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28 / 04 / 2009 | 12 vues
Nicolas Sauvage / Membre
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Les mystères de la portabilité / Saison 2 : La rupture originelle

Résumé de l’épisode précédent : Plus que quelques jours avant l’entrée en vigueur – prévue pour le 1er mai 2009 – de l’article 14 de l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 instituant, en cas de rupture du contrat de travail, la portabilité des couvertures complémentaires santé et prévoyance souscrites par l’entreprise.

Et pourtant, les nombreuses zones d’ombre entourant cette mesure menacent sérieusement son application effective. 

1er sujet d’incertitude : la rupture conditionnant l’application de la portabilité

Dans quels cas de rupture du contrat de travail le salarié se verra-t-il garantir par son ancien employeur le maintien de ses couvertures complémentaires santé et prévoyance ?

L’article 14 de l’ANI organise « le maintien de l’accès à certains droits liés au contrat de travail, en cas de rupture de celui-ci ouvrant droit à prise en charge par le régime d’assurance chômage ».

Le texte n’envisage pas l’hypothèse de la requalification du licenciement pour faute lourde par la juridiction prud’homale. La portabilité des couvertures complémentaires santé et prévoyance concerne donc, à première vue, toutes les ruptures permettant au salarié de bénéficier d’une prise en charge par le Pôle Emploi : licenciement, rupture conventionnelle, démission légitime, fin de période d’essai, fin de CDD... 

Voilà qui soulève les interrogations suivantes :

  • Le texte exclut expressément l’application de la portabilité de la couverture en cas de faute lourde. Cependant, il n’envisage pas l’hypothèse de la requalification du licenciement pour faute lourde par la juridiction prud’homale. Or, compte tenu de la lenteur des procédures judiciaires, le salarié concerné aura vraisemblablement cessé d’être indemnisé au titre de l’assurance chômage lorsque son licenciement aura été définitivement requalifié.

Il ne pourra donc plus bénéficier du maintien des couvertures complémentaires santé et prévoyance qui aurait dû lui être garanti par son ancien employeur en l’absence de faute lourde. Celui-ci devrait donc, selon toute logique, être condamné à lui verser des dommages-intérêts en réparation de son préjudice (incluant notamment le remboursement des cotisations versées par le salarié à une autre mutuelle et/ou des frais de santé directement pris en charge par le salarié en l’absence de mutuelle, certaines pathologies pouvant coûter jusqu’à 20.000 € par mois).

N’ayant pas évoqué cette hypothèse, les partenaires sociaux sont donc vivement appelés à préciser ce point.

  • En cas de rupture du contrat de travail résultant de la fin de la période d’essai ou du CDD, on peut se demander si les partenaires sociaux ont bien pris la mesure des incidences financières de la portabilité sur l’employeur comme sur le salarié.

En effet, garantir le maintien de la couverture complémentaire souscrite par l’entreprise aux salariés n’ayant fait qu’un bref passage dans l’entreprise revient à mettre à la charge de l’entreprise comme du salarié un coût disproportionné.

Si un financement par définition réduit doit servir à couvrir des prestations nombreuses et coûteuses, l’assureur révisera sans nul doute à la hausse le montant des cotisations patronales et salariales pour le futur.

L’objectif de la portabilité étant de limiter l’impact de la rupture du contrat de travail sur le statut social des salariés, les partenaires devront préciser les cas de rupture qu’ils ont entendu viser. A défaut, ils pourraient bien pénaliser ceux qu’ils ont entendu protéger. A suivre...

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