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22 / 06 / 2015 | 123 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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La transformation numérique de l'État est en marche

Le rapport commandé par le Premier Ministre en septembre 2014 au président du Conseil national du numérique a été remis en fin de semaine dernière.

Comme le souligne Benoît Thieulin en introduction à son rapport, « il est urgent d’agir. De piloter la révolution à l’œuvre pour ne pas la subir. Pour redonner un sens politique à notre numérique. Pour que les individus reprennent le contrôle sur internet », mais il insiste aussi sur le fait que « le net a perdu son innocence : l’alternative n’est plus entre ceux qui défendent l’urgence de la transition numérique et ceux qui la négligent ou la retardent. La transition numérique est en cours, partout, pour tous ». Pour lui, « plusieurs numériques sont possibles et il est temps de construire un numérique européen, plus politique, plus conforme aux promesses d’empouvoirement (*) comme à celles des pères fondateurs. Il revient à la France et à l’Europe de définir ce numérique et de mettre en place des politiques publiques pour le construire ». C’est un modèle nouveau qu’il faut inventer : celui qui met le numérique au service du pouvoir d’agir et de l’émancipation individuelle comme collective.

Ce document (**) de près de 400 pages « pour une politique française et européenne de la transition numérique », qui est la résultante de l'organisation d’un débat ouvert, transparent et contributif, combinant une plate-forme en ligne, des rencontres et des ateliers comporte en fait quatre volets thématiques :

  • loyauté et liberté dans un espace numérique en commun ;
  • vers une nouvelle conception de l'action publique : ouverture et innovation ;
  • mettre en mouvement la croissance française : vers une économie de l'innovation ;
  • solidarité, équité et émancipation : enjeux d'une société numérique.


Dans le cadre de quatre chapitres, sont développées 70 propositions concrètes sur ce sujet d'importance, conduisant entre autres à affirmer quelques principes et recommandations, parmi lesquelles :

  • la neutralité du net;
  • la loyauté des plates-formes,
  • l'État de droit,
  • la transformation numérique de l'action publique et le développement de la co-élaboration des politiques publiques,
  • le renforcement de la transparence des processus décisionnels,
  • la diffusion d'une véritable culture de l'innovation au sein de la fonction publique,
  • le développement des pratiques collaboratives et le partage d'expériences,
  • une meilleure interaction entre entreprises et monde académique,
  • adapter le dialogue social et la gouvernance des entreprises aux enjeux numériques,
  • renforcer la stratégie numérique de l'État pour contribuer à l'innovation,
  • reconcevoir la structure de financement de l'économie de l'innovation,
  • intensifier la stratégie d'attractivité numérique française auprès d'acteurs internationaux,
  • encourager l'économie collaborative tout en la régulant,
  • encourager le développement des communs dans la société,
  • valoriser et structurer les métiers de la médiation numérique,
  • s'appuyer sur le numérique pour faciliter l'accès et le recours aux droits sociaux,
  • explorer de nouvelles manières de mettre les solidarités en mouvement,
  • utiliser le levier numérique pour permettre au grand public de comprendre les défis de santé publique et devenir acteurs de leur résolution,
  • former les professionnels de santé aux enjeux et aux usages du numérique en santé,
  • faire évoluer et clarifier l'exception pédagogique pour une meilleure adéquation avec les usages numériques,
  • renforcer l'accès des justiciables à l'information juridique,
  • encourager les modes alternatifs de résolution des litiges,
  • instruire la place des questions d'éthique dans la société numérique...


À l'occasion de la remise de ce rapport, le gouvernement a confirmé sa volonté d'engagement sur ces sujets majeurs en présentant sa feuille de route (***)  « Exemplarité : la transformation numérique de l'État » pour accélérer le processus engagé.

Pour le gouvernement, « le numérique est un puissant vecteur de modernisation de la puissance publique : indispensable à la simplification des relations avec les usagers, source de nouvelles améliorations de la qualité, du coût ou de l’efficience des services, support d’une démocratie renouvelée, plus transparente, plus concertée, plus ouverte à la collaboration des citoyens ».

Pour réussir ces progrès, il entend dégager des moyens, notamment avec le lancement du Fonds de transition numérique de l’État et la modernisation de l’action publique » du programme d’investissements d’avenir : 126 millions d’euros pour contribuer à la réussite de la transformation numérique de l’État (les premiers projets seront désignés très rapidement).

Cette stratégie numérique de l’État sera amplifiée et approfondie dans cinq directions principales.

Un État plus ouvert et plus accessible grâce au numérique 

Dans ce cadre et pour compléter la possibilité de poser des questions à l’administration ou d’engager des démarches en ligne, le gouvernement entend  :

  • mener le programme « dites-le-nous une fois«», rendu possible par l’ordonnance relative à l’adaptation du secret professionnel dans les échanges d’informations entre administrations et à la suppression des pièces justificatives, publiée en mai 2015 ;
  • se doter également d’un outil d’identification et d’authentification permettant à l’usager d’effectuer ses démarches en ligne en utilisant un système de fédération d’identités numériques reconnu par tous les services publics : France Connect, actuellement en phase de tests ;
  • animer une communauté de pratiques autour de la relation à l’usager, réunissant plus de vingt administrations ; le programme « 100% contacts efficaces » cherche à identifier, partager et expérimenter les pratiques innovantes en la matière, au bénéfice des usagers et des agents publics. 

Un état plate-forme

Le réseau interministériel de l'État (RIE), élément essentiel de la transition numérique de l’État, déjà opérationnel dans près de 4 000 lieux, remplacera progressivement l’ensemble des réseaux ministériels existants, raccordant près de 17 000 sites d’ici 2017. 

À travers du projet « État-plate-forme », l’État entend mettre en place une architecture favorisant la création de services publics numériques d’un nouveau type : plus ouverts, plus inter-opérables, mieux centrés sur les besoins de l’usager grâce à une meilleure circulation des données et des ressources entre les administrations.

Les données de l’État au service de la démocratie, de l’innovation et de l’efficacité de l’action publique

La politique d’« open data » du gouvernement sera consacrée dans la loi et amplifiée à l’occasion de la transposition de la directive « informations du secteur public » du 26 juin 2013, dont le délai de transposition court jusqu’en juillet 2015. La confirmation dans la loi des principes d’accès et de réutilisation de manière libre et gratuite des données publiques stimulera les réutilisateurs publics et privés.

La démarche de l’« État-plate-forme » susmentionné permet aussi via l’ouverture d’interface de programmation, d’associer les innovateurs à la co-construction des nouveaux services publics numériques.

 

Favoriser la diffusion de la culture numérique au sein de la puissance publique

Pour promouvoir les projets numériques innovants au sein de l’État, des innovateurs numériques seront donc nommés dans chaque ministère.

En outre, une démarche de formation des agents publics sera développée, avec des « master-classes » et des ressources en ligne.

Favoriser l’action publique dans les territoires

Pour le gouvernement, le numérique doit être au service d’une action publique inclusive, accessible, efficace et cohérente. Plus particulièrement, le numérique doit permettre de construire une société de la concertation, de la négociation et de l’innovation.

Le soutien d’une stratégie numérique pour et avec les collectivités territoriales est nécessaire pour de venir renforcer le lien de proximité et de développer l’implication des citoyens dans les grands choix réalisés pour un développement économique territorial durable et solidaire.

Vaste chantier sur lequel nous aurons donc l'occasion de revenir.

 
(*) Empouvoirment > La terminologie vient de la traduction francisée d'« empowerment » et qui dépend directement de la définition donnée par la charte d’Ottawa à la démarche de promotion de la santé : « processus qui confère aux populations le moyen d’exercer un plus grand contrôle sur leur propre santé ». D'une manière générale et par extension, il s’agit d’accroître sa capacité d’action dans une démarche collective, de la capacité à prendre ses affaires en main et de progresser vers plus de responsabilité et de justice sociale.
(**) Le contenu du rapport et les propositions formulées.
(***) La feuille de route.

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