Organisations
Quels relais de proximité pour accompagner la parole des salariés aidants ?
Le direct organisé le 8 février par MiroirSocial en partenariat avec Axa Santé & Collectives a été l'occasion d'illustrer l'enjeu de créer les conditions pour que le sujet de l'aidance s'invite dans le dialogue professionnel.
Même lorsqu’il est indemnisé à 100 % grâce à une prise en charge complémentaire par l’entreprise, même fractionnable, le congé légal de proche aidant est loin d'être la solution miracle pour les salariés qui accompagnent des proches en perte d'autonomie. Ils sont surtout demandeurs de souplesse dans leur organisation du travail. C'est donc beaucoup par le dialogue professionnel que les contraintes rencontrées par les salariés aidants sont susceptibles de se solutionner.
"C'est un axe majeur de prévention des risques psychologiques que d'accompagner les salariés aidants qui représenteront plus de 25 % des effectifs dans les entreprises d'ici à 2030. Et pas simplement les seniors. C'est une responsabilité de l'employeur que de créer en premier lieu les conditions d'une libération de la parole des aidants avec l'encadrement de proximité pour trouver de la souplesse dans l'aménagement du temps de travail", explique Christel Schmuck, responsable de l'offre de service prévention d'Axa Santé et Collectives qui propose un accompagnement personnalisé des salariés aidants avec notamment du soutien psychologique et de l'assistance pour monter les dossiers de prise en charge financière.
Un accompagnement où les représentants du personnel ont toute leur place. Pour Sophie Mandelbaum, chargée des relations avec les partenaires sociaux chez Axa Santé et Collectives : "en plus de leurs prérogatives de négociations, ils peuvent être des relais de confiance indispensables pour faciliter les aménagements de l'organisation du travail. Cela sous-entend d'adopter une posture d'écoute et d'orientation, dont les représentants du personnel sous estiment l’importance pour un salarié aidant".
Ecouter, ça se prépare
Mieux vaut se préparer à recevoir et à canaliser parfois la parole des salariés aidants. En septembre, la fédération CFDT chimie-énergie a adressé un sondage aidants dans ses différentes branches : pétrole, chimie, IEG. Sur les 1500 répondants, 30 % ont partagé de riches expressions libres sur les questions ouvertes. "C'est la première fois que l'on voit un tel niveau d'expression, révélateur d'une forte souffrance psychologique et du besoin de simplification", note Emmanuel Jacquier, le délégué fédéral CFDT de la branche pétrole. Initialement cette enquête était un préalable pour asseoir les revendications dans le cadre de la négociation d’un accord sur les salariés aidants dans la branche pétrole, reportée mais qui devrait finalement s’ouvrir au 2ème semestre 2024. "Un accord est nécessaire pour éviter des inégalités de traitement dans les arrangements qui peuvent émerger. Il y a un besoin de transparence sur les aménagements qui sont trouvés", précise Emmanuel Jacquier.
"La formation de l'encadrement à l'aidance devrait être systématisée dans les entreprises pour qu'il soit au fait du large panorama des solutions possibles", considère Lysiane Le-Hein, déléguée fédérale égalité professionnelle et droits familiaux à la CFE-CGC Energie. Une branche des IEG qui a ouvert la voie à la prise en charge à 100 % du congé de proche aidant en 2021. La dernière commission de suivi a pourtant révélé que seulement 16 demandes de congés avaient été faites en 2023. "C'est bien la preuve que d'autres solutions sont à mettre en place avant d'en arriver à demander un congé", poursuit Lysiane Le-Hein qui insiste sur le besoin de faire émerger des " rôles-modèles", notamment de managers en position d'aidance.
Non aux solutions de facilité
Pour Marina Al Rubae, journaliste, co-auteure du guide Les proches aidants pour Les Nuls : "Il ne faut surtout pas que les arrangements se fassent en catimini. Il faut parvenir à mettre l'ensemble de l'équipe dans la boucle si l'on veut que la solution soit durable". Et celle qui se trouve être aidante depuis longtemps, d'abord sans le savoir, puisque ses parents sont sourds, de conclure : "l'encadrement ne doit pas penser à la place des aidants. Conseiller par exemple de passer à mi-temps est d'abord une solution de facilité".