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06 / 03 / 2025 | 15 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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La gestion du capital humain, un facteur stratégique de performance

Béryl Bouvier di Nota, Responsable de la gestion à impact chez Ofi Invest Asset Management détaille sa conception de la gestion du capital humain et la façon dont il est possible de l’intégrer dans une gestion à impact social....au-delà des mots ou des déclarations d'intention !

 

 

Quelle est votre approche de la gestion du capital humain ?

 

Tout d’abord, il ne s’agit pas de considérer l'humain comme une charge ou une variable d'ajustement. Le capital humain doit être appréhendé comme un moteur de performance, une ressource qu'il faut valoriser au sein de l'entreprise.

 

La gestion du capital humain relève d’un véritable engagement sociétal de l'entreprise en vue de valoriser ce capital au travers d'une politique sociale claire, continue dans le temps et reconnue par ses parties prenantes. Une politique sociale doit créer de bonnes conditions de travail en respectant le droit du travail et en favorisant le dialogue social. Cela passe également par l'équité homme-femme dans l'organisation. Il s’agit de prévenir les risques sur La santé et la sécurité mais aussi d’anticiper les besoins de compétences face à des défis technologiques permanents et des ruptures industrielles.

 

Quels constats vous ont-ils incité à déployer une stratégie privilégiant les entreprises qui s’engagent sur une politique sociale ?

 

Nous observons que le pilier social est objectivement le parent pauvre des stratégies ESG (Environnement, Social, Gouvernance), aux côtés des critères environnementaux et de gouvernance d’entreprise. Les réglementations ne contraignent pas les entreprises à communiquer sur leur politique sociale de manière aussi appuyée que sur les autres piliers E (Environnement) et G (Gouvernance).


Pourtant, les changements technologiques, les mutations industrielles ont des incidences majeures sur la gestion du capital humain.


La crise Covid a mis en exergue le caractère crucial de cet enjeu et aussi son impact sur la création de valeur d’une entreprise. La gestion du capital humain doit aussi répondre à une demande plus forte de qualité de vie au travail, d’épanouissement de la part des salariés, en particulier auprès des plus jeunes générations, qui se montrent plus exigeantes sur les valeurs de l’entreprise.

 

Les sociétés les plus engagées sur les questions sociales sont privilégiées par les salariés et sont donc mieux placées pour attirer les talents et les retenir. Nous rencontrons des dirigeants très engagés, dont la politique sociale fait partie intégrante de la stratégie de croissance.

 

Pour Ofi Invest Asset Management, acteur de l’écosystème mutualiste, bien appréhender cet enjeu et en tenir compte dans les processus d’investissement est essentiel. La CSRD(1), réglementation qui vise à améliorer la transparence des performances extra-financières, pousse les entreprises à davantage de transparence sur les sujets sociaux. Convaincus que le capital humain impacte favorablement les valorisations, nous avons donc créé une stratégie d’investissement dédiée en lien avec les enjeux sociaux depuis 2020.

 

Vous avez développé un score d'impact. Comment fonctionne-t-il ?

 

Notre score propriétaire d’impact social vise à identifier les entreprises les plus engagées sur les enjeux sociaux. Nous filtrons ainsi tout notre univers d'investissement sur les actions européennes, tous secteurs confondus, afin de capturer l’ambition et la crédibilité de la politique sociale des entreprises.

 

Ce score repose sur cinq piliers essentiels :

 

1.  L'intentionnalité : l'engagement sociétal de l'entreprise et l'intégration de sa politique sociale dans sa stratégie et sa gouvernance.

2.  La valeur travail : emploi, dialogue social et climat interne.

3.  La progression sociale : développement des compétences et équité hommes-femmes.

4.  La répartition de la valeur ajoutée : rémunération des facteurs de production (salariés, actionnaires, État).

5.  L'inclusion sociale : politiques en faveur de la fourniture de biens et services de base à un large public.

 

Notre approche est transverse et concerne tous les secteurs. Nous sommes bien sûr conscients que, à titre d’exemples, le turnover (taux de rotation du personnel) est plus élevé dans le secteur informatique, le travail temporaire est plus fréquent dans le BTP et les mutations technologiques impactent plus fortement l’automobile…

 

En quoi l’engagement social est-il susceptible d’impacter positivement les valorisations ?

 

Nous constatons qu’une bonne gestion du capital humain sur toute la chaîne de valeur est non seulement créatrice de valeur mais elle est également assimilée à une bonne gestion des risques qui pourraient peser sur les coûts et la performance de l’entreprise. À titre d’exemple, une bonne gestion de la pyramide des âges améliore la capacité d’une entreprise à innover et à croître. De même, valoriser les salariés en termes de reconnaissance et de rémunération limite la rotation des effectifs et la fuite des talents, ce qui est favorable à la productivité. La valorisation du capital humain contribue ainsi à la croissance bénéficiaire de l’entreprise.

 

Dans le cadre de leurs engagements sociaux, les entreprises embarquent tous leurs collaborateurs, parfois même leurs fournisseurs et certaines communautés locales dans leur dynamique. Cela permet ainsi de renforcer le leadership et l'image de marque de l’entreprise.

 

En outre, nous observons que les controverses à caractère social sont, à l’inverse, destructrices de valeur. Il est donc stratégique pour les entreprises de bien appréhender la dimension sociale et de valorisation du capital humain sur toute la chaine de valeur dans leur stratégie. C’est clairement l’orientation de gestion que nous avons dans notre processus d’investissement.  

 

(1) CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive)

https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/dossiers-thematiques/le-reporting-de-durabilite-csrd

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