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05 / 12 / 2024 | 187 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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En direct avec Plein Sens

[Quels élus pour demain ?] Pour en finir avec l'invisibilisation des compétences acquises dans le cadre des mandats

Avec qui un élu est-il en capacité d'exprimer les compétences acquises dans le cadre de son mandat : son manager direct, la DRH, son syndicat ? Dans quel cadre ? Retrouvez la synthèse du deuxième direct du cycle “Quels élus pour demain ?” porté le 14 novembre par Plein Sens.
 


Toutes les occasions sont bonnes pour qu'un représentant des salariés parle des actions conduites dans le cadre de son mandat avec son responsable hiérarchique. Pas pour "rendre compte" et encore moins se faire évaluer mais pour sortir de la "boite noire" dans laquelle l'expérience développée au cours des mandats reste trop souvent confinée.
 

Briser la glace


"Les mandatés parlent trop peu de ce qu'ils font au quotidien avec l'encadrement de proximité qui n'est dès lors pas en capacité de saisir le sens de leur action. Les former sur les conditions d'exercice du dialogue social est une chose. Cela peut par exemple leur permettre de comprendre ne serait ce que la différence entre un mandat d'élu en CSE et celui de délégué syndical. Mais ça ne suffit pas. Il faut créer les conditions pour que les représentants des salariés s'expriment avec leur manager", souligne Olivier Mériaux, Directeur des études et des synthèses chez Plein Sens qui a eu l'occasion de mettre en place des ateliers du dialogue social en 2021 dans un groupe industriel multi site à l'occasion du passage en CSE. Pour l'occasion, site par site, tous les managers qui avaient au moins un élu dans leur équipe ont participé à une journée d'échange avec l'ensemble des porteurs de mandats. De quoi briser la glace pour sortir des visions stéréotypées, d'un côté comme de l'autre, pour permettre de donner plus de sens aux entretiens de mi et de fin de mandats.


Rien n'interdit à un élu de dire ce qu'il fait à son manager dans le cadre de son mandat lors de l'entretien d'évaluation. Celui-ci lui répondra, à juste titre qu'il n'a pas le droit d'évaluer la tenue de son mandat, mais mettre l'activité opérationnelle dans son contexte ne peut en revanche pas nuire. Selon Vincent Thiennot, assistant confédéral FO et ancien coordinateur syndical chez Carrefour Market , "il faut sortir du non-dit avec le management sur le sujet en objectivant au maximum son action syndicale".
 

Coordinatrice CFDT chez Atos Eviden, Alia Iassamen n'est plus une syndicaliste à temps plein comme elle a pu l'être un temps. "J'ai souhaité reprendre un poste opérationnel et cela n'a pas été évident à obtenir. J'ai fait valoir mon expérience de négociatrice pour devenir responsable de suivi grand compte. Les similitudes sont nombreuses entre la négociation d'un accord et le suivi d'un contrat", explique celle qui échange régulièrement avec son hiérarchique sur son mandat de coordinatrice.
 

Désinstitutionnaliser les mandats


"Il est plus facile pour une DRH de gérer des mandats à temps plein que de chercher à développer leur employabilité opérationnelle", confirme Didier Vesiez, ancien directeur des relations sociales d'EDF et désormais intervenant à l'école de droit social de Montpellier.  En 2017, il a porté un accord pour sortir de l'institutionnalisation des mandats. 600 représentants des salariés "détachés" à plus de 50 % ont ainsi pu passer des entretiens de mandats croisant les évaluations des RH, des managers et des syndicats sur la base d’une grille d'évaluation des compétences spécifique , avec un plein accès au plan de formation.  "En 2020, nous avons renforcé le volet compétences car il ne s'agit pas de se limiter à mettre sur la table les évolutions salariales", précise l'ancien directeur des relations sociales. Et Olivier Mériaux de rebondir : "les responsables syndicaux ont aussi une responsabilité managériale pour assurer la montée en compétence des mandatés de leur équipe".


Chez Thales, une négociation commence pour mieux reconnaître l'expérience des mandats dans un contexte global de recensement des compétences en phase avec la nouvelle classification des emplois. Un séminaire à été organisé entre les porteurs de mandats et une trentaine de représentants des RH, mais sans mettre dans la boucle la ligne managériales. Pour Grégory Lewandoski, représentant de la Coordination CGT : "Il va falloir lever des clichés. Oui, un porteur de mandat CGT peut parfaitement occuper un poste managérial et nous pouvons parfaitement admettre qu'une ancienne élue CFE-CGC prennent la direction d'un établissement ou nous sommes majoritaires comme cela est arrivé. On lui promettait l'enfer, cela s'est très bien passé." Comme quoi…