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Politique immobilière d'Orange : la CFE-CGC demande un rattachement à la DRH
Plusieurs dizaines de projets immobiliers sont en cours au sein du groupe Orange. Pilotés par des logiques financières et contre-productives en matière d’efficacité stratégique à moyen terme, ils sont également pénalisants pour le bien-être du personnel.
Dans une lettre adressée au président du groupe, la CFE-CGC Orange présente sa vision d'une politique immobilière adaptée aux enjeux stratégiques du groupe Orange, analyse les projets en cours, formule des revendications précises pour les améliorer et demande que la direction de l'immobilier du groupe soit rattachée à la DRH.
Normes AFNOR ignorées, entraînant une baisse drastique de la surface disponible par personne pour les bureaux, explosion du « flex desk », éparpillement des savoir-faire technologiques et filiales géographiquement isolées, désertification des régions au profit de la déjà trop dense région parisienne etc., au fil de l’installation dans les nouveaux bâtiments, nous constatons de nombreux effets négatifs induits, comme la désertion des locaux par les équipes qui seraient pourtant censées y trouver un meilleur confort de travail, favorisant leur engagement et leur coopération.
La direction pourrait également se préoccuper des conditions de vie dans les quartiers d’implantation des nouveaux locaux. En tant que contributeur au financement du logement social (Action Logement), l’entreprise peut demander la création de logements à coûts modérés pour le personnel souhaitant s’installer plus près du lieu de travail et s’assurer que les « nouveaux quartiers » dans lesquels elle s’installe sont bien pourvus en commerces et services de proximité, ou encore négocier l’amélioration des dessertes par les transports publics ou la création de navettes.
Le premier investissement d’Orange, son « actif » le plus précieux, c'est le personnel, ses compétences et son engagement professionnel. Les bureaux qui accueillent le personnel doivent donc permettre de travailler plus efficacement. Pour la CFE-CGC Orange, tout projet immobilier devrait donc prendre en compte :
- une localisation géographique réduisant les temps de déplacement du personnel ;
- dans les grandes métropoles, répartir les campus aux différents points cardinaux ;
- à l’échelle nationale, s’installer harmonieusement dans tout le territoire, en favorisant le développement de l’emploi en province ;
- une bonne desserte en transports (publics, automobile, deux roues) et un véritable plan de déplacement d'entreprise négocié avec les opérateurs de transports publics pour l’optimiser ;
- l’intégration de nos campus dans la vie urbaine (crèches, commerces et services de proximité) en cohérence avec les politiques de la ville et une action concertée avec les autorités locales et Action Logement pour permettre l’accès à des logements à proximité des sites choisis ;
- des aménagements intérieurs favorisant l’épanouissement professionnel, adaptés aux activités pratiquées, avec un nombre suffisant de m² et de positions de travail pour permettre de se concentrer comme de travailler en équipe ;
- une logique d’implantation donnant du sens aux équipes travaillant sur les mêmes sujets ou la même chaîne de valeur ;
- l’organisation de sites géographiques spécialisés et d'opportunités, tant pour la création d’innovation que pour le personnel lequel pourrait exercer ses compétences dans des campus à haute valeur ajoutée.
La politique immobilière doit être au service des échanges. La CFE-CGC Orange a fait des propositions en ce sens.
Une politique immobilière au service des territoires ?
En tant qu’opérateur national participant à l’aménagement du territoire, Orange ne peut se cantonner en Île-de-France (qui rassemble déjà près de 40 % des emplois du groupe en France), au détriment d’un maillage territorial équilibré. Malheureusement, la cartographie des grands projets immobiliers reflète en grande partie la réalité des implantations d’Orange. Fermetures de boutiques et regroupements de sites accentuent la désertification des zones les moins peuplées, diminuant encore leur attractivité et les éloignant toujours plus des centres de décisions. Elle a aussi pour corollaire la mise à mal de l’équilibre vie privée-vie professionnelle du personnel.
Une politique immobilière au service de la finance ?
La norme IFRS 16 vient de remplacer l’IFRS 15. Les CAPEX (investissements) y sont remplacés par les e-CAPEX. La vente d’un immeuble y est considérée comme un désinvestissement qui vient en déduction des e-CAPEX. Jusqu’à présent, c’était uniquement une plus-value exceptionnelle. Alors qu’Orange fait face à des déploiements de réseaux sans précédent (fibre, couverture 4G dans le cadre du « new deal » et bientôt la 5G), les marchés financiers considèrent que notre niveau d’investissement est trop élevé. Le changement de norme tombe donc à point nommé pour encourager la vente des derniers immeubles en possession du groupe. La direction de l’immobilier du groupe, actuellement rattachée au secrétariat général, a pour mission de contribuer directement aux performances financières du groupe, ce qui explique son empressement à vendre le patrimoine immobilier pour installer le personnel dans des locaux loués.
Ou une politique immobilière au service du bien-être du personnel et facteur de productivité ?
Le traitement croisé des questions sociales avec les enjeux des nouvelles organisations et la question immobilière est par définition un territoire légitime pour la DRH. La dimension immobilière, jusqu’à présent classiquement considérée comme une gestion d’actifs et d’optimisation de coûts opérationnels, devient une fonction stratégique de la création de valeur, à l’instar du rôle que joue l’organisation d’une usine dans le secteur secondaire.
Alors que les organisations du travail sont régulièrement bouleversées (nécessitant l’adaptation des locaux) et que de bonnes conditions de vie au travail sont un élément clef d’attractivité et de fidélisation du personnel (les jeunes notamment), il paraît plus pertinent de rattacher la direction de l’immobilier du groupe (DIG) à la DRH, afin que les enjeux humains priment sur les économies de court terme. C’est la demande que la CFE-CGC Orange a adressée au PDG d’Orange.