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Philosophiquement, sociologiquement, politiquement et économiquement, que signifie « la vocation citoyenne » d’une entreprise ?
La CNP vient de formuler sa raison d’être : « Assureurs et investisseurs responsables animés par la vocation citoyenne de notre groupe, nous agissons avec nos partenaires pour une société inclusive et durable, en apportant au plus grand nombre des solutions qui protègent et facilitent tous les parcours de vie ». Excusez du peu...
Sans douter de la sincérité de ceux qui ont imaginé et qui portent cette « proclamation », je doute néanmoins qu’ils aient mesuré la portée de l’engagement qu’ils font prendre à leur entreprise. Ce doute commence avec les mots.
Philosophiquement, sociologiquement, politiquement et économiquement, que signifie « la vocation citoyenne » d’une entreprise ? L’idée d’entreprise citoyenne n’est-elle pas un oxymore ? Jusqu’à ce jour, l'éminent qualificatif de « citoyen » est réservé aux individus membres de la cité.
Quel niveau d’exigence pose l’affirmation de la vocation d’entreprise citoyenne ? Le respect des lois (c’est bien le moins) ? La volonté de faire vivre la citoyenneté ? L’engagement à promouvoir les droits de l’homme et du citoyen ?
- Assureurs et investisseurs « responsables » : responsables de quoi ? Retour à la question précédente.
- Agir pour une société inclusive ? C’est-à-dire ? Aujourd’hui, cette expression fait débat chez les sociologues et les politiques ? Sur quelle définition s’appuie donc cet assureur pour guider son action ? Là encore, on proclame en utilisant une expression au sens a priori très fort. Mais quel sens ?
- Agir pour une société durable : là, nous sommes en terrain connu. Les gestionnaires d’actifs et agences de notations diverses ont « camembertisé » la vertu verte depuis longtemps.
- Apporter au plus grand nombre : OK pour l’idée consistant à dire que plus l’entreprise a de clients, plus elle fait son boulot. Une autre formulation plus exigeante aurait été d’apporter « au plus grand nombre et singulièrement à ceux qui en ont le plus besoin ».
Arrêtons-nous ici pour ne pas laisser croire à une rancœur contre la CNP, ce qui n’est pas le cas. Je respecte profondément cette entreprise et le projet sociétal dont elle est partie prenante aux côtés de la Poste et de la CDC. J’en veux à toute cette « bien pensance » qui, croyant « mieux faire », récupère des concepts au cœur des questionnements de nos sociétés actuelles pour en faire des vitrines marketing, managériales. Mais attendons de voir à l’épreuve : plus de faits mais des mots !