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25 / 01 / 2012 | 252 vues
Richard Rigano / Membre
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S'échanger des jours de congé entre salariés, le type même de fausse bonne idée...

Légiférer sur la solidarité, c'est en l'espèce en dispenser la collectivité nationale et faire reculer le droit.

Équité conte égalité, charité contre solidarité. C'est à chaque fois un recul des valeurs d'une société, sous couvert de bons sentiments.

La boîte de Pandore est décidément à la mode et les apprentis sorciers sont en forme.
Récemment, une élue proposait de faire appel aux vétérinaires en cas d'urgence médicale relative aux humains, sans mesurer les conséquences profondes et risquées d'une telle mesure. Même démarche inconséquente pour une candidate à l'élection présidentielle qui voulait ajouter 2 jours fériés religieux à notre calendrier. Voici que la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale adopte un projet de loi qui encadrerait les jours de repos qu'un salarié pourrait donner bénévolement à un collègue pour soigner un enfant de moins de 20 ans, gravement malade.

  • Il est surprenant qu'une commission d'élus fasse l'impasse sur les droits existants en la matière.

Depuis 2006, une allocation de présence parentale peut être versée aux parents d'un enfant de moins de 20 ans gravement malade ou handicapé, cette prestation est réglée par la Caisse d'allocations familiales sous certaines conditions, à commencer par un certificat médical déclarant la nécessité d'une présence familiale auprès de l'enfant concerné. Un congé de présence parental s'impose à l'employeur, dès lors que les conditions sont remplies et que celui-ci a été prévenu au moins 15 jours avant la date d'arrêt d'activité souhaitée.

  • En légiférant sur un don de jours de repos que ferait un salarié à l'un de ses collègues, la commission des affaires sociales transfère sur les individus le poids moral et matériel d'une solidarité qui relève de structures publiques et de solidarité nationale. Quant à l'employeur, au sens générique, sa solidarité se borne à gérer les droits à congés ainsi échangés entre salariés, sans qu'il soit contraint d'y ajouter une participation de l'entreprise.


On n'ose croire qu'une motivation économique a pesé dans l'orientation de la commission parlementaire... Évidemment, à l'origine, on trouve toujours un cas particulier douloureux, en l'espèce un enfant de 11 ans atteint d'un cancer et qui, hélas, en est décédé. Son père avait bénéficié de 170 jours de congés et autres RTT, donnés par ses collègues, pour pouvoir rester à ses côtés.

Imaginons que dans une PME le cas d'enfants de salariés gravement malades ou accidentés se reproduisent plusieurs fois et qu'une loi nouvelle indique que l'accompagnement de l'enfant, recommandé par l'autorité médicale, doit être réglé par le don de jours de congés des collègues de travail des parents. On voit la pression morale qui pèsera sur les salariés de l'entreprise qui ne seront pas forcément des gens odieux et indifférents au malheur familial d'un de leurs collègues, mais qui ont peut-être, eux aussi, des difficultés et un besoin légitime de prendre leurs congés.

  • Autre aspect regrettable de la démarche de la commission, la situation des enfants malades ou handicapés de moins de 20 ans n'est qu'une partie d'un problème plus vaste qui concerne aussi des adultes et surtout des personnes âgées, dont l'état nécessite absolument la présence d'un proche. Peut-on décemment continuer à travailler comme si de rien n'était, lorsque son conjoint, peut-être jeune, suit un traitement lourd ou pire, est en phase terminale ?


La générosité est une qualité humaine essentielle qui ne relève pas d'un quelconque champ législatif ou réglementaire. La charité est un concept religieux pervers (pléonasme ?) qui relève de la pitié d'un individu pour un autre et donc d'une inégalité de respect entre les personnes. La solidarité est un choix de société qui traite à égalité tous les citoyens et organise en conséquence l'appui et l'aide que ceux des siens qui sont en difficulté, sont en droit d'attendre d'une société reposant sur des valeurs humanistes et démocratiques. Ce n'est pas une utopie, c'est le programme social du Conseil national de la résistance, en 1945, celui qui a créé la Sécurité sociale.

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