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08 / 09 / 2017 | 10 vues
Jean-Max LLORCA / Membre
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Hygiène au travail, exclue des ordonnances

Le gouvernement a édité les ordonnances réformant le code du travail, avec un objectif de « renforcer le dialogue social ». Pour cela, il regroupe CE + DP + CHSCT au sein d’un comité social et économique (CSE).

« Promis, juré », la quasi-totalité des missions et attributions des anciennes IRP seront reprises demain au sein du CSE. À lire de plus près, une expression du code du travail et appartenant au monde professionnel n'apparaît plus : hygiène au travail.

Des attributions actuelles des comité Hygiène, sécurité et conditions de travail (CHSCT) seules sont reprises : « santé, sécurité et conditions de travail »*. Exit l’hygiène.

Un domaine historique du monde du travail abandonné ?

Paradoxalement, le gouvernement a exclu l’hygiène au travail dans les missions et attributions du CSE allouées aux élus du personnel. Pourtant, ce domaine fondamental de la prévention existe légalement depuis 1936 pour les DP, puis en 1946 au sein des tout premiers CE, puis repris par les CHSCT en 1982. L’hygiène au travail est donc l'un des piliers historiques non retenu des possibilités d’actions et d’interventions des instances. Le CSE n’aura donc plus de pouvoir d’observation ou de suggestion sur l’hygiène au travail qui repose sur des :
  • obligations de l’employeur (mise à disposition d’installations sanitaires, vestiaires, local de restauration, nettoyage et aération des lieux de travail...) ;
  • comportements individuels (lavage des mains, port des vêtements de travail, nutrition...).

C’est relativement surprenant car le respect des règles d'hygiène est essentiel dans le travail où l’exposition aux toxiques chimiques et contaminants biologiques est plus intense et prolongée que jamais. La déferlante H1N1 de 2009 est encore dans toutes les têtes.

Les mesures d’hygiène au travail à mettre en œuvre permettent de limiter les risques d'apparition de maladies professionnelles et doivent précéder et accompagner les recours aux équipements de protection individuelle et aux installations de protection collective. De plus, la propreté des locaux reflètent l’image de marque de l'établissement, participent à la satisfaction des salariés et contribuent à la qualité de l’accueil.

Simple oubli ou volonté directe ?

Les rédacteurs des ordonnances n’ont, semble-t-il, pas connaissance de métiers salissants exercés sur les chantiers du BTP, dans l’environnement et l’assainissement, la gestion des déchets, l’entretien des bâtiments etc. Là, salariés, élus du personnel, encadrement et dirigeants sont souvent impliqués en toute priorité par l’amélioration de l’hygiène au travail.

Faudra-t-il que ces conseillers ministériels regardent dans leur univers au ministère et d’observer l’activité de travail de la personne qui nettoie quotidiennement leur bureau et le bâtiment pour qu’ils découvrent que des millions de salariés sont concernés directement ou indirectement par l’hygiène au travail. Eux les premiers en tant que personnes exposées !

Mais plus prégnant dans les entreprises, il s’agit aussi de salariés fortement exposés aux risques chimiques et biologiques : industries agro-alimentaires, agriculture et élevage, établissements médicaux sociaux, nettoyage industriel, établissements scolaires, restauration, hôtellerie, relation clientèle etc.

L'hygiène au travail concerne aussi les éléments de l’environnement dans lesquels les travailleurs vivent : air inhalé, eau et aliments ingurgités, surfaces touchées. Toutes sont des sources de contacts toxiques ou contaminantes insidieuses car souvent invisibles.

L’hygiène est aussi le domaine des vêtements de travail, les vestiaires et les sanitaires qui doivent faciliter les pratiques d’hygiène corporelle, être d’un entretien facile, être aménagés de façon à isoler explicitement des zones spécifiques et être adaptés en nombre aux salariés. Le CSE ne pourra-t-il plus intervenir sur ces sujets ?

Demain, l’environnement restera-t-il confiné hors du travail ?

Alors que les questions d’environnement sont plus que jamais d’actualité, le CSE ne pourra pas intervenir sur la qualité de l'air dans les bureaux et ateliers où la ventilation et l’aération des lieux de travail jouent un rôle essentiel pour limiter la concentration de l'ensemble des bactéries ou autres polluants dans l'air ambiant des lieux de travail. La légionellose, risque mortel, n’existerait plus ?

Les professionnels de ce secteur d’activité ne comprennent pas comment on peut proposer une loi qui veut  renforcer le dialogue social en excluant tout ce pan de prévention concernant l’hygiène au travail.

La méthode employée par le gouvernement, qui est d’aller en urgence dans la rédaction des ordonnances, en plein mois d’été, est-elle liée à l’improvisation, avec la fabrique d’erreurs historiques qui finalement nient des siècles d’évolution positive en santé publique, pour l’occasion celle de l’hygiène au travail ?

* Projet d’ordonnances : articles L.2312-5, L.2312-9 et L.2315-37.
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