Participatif
ACCÈS PUBLIC
24 / 02 / 2011 | 22 vues
Sylvain Thibon / Membre
Articles : 194
Inscrit(e) le 07 / 01 / 2010

Canal+ : pendant que certains vont au ski d’autres vont chez le psy…

État des troupes à Canal+ : une rupture inquiétante avec 2010. De nombreux cadres sont poussés vers la sortie, ce fait n’est, hélas, pas nouveau.

Mais en ce début d'année 2011, le phénomène semble s'accélérer.
 
  • Les messages sont moins subliminaux, plus directs « tu devrais voir la DRH pour un repositionnement... », « voilà ton EAI, avec une bonne et une mauvaise nouvelle : la bonne, tu toucheras l'ensemble de tes primes, la mauvaise, un RDV avec la DRH s'impose, tu coûtes cher... », « allons, il n'y a pas que CANAL+ dans la vie professionnelle, tu es encore jeune, on peut te proposer une formation...», « désolé, tu fais un excellent travail, mais vu ton âge, il faut penser à bouger... », « j'ai une mission à te proposer, superbe, ce n'est pas refusable... » etc.

C'est le type même de discours qui se multiplie, déstabilisant un peu plus une population de cadres qui n'a vraiment pas besoin de cela en ce moment. Ces discours normés concernent l'ensemble des services du groupe, y compris ses filiales directes ou indirectes.

Pourtant, les très nombreux départs de salariés orchestrés ces dernières années ont désorganisé une entreprise qui a maintenant vraiment besoin de stabilité et d'un peu de répit.
 
Perte de compétences, perte de sens, effacement de la mémoire, perte des savoirs, tous ces éléments concourent à fragiliser l'édifice.
 
Fin 2010, l'édition a commencé à payer son tribut, aux sports par exemple... En 2011, la direction technique semble prendre le même chemin, pendant que la distribution poursuit sa réorganisation engagée voilà 4 ans ! Il suffit de faire le compte des patrons qui sont passés par la direction commerciale depuis la fusion avec TPS : c'est impressionnant.


Nous nous alarmons !
 
De nombreux salariés cheminent maintenant vers les cabinets psy, seuls ou recommandés par la médecine du travail. Cette situation nous inquiète. Elle résulte d'un lent processus que nous dénonçons depuis plusieurs années : la financiarisation comme seule perspective, le résultat financier comme seul horizon à atteindre, l'individualisation de la performance !




Le Code du Travail contient lui même des articles spécifiques qui encadrent la législation sur le sujet (Art L. 4121-1). « L'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés ». 

Un risque professionnel

 
Nous avons régulièrement posé ces problèmes en réunions DP, au CE et au CHSCT. À chaque fois, les intentions sont bonnes, les applications sont nulles. Aujourd'hui, nous constatons un état d'épuisement chez certains salariés.

  • Nous voulons dire avec force que le fait de sortir un salarié de l'entreprise, en le licenciant par exemple, ne saurait dédouaner chacun de ses responsabilités. La rupture du contrat de travail ne saurait constituer une remise à zéro des compteurs. Nous serons extrêmement vigilants sur ce point.

Nous ne cessons de dénoncer une politique de management coercitive, destructrice de sens. Cette politique montre aujourd’hui ses limites dramatiques.


 
Poursuivre sur cette voie nous conduira irrémédiablement à l'échec.
Nous saurons nous remémorer les messages et les alertes que nous lançons depuis plusieurs années si la dégradation de l'environnement social de Canal+ devait se traduire dramatiquement.


 
Canal+ devrait être le laboratoire d’un nouvel espace de développement social dans l’entreprise. Plutôt que de réfléchir à cette rénovation managériale indispensable, nous appliquons les pires méthodes du moment qui ont pourtant conduit tant d'entreprises françaises dans l'impasse et dans la révision à marche forcée de leurs politiques sociales.

Pourtant, Canal+ en a les moyens. Canal+ est en très bonne santé financière, comme le montrent les résultats publiés cette semaine.

  • Ce n’est donc pas une question d’argent, mais bien un choix d’organisation.
Il faut écarter du cœur de l’entreprise le maximum de CDI en externalisant le plus de service possibles, le CDD, l’intermittent, étant devenus l’alpha et l’oméga d’une organisation qui doit être flexible à tout prix, même si pour cela les salariés doivent y laissé au passage leur santé.
 
La CGC de CANAL+ ne cesse d’alerter sur cette situation, sans être entendue. Jusqu'à quand ?

« Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. »

Note : Christophe DEJOURS, psychanalyste et psychiatre, est professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers et directeur de la revue Travailler.
Pas encore de commentaires