Les valeurs mutualistes, plus modernes que jamais ?
Solidement ancré sur des valeurs de solidarité, de démocratie et de proximité, le mouvement mutualiste français a fait la preuve de sa résilience et de son adaptabilité face aux crises. Une modernité plébiscitée par les Français, qui ne doit cependant pas être dévoyée au profit d'une vision passéiste du mutualisme décourageant les rapprochements internationaux, dont la vocation est, précisément, d'assurer la pérennité du modèle dans un monde toujours plus incertain.
La RSE avant l'heure. Bien avant que la responsabilité sociale et environnementale ne s'impose comme un slogan à la mode, le mouvement mutualiste français s'est structuré autour de valeurs fortes telles que la solidarité, la démocratie ou la défense des territoires. Des valeurs « humaines » ou humanistes inséparables du mutualisme, qui se déclinent tant au travers de la vie sociale locale, avec la participation de nombreux sociétaires aux assemblées générales de leurs caisses, qu'en termes de conquête commerciale, de taux d'équipement ou de fidélisation à long terme, les assureurs et complémentaires santé mutualistes tenant, sur ces points, la dragée haute à leurs concurrents « capitalistes », soumis aux aléas des marchés comme aux exigences de rentabilité de leurs actionnaires.
Non-lucrativité, principe de solidarité et gouvernance démocratique constituent ainsi un corpus de valeurs historiques plébiscitées par des générations de Français. Une étude menée en 2019 pour le compte de l'Association des assureurs mutualistes révèle que la non-lucrativité du modèle mutualiste inspire confiance à près de huit personnes sur dix (79%). Six Français sur dix (59%) estiment également que les groupes mutualistes sont, en matière tarifaire, plus justes et équitables que leurs concurrents. Bien identifiées par les consommateurs, les valeurs mutualistes correspondent aussi et surtout aux aspirations des Millennials, ces Français nés à la fin du siècle dernier qui expriment de fortes préoccupations sociales et environnementales. En somme, bien que centenaires, les valeurs mutualistes font plus que jamais la démonstration de leur modernité et de leur adaptabilité aux enjeux du XXIe siècle.
Le respect des valeurs mutualistes passe aussi par la diversification
Ancrées dans une riche histoire, les valeurs attachées au mutualisme ne doivent cependant pas être dévoyées au profit d'une vision passéiste, voire fantasmatique, du modèle mutualiste. Maintenir et renforcer ces valeurs suppose en effet de les adapter constamment à un monde toujours plus incertain, en se diversifiant. A ce titre, les mouvements de consolidation à l'oeuvre dans le secteur au niveau international ont bien pour objectif de renforcer les entités concernées et de perpétuer, sur le long terme, un modèle qui a fait la preuve de sa résilience en temps de crise. Véritable « évidence industrielle », pour les chercheurs de l'Institut Choiseul, cette vague de rachats devrait connaître un nouveau rebondissement avec l'acquisition prochaine du réassureur bermudien PartnerRe par le géant mutualiste français Covéa, qui chapeaute les marques MAAF, MMA ou encore GMF.
Disposant de capitaux à la fois plus larges et stables que leurs concurrentes, les mutuelles comme Covéa répondent ainsi idéalement aux besoins en capitaux des réassureurs, qui doivent gérer des risques considérables, tout en conférant à ces derniers une forme de stabilité permettant de mieux amortir l'impact des crises qui ne manqueront pas d'advenir. Comme en témoigne le succès du mutualiste allemand Talanx et de sa filiale de réassurance Hannover Re, « l'adossement d'un réassureur à une mutuelle permet rapidement d'obtenir des performances exceptionnelles et à long terme des positions très solides », appuient les spécialistes de l'Institut Choiseul.
Les mutualistes en première ligne durant la crise sanitaire
Cette solidité s'est tout particulièrement illustrée au plus fort de la crise sanitaire, quand les acteurs mutualistes français ont su puiser dans leurs valeurs communes pour continuer de soigner, prévenir et assurer leurs missions auprès de leurs adhérents. Les hôpitaux, cliniques, Ehpad et centres de santé mutualistes ont ainsi multiplié leurs capacités d'accueil afin de soulager les hôpitaux publics. Les pharmacies mutualistes du Centre-Val de Loire ont mis en place un service de livraison à domicile pour les personnes fragiles. La Mutuelle Nationale des Hospitaliers (MNH) a proposé un dispositif d'accompagnement psychologique à destination des professionnels de santé. Plusieurs fonds d'aide sociale mutualiste ont permis de répondre aux situations individuelles les plus délicates. En tout, ce sont plusieurs centaines de millions d'euros qui ont été, en France, mobilisés par le secteur.
Si le mutualisme se décline par des actions concrètes au plus près des préoccupations quotidiennes des assurés, il s'incarne aussi par des parcours humains. Ainsi de certaines grandes figures du secteur, comme Jacques Vandier, le « pape du mutualisme » à la française. Décédé en 2020, celui qui a régné sur la Macif pendant près de quarante ans s'est, par exemple, illustré en démocratisant l'assurance auto, en popularisant le constat amiable et, plus généralement, en permettant, comme il avait l'habitude de le répéter, « à chacun de s'assurer au meilleur prix ». Jacques Verdier aurait pu le dire : ce qui importe pour les mutualistes, c'est cette capacité de toujours se réinventer pour rester attractifs – sans, jamais, trahir leurs valeurs ni leurs ambitions historiques.
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