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11 / 10 / 2024 | 60 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Salariés aidants : quelles réponses ?

Jean-Manuel Kupiec, conseiller de la Direction générale de l'OCIRP et Directeur du LAB OCIRP Autonomie, a bien voulu répondre à mes questions suite à la publication des résultats  de l'Observatoire OCIRP sur ce dossier d'importance.

 

 

L'OCIRP* a révélé le 3 octobre 2024 les résultats de son Observatoire annuel Salariés aidants, réalisé avec l'institut VIAVOICE. Cette étude interroge non seulement les salariés (proches aidants** ou non), mais aussi les DRH, les managers et les organisations syndicales et patronales. En 2024, l'enquête de l'OCIRP s'est concentrée sur les réponses qui peuvent être apportées aux proches aidants par les entreprises, les branches professionnelles et les partenaires sociaux.

 

Quels sont les résultats marquants de l'étude 2024 s'agissant des salariés aidants ?

 

Tout d'abord, les aidants en activité professionnelle sont de plus en plus jeunes. Leur âge moyen mesuré par l'Observatoire est de 42 ans et l'âge de la première entrée dans l'aidance est en moyenne de 33 ans. On comprend qu'être aidant, cela ne concerne pas que les salariés seniors ou la "génération sandwich". Les jeunes aidants, ceux qui ont moins de 30 ans, sont particulièrement affectés : 42% d'entre eux pensent que leur situation les empêche de profiter de leur jeunesse et 40% estiment qu'être aidant les met en difficulté au niveau professionnel (+10 points par rapport aux salariés aidants en général).

 

Ensuite, la situation de proche aidant est à l'origine d'une charge mentale importante pour 56% des personnes concernées. Celles et ceux qui sont seuls à aider sont particulièrement victimes de cette charge mentale (+14 points).

 

Enfin, seulement 29% des salariés aidants informent leur employeur de leur situation (ils étaient 25% en 2023). D'où la difficulté d'identifier les proches aidants dans l'entreprise. On peut penser que la mise en place de dispositifs de soutien pourrait encourager les aidants à se faire connaître.

 

Quelles réponses pour les aidants l'Observatoire de l'OCIRP permet-il d’identifier ?

 

L'étude montre que les salariés aidants ont besoin de moyens financiers, d'aménagements dans l’organisation de leur travail pour dégager du temps et du répit, de services et d’information.

 

Plusieurs solutions font consensus (plus de 66% de réponses favorables) entre salariés, entreprises et partenaires sociaux : les aménagements d’horaires, la réduction temporaire de la charge de travail, l’agencement de solutions (aides, services, répit …) et le care management, la labellisation des entreprises, la prévoyance. L'information et l'orientation personnalisée sur les aides et solutions disponibles localement sont approuvées par 79% des salariés aidants, 90% des DRH et managers et 93% des partenaires sociaux.

 

La formation est également une voie intéressante. 85% des managers et 71% des DRH interrogés sont prêts à se former sur le sujet des salariés aidants.

 

Autre point de consensus dans les entreprises, 80% des managers et des DRH considèrent que le sujet des aidants doit être inscrit dans les critères de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

 

Quant au télétravail, 56% des partenaires sociaux interrogés considèrent qu'il constitue une réponse importante mais pas suffisante.

 

Quelle est la vision des partenaires sociaux sur les salariés aidants ?

 

Les organisations syndicales comme les organisations patronales considèrent à plus de 90% que la négociation collective sur les salariés aidants est une solution efficace. 94% estiment que la protection sociale a un rôle important à jouer dans ce domaine.

 

Toutefois, l’Observatoire des salariés proches aidants 2024 révèle de fortes disparités de regards entre les organisations patronales et syndicales.

 

 Sur les solutions : les congés rémunérés sont une solution efficace pour 53 % des organisations syndicales mais pour seulement 26 % des organisations patronales. L’accès à des services professionnels est considéré comme une priorité pour 51 % des OP mais pour seulement 28 % des OS.

 

S’agissant du contenu des accords collectifs : l’aménagement de l’organisation et des horaires de travail doit avoir la priorité dans les accords collectifs pour 43 % des OP mais seulement 35% des OS. Les congés rémunérés et les solutions de répit doivent être au cœur des accords collectifs pour 48 % des OS mais pour seulement 23 % des OP.

 

Quant à l’aménagement temporaire de la charge de travail, elle est considérée comme une solution facile à mettre en place pour 55 % des OS mais seulement par 34 % des OP.

 

Aux yeux des partenaires sociaux, les principaux obstacles à la négociation sont le manque de volonté , la reconnaissance insuffisante de l'importance du sujet, le manque de moyens financiers et de temps, ainsi que la diversité des situations des aidants qui rend difficile la généralisation des solutions. Les partenaires sociaux expriment aussi le besoin d’un cadre juridique plus structuré et de solutions concrètes faciles à mettre en place.

 

* ​ OCIRP : Union d'institutions de prévoyance à but non lucratif et à gouvernance paritaire, régie par le Code de la Sécurité sociale. L'OCIRP est, avec ses membres, aux côtés de celles et ceux qui doivent relever les défis de la vie autonomie : orphelinage, veuvage, deuil, handicap, aidance, isolement, grand âge.

OCIRP.FR

 

** Salarié.e proches aidant.e :personne qui exerce une activité salariée et qui « vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne d’une personne en perte d’autonomie, du fait de l’âge, de la maladie ou d’un handicap. » (Article 51 de la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement.)

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Méthodologie de l'enquête OCIRP /VIAVOICE 2024

L’ÉDITION 2024 DE L’OBSERVATOIRE DES SALARIÉS PROCHES AIDANTS S’EST TENUE DU 31 MAI AU 19 JUIN 2024 ET DU 3 JUIN AU 2 JUILLET 2024. LES INTERVIEWS ONT ÉTÉ EFFECTUÉES EN LIGNE AUPRÈS DES ÉCHANTILLONS SUIVANTS :

>UN ÉCHANTILLON DE 3384 SALARIÉS DU SECTEUR PRIVÉ, REPRÉSENTATIF DE LA POPULATION DES SALARIÉS DU SECTEUR PRIVÉ FRANÇAIS. ONT ÉTÉ EXTRAITS DE CET ÉCHANTILLON 1 001 SALARIÉS EN SITUATION « D’AIDANCE ».

>UN ÉCHANTILLON DE 1804 AGENTS DU SECTEUR PUBLIC (FONCTIONNAIRES ET CONTRACTUELS), REPRÉSENTATIF DE LA POPULATION DES AGENTS PUBLICS FRANÇAIS. ONT ÉTÉ EXTRAITS DE CET ÉCHANTILLON 617 SALARIÉS EN SITUATION « D’AIDANCE ».

>UN ÉCHANTILLON DE 200 ACTIFS TRAVAILLANT AU SEIN DE DIRECTIONS DES RESSOURCES HUMAINES DU SECTEUR PRIVÉ, EN CHARGE DES ENJEUX LIÉS AUX SALARIÉS AIDANTS DANS LEUR ENTREPRISE

>UN ÉCHANTILLON REPRÉSENTATIF DE 200 MANAGERS DU SECTEUR PRIVÉ

>UN ÉCHANTILLON DE 75 REPRÉSENTANTS DES PARTENAIRES SOCIAUX
(35 REPRÉSENTANTS D’ORGANISATIONS PATRONALES ET 40 REPRÉSENTANTS D’ORGANISATIONS DE SALARIÉS).

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Salariés proches aidants : des « travailleurs de l’ombre » à mettre en lumière

 

A l’approche de la Journée nationale des aidants (6 octobre 2024), FO rappelle qu’en France, 8 à 11 millions de personnes viennent en aide, à titre non professionnel, à un proche âgé en perte d’autonomie, en situation de handicap, ou atteint d’une maladie grave. Parmi eux, 6 sur 10 ont une activité professionnelle et l’on estime qu’en 2030, avec le vieillissement de la population, un actif sur quatre sera proche aidant.

 

Le type d’aide apportée et le temps consacré sont très variables d’une personne à l’autre. Mais en dépit de cette diversité, les proches aidants se trouvent souvent confrontés à de nombreux écueils : difficultés à concilier activité personnelle et professionnelle (« double journée »), risque accru d’isolement social et de « burn out », parcours du combattant pour effectuer les démarches…

 

Différentes dispositions existent désormais au profit des proches aidants (congé de proche aidant, plateforme de services…) et un nombre croissant d’accords collectifs traitent du sujet. Mais en pratique, le sujet reste encore tabou dans de nombreuses entreprises et les proches aidants sont parfois contraints d’arrêter leur activité professionnelle, faute de solution pour leur proche.

 

FO se satisfait, qu’à compter du 1er janvier 2025, le droit à l’allocation journalière de proche aidant puisse être renouvelé quand le proche aidant apporte son aide à un autre proche.

 

Pour autant, FO rappelle :

  • que le congé de proche aidant doit être mieux indemnisé ;
  • qu’il est urgent de développer et de rendre effectif le droit au répit pour les aidants ;
  • qu’il est important de développer des aménagements du temps de travail pour soulager les aidants et ainsi éviter le risque de désinsertion professionnelle ;
  • qu’il est essentiel d’assurer un meilleur repérage et suivi de la santé des proches aidants.
  •  

Enfin, notre organisation syndicale rappelle que, venir en aide aux proches aidants passe nécessairement par une politique en faveur de l’autonomie qui soit à la hauteur des enjeux (branche Autonomie sous-financée), par un réel accès aux soins et par l’embauche massive d’aidants professionnels.