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Quand des responsables cégétistes se comportent comme des patrons voyous
Alors que des responsables cégétistes se comportent comme des patrons voyous, Tapioca laisse visiblement faire, au risque de faire chuter la maison.
Il se passe des choses peu reluisantes du côté de la centrale de Montreuil, à en croire les révélations du Canard Enchaîné du 30 décembre dernier. Alors que la CGT avait déjà essuyé une tempête et en était sortie très affaiblie, après le triste épisode de l’affaire « Lepaon », des méthodes dignes de patrons voyous ont de nouveaux été révélées par l’hebdomadaire satirique.
Une première affaire touche la fédération CGT de l’agroalimentaire, laquelle voulait payer l'un de ses permanents au noir. Une pratique pourtant dénoncée par le syndicat lorsque qu’il s’agit de méthodes patronales mais qui semble assez habituelle au sein de la fédération. Sauf que le permanent en question refuse, s’abritant justement derrière les « valeurs » de la CGT, parmi lesquelles il y a le combat contre le travail dissimulé. Conséquence, le pauvre syndicaliste (qui ne voulait que de vraies fiches de paye avec les cotisations sociales) s’est retrouvé victime de méthodes que les nervis du secteur de l’automobile des années 1970 ne renierait pas.
« Si le lanceur d’alerte a rapidement été licencié, les prudhommes, suivis par la Cour d’appel, ont ordonné sa réintégration », rapporte le Canard. Mais, à la fédération de l’agroalimentaire, on se fiche un peu des prud'hommes puisque, selon l’article, « lorsqu'il se pointe à Montreuil, neuf gros bras lui interdisent l’accès aux locaux », qui abritent aussi la confédération donc les cadres nationaux et son secrétaire général à l’œil toujours attentif, Philipe Martinez. Bref, personne dans ce beau monde n’est intervenu, s’abritant derrière de vagues statuts d’indépendance des syndicats pour ne surtout rien faire. D’autres diront sans doute par faiblesse.
Cette faiblesse pourrait coûter cher à la vie syndicale car ladite fédération de l’agroalimentaire a alors franchi un palier supplémentaire en se pourvoyant en cassation, pensant avoir trouvé une faille dans la loi protégeant les syndicalistes. « Si la procédure aboutissait, elle pourrait priver des dizaines de milliers de représentants du personnel (y compris de la CGT) de leur protection légale », rapporte l’hebdomadaire. « Si la fédération de l’agroalimentaire l’emporte, la jurisprudence créée de fait provoquerait un formidable séisme pour le syndicalisme dans tout le pays », précise d'ailleurs un dirigeant d’une autre confédération. Déjà que le syndicalisme ne se porte pas bien dans l’Hexagone... L’expert poursuit : « plus aucun délégué syndical, quelle que soit son appartenance, ne sera à l’abri de patrons voyous ». Et le Canard, perfide, de pointer « que ça n’a pas l’air d’inquiéter Philipe Martinez ».
Il faut dire que ces mauvais comportements touchent aussi d’autres camarades du Général Tapioca, comme la fédération du commerce et des services qui a vu son congrès annulé par la justice bourgeoise. Comme le rapporte le palmipède entravé, une majorité de congressistes n’a pu assister aux réjouissances car « bloquée à l’entrée ». D’autres encore ont même dû rebrousser chemin « craignant des coups ». Une bonne raison en effet ! En fait, ces frondeurs insoumis « avaient quelques révélations désagréables à présenter sur les comptes de l’équipe sortante », rapporte le Canard. La justice ayant ordonné la tenue d’un nouveau congrès, on pensait que la « conf' » allait mettre un peu d’ordre dans tout ça et placer les dirigeants de la fédération du commerce sous tutelle. Mais rien... Ces derniers sont non seulement restés en place mais ont de plus validé ledit congrès. « Et Martinez, une fois encore, regarde ailleurs », note l’hebdomadaire satirique, toujours perfide.
S’il devait respecter « les statuts démocratiques et les valeurs » de la CGT et surtout lutter contre les comportements qu’il critique à longueur d’année quand ils viennent soit du patronat, soit du gouvernement, Tapioca ne saurait pas non plus où donner de la tête. D’autant que d’autres fédérations font aussi bien, voire plus, comme celle des services publics qui regroupe les syndicats des collectivités locales notamment des mairies dont les méfaits ont pourtant fait la une médiatique.
Cette fois, le décor est la prestigieuse ville de Paris, une commune où la CGT, autrefois puissante, traverse depuis maintenant près de quatre ans une crise aigüe avec, pour toile de fond, une tentative de contrôle de la fédération des services publics sur les différents syndicats parisiens en charge des agents municipaux dans la capitale mettant alors l’équipe d’Anne Hidalgo dans l’embarras (lire ici). La crise est rapidement passée à un stade supérieur lorsque la fédération a décidé de soutenir un camarade accusé d’agression sexuelle coûte que coûte. L'épisode a été révélé par Médiapart et a fait grand bruit jusque dans les médias nationaux (voir ici). Toujours sans réaction du patron moustachu de la centrale de Montreuil.
Comme disait Pierre Dac, « passé les bornes, y a plus de limites » puisque la fédération des services publics a fait encore plus fort en tentant d’abord d’expulser les récalcitrants du bureau à la Bourse de Travail à Paris puis d’envoyer une liste de cinq cents militants à la maire de Paris, pour lui signifier que ces derniers sont désormais déchus de tous leurs droits syndicaux (voir ici). Ces troupes exerçaient leurs mandats dans tous les secteurs de la Ville : personnel de crèche et de mairie, cadres administratifs, agents de maîtrise, animateurs des écoles, conducteurs (notamment de bennes), bibliothécaires, agents des conservatoires, de surveillance des parcs et jardins, de logistique, des canaux etc. La liste est bien sûr non exhaustive. Une véritable hécatombe touche toute la CGT parisienne et que la fédération des territoriaux veut visiblement éradiquer, toujours sans réaction de Philippe Martinez (voir ici).
Presque un an plus tard, la situation ne s’étant pas arrangée, il semble désormais certain que bien des adhérents quitteront le navire cégétiste à Paris. C’est déjà le cas du syndicat qui regroupait le personnel des mairies et de la culture. Selon nos informations, beaucoup d’autres (dont celui de la petite enfance) devraient bientôt le suivre. Il n'est donc pas que la fédération des services publics perde Paris lors des prochaines élections, alors que la CGT occupe la première place depuis des décennies. Bref, son syndicat brûle mais Philippe Martinez regarde ailleurs. Soit il pense à sa prochaine manifestation « interprofessionnelle », soit il est complice mais dans les deux cas, c’est plutôt gênant. En tout cas, pas très fluctuat voire carrément mergitur.