trimestres de cotisation correspondant au % compensatoire maximum.
Des conditions semblables à celles de la la propostion 1 viseraient alors à s'assurer que le montant résultant de la somme du résultat du % compensatoire et de celui de la formule du régime général ne puisse pas être supérieur au montant obtenu par un bénéficiare dont le % compensatoire serait nul parmi l'ensemble des retraités de poste équivalent lors des années antérieures et en cours (pour les 3 ou 5 dernières années par exemple).
Proposition 3 - Moduler la durée de référence
Une autre option consisterait à moduler la durée de référence pour le calcul du SAM (25 meilleures années actuellement) selon le nombre de trimestres de cotisation/assurance effectués puisque dans l'équation du calcul des pensions de retraite, le ratio entre le nombre de trimestres de cotisation et celui requis pour l'obtention de la retraite à taux plein (160 avant le 1er janvier 2009) garantit déjà la disparité du niveau des pensions. La variation de la correspondance entre durée de référence et nombre de trimestres de cotisation effectués comporterait des seuils afin que la durée plus longue en emploi ne soit pas paradoxalement pénalisée.
- Ainsi, on pourrait par exemple prendre les 20 meilleures années pour 120 trimestres de cotisation, les 15 meilleures pour 80 trimestres, la durée des 15 meilleures années correspondant alors à la borne inférieure.
D'autre part, l'administration s'assurerait bien que les périodes d'inactivité correspondent à des périodes de chômage et il n'y aurait pas de prime à l'inactivité dans la mesure où la retraite à taux plein et le déclenchement du calcul ainsi décrit ne pourraient intervenir qu'à partir de 67 ans, âge requis pour bénéficier du taux plein en cas de trimestres de cotisation manquants.
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Vers la justesse
@ Rodolphe Herlerlé
C'est exactement cette notion d'"usine à gaz" qui me semble devoir être remise en question par les progrès dans le domaine des SI et notamment l'extension des capacités de calcul. Le secteur financier témoigne d'ailleurs du développement d'usines à gaz proliférantes. Certes, elles peuvent provoquer d'énormes dégâts ("trading à haute fréquence"...) mais on en construira de plus en plus.
D'autre part, le régime actuel comprend de toute façon déjà des cas spécifiques, par exemple le calcul pour ceux ne totalisant pas le nombre de trimestres requis à 65 ans. Et surtout, la structure de calcul des impôts illustre déjà un tel principe de complexité légitime.
Vous avez par ailleurs tout à fait raison quant à l'enjeu de l'acceptabilité sociale. Mais l'évaluation de la pénibilité relève aussi d'un choux collectif, les rachats d'année d'études qui devraient être maintenant remboursés aussi...et même le recul de l'âge légal :). En fait, je suggère aussi de dépasser les rapports de force et les mouvements de balancier pour essayer de définir des principes justes plutôt qu'idéologiques.