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Les mystères de la portabilité / Saison 6 : une couverture santé à géométrie variable
Alors que conscients des difficultés qui l'entourent, les partenaires sociaux ont repoussé à début juillet, l'entrée en vigueur de l’article 14 de l’Accord National Interprofessionnel (ANI) instituant la portabilité des couvertures complémentaires santé et prévoyance, nous continuons notre voyage exploratoire à travers les nombreuses zones d’ombre de cette disposition, qui menacent sérieusement son application effective.
Selon l’article 14 de l’ANI, « les intéressés garderont le bénéfice des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans leur ancienne entreprise ».
Si la première partie de la phrase ne soulève à notre sens aucune difficulté interprétative, on ne peut malheureusement pas en dire autant de la seconde. Quelles garanties sont visées par le texte ?
- S’agit-il des garanties de couverture en vigueur au moment du départ du salarié de l’entreprise – ce qui aurait au moins le mérite de la visibilité pour ce dernier – ou faut-il tenir compte des évolutions susceptibles d’intervenir après son départ de l’entreprise (suppression pure et simple de la couverture, modification de l’étendue de la couverture, changement d’assureur...) ?
La réponse à cette question pourrait se déduire de la jurisprudence la plus récente rendue sur le fondement des dispositions de la loi Evin du 31 décembre 1989 - dont l’article 4 prévoit « le maintien de la couverture santé au profit des anciens salariés bénéficiaires d’une rente d’incapacité ou d’invalidité, d’une pension de retraite ou, s’ils sont privés d’emploi, d’un revenu de remplacement, sans condition de durée, sous réserve que les intéressés en fassent la demande dans les six mois qui suivent la rupture de leur contrat de travail ».
- Dans un arrêt de cassation (Cass. soc. 7 février 2008, n°06-12.006) et un arrêt d’appel (CA Lyon, 13 janvier 2009, 1ère chambre civile, RG n°08/02875), c’est en effet un maintien à l’identique de la couverture dont bénéficiait le salarié à la date de la rupture de son contrat de travail qui a été privilégié. En sera-t-il de même s’agissant de l’obligation de maintien des couvertures santé et prévoyance issue de l’ANI ?
Si tel est effectivement le souhait des partenaires sociaux, restera à éclaircir les points suivants : Comment ce maintien à l’identique pourra-t-il être garanti en cas de changement d’assureur par l’employeur ? Et en cas de modification ou d’abandon pur et simple par la compagnie d’assurance du contrat dont bénéficiait le salarié au moment de son départ ?
La liste des questions soulevées par l’introduction de la portabilité des droits de santé et de prévoyance dans le paysage législatif est décidément interminable...
A suivre... Saison 7 : Tirer la couverture à soi ?
- Protection sociale parrainé par MNH