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Retraite AGIRC-ARRCO : une cure de rigueur imposée aux salariés du privé
Quelle que soit l’issue de la réforme des retraites en vue du futur régime universel en points prévu pour 2025, des modifications majeures sont déjà intervenues pour les salariés et les retraités du privé. Celles-ci résultent directement de l’accord national interprofessionnel du 15 novembre 2015 sur les retraites complémentaires AGIRC-ARRCO que Force Ouvrière a refusé de signer et a vivement dénoncé.
Les conditions se sont durcies depuis le 1er janvier 2019 tant au moment de la liquidation de la retraite que pour l’acquisition des points de retraite du nouveau régime fusionné de retraite complémentaire AGIRC-ARRCO ou encore pour sa revalorisation annuelle.
Abattement de 10 % pendant 3 ans
D’abord, pour tous les nouveaux retraités, un dispositif de décote-surcote s’applique. Tout salarié né à partir de 1957 qui prend sa retraite à l’âge de 62 ans (même s’il a tous ses droits et tous ses trimestres cotisés au régime général de la Sécurité sociale) subira une décote de 10 % sur sa retraite complémentaire durant trois ans. Pour échapper à ce « malus », même s’il remplit les conditions du taux plein au régime de base, il doit décaler d’un an la liquidation de sa retraite, c’est-à-dire travailler un an de plus, soit jusqu’à 63 ans. S’il travaille au-delà, il pourra bénéficier d’un « bonus » durant une période limitée à un an, à savoir, une surcote de 10 % pour deux ans de décalage, 20 % pour trois ans et 30 % pour quatre ans.
Des taux des cotisations AGIRC-ARRCO en augmentation
Le deuxième changement qui affecte les salariés en activité se traduit par une hausse des taux de cotisation avec notamment des taux d’appel qui passent de 125 % à 127 %. Il convient de rappeler que l’augmentation du taux d’appel ne génère pas de points de retraite. Elle ne permet pas au salarié d’acquérir plus de droits à la retraite et donc, à terme, d’améliorer sa pension.
La mise en place du nouveau régime AGIRC-ARRCO de retraite complémentaire ne comporte plus de référence catégorielle (cadre/non-cadre) et s’articule désormais autour de deux tranches de cotisations. La première tranche correspond au plafond de la Sécurité sociale, la seconde tranche touche toutes les sommes supérieures au plafond jusqu’à huit plafonds. La tranche C des cadres disparaît et la tranche 2 des non-cadres n’est plus limitée à trois plafonds de la Sécurité sociale. La répartition entre part salariale et part patronale est de : 40 % en part salariale et 60 % en part patronale (elle passe ainsi de 38/62 à 40/60 pour les cadres).
Tranche 1 : ≤ plafond de la SS (PSS) – taux appliqué - 7,87 % = (6,20 % x 127 %)
Tranche 2 : salaire compris entre 1 PSS et 8 PSS – taux appliqué - 21,59 % = (17 % x 127 %)
En outre, deux nouvelles contributions d’équilibre, destinées à financer les opérations du régime sont mises en place :
- la contribution d’équilibre général (CEG) au taux de 2,13 % sur la tranche 1 et 2,70 % sur la tranche 2, cette contribution est notamment destinée à financer la retraite sans minoration définitive, avant l’âge de 67 ans ;
- la contribution d’équilibre technique (CET) au taux de 0,35 % sur la tranche 1 et 2, si la rémunération excède le plafond de la Sécurité sociale.
Compte tenu de ces nouvelles contributions, les cotisations appelées jusqu’au 31 décembre 2018 au titre de l’Association de gestion du fonds de financement de l’AGIRC et l’ARRCO (AGFF), la garantie minimale de points (GMP) et la contribution exceptionnelle temporaire (CET) sont supprimées au 1er janvier 2019. Effet du rehaussement des taux de cotisation : pour un salarié rémunéré 26 400 euros bruts/an, la hausse de cotisation s’élève à 24 euros par an et pour un salarié rémunéré 57 600 euros bruts par an, la hausse de cotisation est de 228 euros sur un an.
Pas de garantie de revalorisation annuelle
Le troisième changement a trait aux règles de revalorisation annuelle des retraites complémentaires. Jusqu’au 31 décembre 2018, la règle a consisté à revaloriser les retraites en fonction de l’inflation moins 1 point, avec un taquet consistant en une interdiction de passer en dessous de 0 %, c’est-à-dire à baisser les retraites. Mais depuis janvier 2019, un changement conséquent est intervenu. Les revalorisations des retraites AGIRC-ARRCO ne seront plus basées sur l’inflation mais sur l’évolution moyenne des salaires. A priori, cette règle semble plus favorable pour les retraités puisque, traditionnellement, les salaires augmentent plus vite que les prix.
Sauf que désormais, la garantie que les retraites ne pourront pas baisser a été tout simplement supprimée. L’accord prévoit que les paramètres de pilotage du régime, tel que celui « de la valeur d’achat du point » ou celui de la « valeur de service » devront tenir compte de « critères de soutenabilité ». Cela signifie que le taux d’indexation pourra être minoré ou majoré à loisir, sans filet de sécurité pour les retraités, en fonction de seules contraintes liées à l’équilibre financier du régime, la situation économique et l’évolution démographique.
Lors des prochaines réunions de pilotage du nouveau régime AGIRC-ARRCO, Force Ouvrière veillera particulièrement à la stratégie de revalorisation des pensions pour 2019 et les années à venir.
Alors que le régime se remet d’aplomb et que plus de 60 milliards d’euros de réserves s'affichent, nous rappellerons que nous condamnons la sous-indexation limitée à 0,6 % appliquée en novembre 2018 et que nous revendicons une indexation des retraites complémentaires ainsi que des retraites dans leur ensemble, sur l’évolution des salaires.
- Protection sociale parrainé par MNH