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Délais de consultation et d’expertise du CSE : un manque de confiance envers les représentants du personnel
Analyse des décrets du 2 mai concernant les nouveaux délais de consultation et d’expertise du CSE applicables pour la consultation et l’information du CSE afin de faire face à l’épidémie de covid-19.
Rappel : passage de 1 mois à 8 jours (ou 11 jours au lieu de 2 mois si recours à l’expert) pour les consultations du CSE (sauf PSE et consultations récurrentes) jusqu’au 23 aout 2020.
Notre analyse : l’enjeu économique primerait-il sur les enjeux de santé, sécurité et conditions de travail et, surtout, un manque de confiance envers les représentants du personnel et leurs responsabilités ?
Avec ces nouveaux délais, prévus surtout pour accélérer la reprise du travail sur site, les représentants du personnel se trouvent privés d’une partie de leurs prérogatives alors que les modalités du confinement n’ont pas conduit les représentants du personnel à user des dispositions législatives. La logique d’accompagnement et du dialogue social ont souvent prévalu.
Mais des dérives ont pu être observées dans le cadre de la poursuite de l’activité de certaines entreprises, dont certaines ont récemment été sanctionnées pour l’exposition de leurs salariés et l’absence de mesure de sécurité suffisantes.
De plus, les représentants du personnel sont privés de leurs experts en santé au travail alors que les risques n’ont jamais été aussi présents et que ce qui se joue dès maintenant pour la reprise aura pour vocation d'être durable. Les représentants du personnel doivent pouvoir se faire accompagner par leurs experts dans un cadre négocié et adapté à la situation de leur entreprise. Or aucun dispositif légal n’est prévu et les pratiques d’accompagnement n’existent que dans les entreprises au sein desquelles le dialogue social est déjà de qualité.
La publication concomitante par le Ministère du Travail du protocole de déconfinement met en exergue la complexité de la tâche qui nécessite du temps et de la concertation mais aussi l’expertise de nombreux acteurs.
Les décrets du 2 mai concernent les consultations consécutives aux décisions de l’employeur pour faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’évidement de covid-19. Celles-ci ne concernent en réalité que la ou les consultations pour aménagement ou projet important et la possibilité de recours à l’expert CSE (ex-CHSCT) pour en évaluer les conséquences et éclairer le CSE, soit le plan de reprise. En effet, on imagine mal les entreprises entreprendre d’autres projets d’ici le second semestre.
Enfin, les entreprises ne sont pas à l’abri d’un risque de tension sociale, alimenté à la fois par la peur d’aller travailler et la peur de perdre son emploi. Les RPS risquent alors d’exposer que les récentes études déjà publiées sur les conséquences du confinement font état de conditions de travail dégradées et d’altération de la santé.
L’exercice du droit de retrait, les alertes pour danger grave imminent et les demandes d’expertise pour risque grave pourraient alors augmenter si la prévention, l’association des IRP et le temps nécessaire à la consultation ne sont pas de mise.
Une nouvelle stratégie d’action de prévention des risques et accompagnement adapté dans ce contexte à hauts risques deviennent un enjeu essentiel.