Organisations
« Intérim-bashing » : nos contre-points au dernier reportage à charge du magazine Pièces à conviction
Avec du recul, la CFE-CGC Manpower revient sur le reportage « Pièces à conviction » diffusé sur France 3 le 20 novembre, sur la génération oubliée des jeunes ruraux. Dans les faits, l’intérim (notamment le CDII et Manpower) ont été mis sur le grill. Dans le reportage, Alain Roumilhac a répondu à chaud, sans préparation, donc sans vraiment pouvoir convaincre. Son message du lendemain sur LinkedIn ne change pas grand-chose au fait que nous passons pour des profiteurs de la précarité.
Pourquoi personne ne défend le CDII dans le reportage ?
Avant qu’Alain Roumilhac ne soit pris par surprise pour répondre aux questions de l’équipe du magazine, la direction avait été sollicitée pour caler une interview. Celle-ci a manifestement refusé de mettre ses arguments sur la table. C’est dommage. Défendre ce contrat était ce que l’on pouvait attendre de la direction.
De notre côté, nous (et certainement d’autres syndicats) avons été contactés par un journaliste du magazine pour faire remonter des témoignages d’intérimaires déçus par le CDII puisque c’était manifestement l’angle d’attaque et livrer notre position. Nous avons décliné car ce nouveau contrat, la CFE-CGC l'a négocié et signé au niveau de la branche en étant conscient des points à améliorer. Avec les joies du montage, il était fort probable que le message que nous tenions à faire passer soit brouillé. D’autres l’ont fait, anonymement, en alimentant ce reportage… Notamment en transmettant des documents indiquant les marges générées sur les CDII. Parlons-en plutôt que de sortir l’argument de la confidentialité avec un dépôt de plainte de la direction à la clef.
Y a-t-il du chantage au CDII ?
Nos marges sur un CDII sont supérieures à celles que nous réalisons sur un contrat d’intérim classique. L’IFM de 10 % n’est logiquement plus versée au salarié en CDII et alimente désormais le fond qui permet de leur garantir un salaire minimum au SMIC et de les former. Impasse du reportage sur ce point essentiel. Si le CDII est rentable, c’est avant tout parce que le taux d’activité des 15 000 personnes qui l’ont signé chez Manpower est très bon et que ces contrats sont facturés aux entreprises utilisatrices aux mêmes conditions qu’un intérim classique. Souvenons-nous qu’au tout début, les responsables d’agences craignaient de voir leurs résultats d’exploitation baisser en faisant signer ces contrats qui contraignent à verser un salaire minimal, que la personne travaille ou non. Non, il n’y a pas de chantage au CDII. Quand l’intérimaire signe, il le fait en toute connaissance des contreparties : polyvalence sur trois métiers, mobilité géographique sur 50 km et impossibilité de refuser une mission. C’est assurément moins d’autonomie mais plus d’employabilité. Enfin, la caricature de dire que Manpower refuse la rupture conventionnelle et préfère licencier le CDII parce que cela coûte moins cher est un comble car les montants sont identiques au centime près...
Pourquoi le CDII concerne-t-il avant tout les plus petits salaires ?
Le CDII était censé concerner avant tous les profils d’intérimaires cadres. Ce n’est pas ce qui s’est passé. Sur les 15 000 CDDI de Manpower, moins de 5 % sont des cadres. Ce sont avant tout les intérimaires les plus proches du SMIC qui ont choisi ce contrat. C’est bien pour cela que nous sommes globalement à 50 000 CDII dans la branche. Les salaires des intérimaires en CDII varient. Normal, en fonction des entreprises utilisatrices, les primes ne sont pas identiques, les salaires non plus mais c’est vrai pour les CDII, pour les intérimaires et aussi pour les CDD. Quant à la difficulté d’obtenir un crédit avec un CDII, celle-ci n’est pas liée à la nature du contrat qui n’est pas un sous CDI mais au niveau de rémunération qui est effectivement proche du SMIC.
Quels sont les points à renégocier du CDII ?
Le CDII est une réelle avancée sociale mais, comme tout nouveau dispositif, il mérite d’être amélioré au fil du temps. D’ailleurs, la CFE-CGC a demandé en branche l’ouverture d’une nouvelle négociation sur le sujet. Sur un mois, un intérimaire en CDII qui gagne un SMIC sur une mission de trois semaines ne touche actuellement pas d’indemnisation s’il n’a pas de mission sur sa dernière semaine. Il devrait pouvoir toucher un complément sur la base du salaire horaire minimal. La rémunération minimale garantie pour les cadres est également trop faible pour les motiver à franchir le pas du CDII, avec un SMIC majoré de seulement 25 %.