Les retraites du régime général : perspectives de court terme de l'assurance retraite
En 2008, le nombre de retraités de droit direct au régime général était de 11,3 millions. La pension moyenne du régime s’élevait à 549 euros par mois. 2,6 millions de pensions de réversion ont été versées, pour un montant moyen de 277 euros mensuels. Au total, près de 87 milliards d’euros de prestations ont été versés par la Cnav, soit une progression de 40 % depuis 2002.
Le nombre de retraités et les masses financières versées par le régime évoluent d’année en année avec le départ à la retraite des assurés et le décès des prestataires. Mais au-delà de ce facteur démographique, les modifications législatives ont également des répercussions importantes sur la progression des effectifs de retraités et le niveau des pensions versées.
Un nombre annuel de départs en retraite en forte progression depuis 2002
L’analyse des flux de nouveaux titulaires d’une pension de droit direct (cf. graphique 1 en pièce jointe) permet de mettre en lumière les changements survenus au cours de la période 2002-2008 et à prévoir entre 2009 et 2013. Avant 2004, on dénombre un peu plus de 500 000 départs en retraite chaque année. En 2004 et 2005, avec la mise en place de la retraite anticipée, ce nombre s’accroît d’une centaine de milliers pour atteindre plus de 600 000 départs. En 2006, les premières générations du baby-boom atteignent 60 ans : le nombre de départs progresse à nouveau fortement (+11,4 % par rapport à 2005). Néanmoins, le choc a été lissé par le passage en retraite avant 60 ans de certains assurés de ces générations en 2004 ou 2005 (principalement des hommes). En 2007 et 2008, le nombre de nouveaux retraités (flux d’entrants) a continué de progresser, pour atteindre 768 000 départs en 2008.
Le graphique 1 (cf en pièce jointe) permet de comparer l’évolution du nombre de nouveaux retraités partis en retraite anticipée en 2004 à celle qui aurait été constatée en l’absence de ce dispositif (hypothèse faite que les assurés partis en retraite anticipée seraient partis dès 60 ans). Sans cette mesure, le nombre de départs aurait augmenté de 16,5 % en 2006.
Pour les années à venir, la tendance à la hausse se poursuit, malgré une rupture ponctuelle en 2009, année au cours de laquelle le nombre de départs devrait s’élever à 676 000, en diminution de 12 % par rapport à 2008. Cette baisse est liée à la chute du nombre de départs anticipés, divisé par cinq (il passerait de 122 000 à moins de 25 000) qui s’explique par plusieurs facteurs :
- l’augmentation des durées validées et cotisées exigées pour un départ anticipé, parallèlement à l’allongement au 1er janvier 2009 de la durée requise pour le taux plein ;
- la diminution des régularisations de cotisations arriérées (suite à la modification du mode de régularisation) régime général et MSA, qui étaient utilisées pour remplir les critères d’éligibilité à la mesure ;
- l’obligation de scolarité jusqu’à 16 ans à partir de la génération 1953 (au lieu de 14 ans), qui rend plus contraignante la condition de début d’activité.
Ces éléments ayant engendré un report du départ à la retraite de certains assurés, le nombre de départs anticipés connaîtrait un rebond en 2010 pour s’élever à 49 000, puis se stabiliserait autour de 42 000 sur le reste de la période.
En conséquence, le nombre total de nouveaux titulaires d’une pension augmenterait à nouveau à partir de 2009, pour atteindre 753 000 en 2013.
En 2005, on a dénombré 640 000 départs à la retraite (date d’effet de la pension), dont 102 000 ont eu lieu avant 60 ans. En l’absence du dispositif de départs anticipés (et en faisant l’hypothèse qu’ils seraient reportés à 60 ans), le nombre de départs aurait été de 577 000.
Des masses financières augmentant plus vite que les effectifs de retraités de droit direct
Avec environ 700 000 nouveaux retraités de droit direct contre 400 000 prestataires qui décèdent par an, le nombre de retraités de la Cnav est en progression relativement dynamique. Les effectifs de retraités atteindraient 11,6 millions en 2009, soit une hausse de 3,1 % par rapport à 2008. Les années suivantes, ces effectifs continueraient d’augmenter à un rythme légèrement inférieur pour atteindre près de 13 millions en 2013.
Les masses de prestations versées à ce titre en 2009 s’élèveraient à 78,7 milliards d’euros, soit une évolution de 5,2 % par rapport à 2008. En moyenne, sur la période 2002-2013, les masses de prestations augmentent annuellement de 5,4 %. Cette évolution s’explique par trois effets : un effet nombre, un effet valeur et un effet pension moyenne.
- L’effet « nombre » est directement mesuré par la croissance du nombre de retraités (3 % en moyenne annuelle sur 2002-2013), qui est moins dynamique que l’évolution des masses comme on le constate sur le graphique 2.
- L’effet « valeur » (lié à l’indexation des pensions de vieillesse sur l’inflation) explique 1,7 % de la croissance annuelle des prestations.
- Enfin, la part restante de l’évolution (0,7 %) est due à l’effet « pension moyenne » ou effet « Noria », qui définit l’incidence liée au renouvellement du stock. La pension des nouveaux prestataires est en moyenne supérieure à celle des décédés (597 euros pour le flux d’entrants contre 532 euros pour le flux de sortants en 2009), ce qui contribue au dynamisme des masses de prestations.
L’évolution des sommes versées est également influencée par les évolutions législatives. Ainsi, la mise en place de la retraite anticipée en 2004 a fortement accru les masses de pensions. Depuis 2005, les prestations servies aux retraités de moins de 60 ans ont rapidement augmenté pour atteindre 2,42 milliards d’euros en 2008. La chute du nombre de bénéficiaires à partir de 2009 impacterait pleinement les dépenses liées aux retraites anticipées en ramenant le coût du dispositif à 0,6 milliard d’euros en 2013.
Une période de transition pour les pensions de réversion
Le nombre de nouveaux bénéficiaires d’une pension de réversion était de l’ordre de 150 000 en 2003 et 2004. Il a fortement augmenté en 2005, du fait de l’abaissement de la condition d’âge, et se maintient autour de 170 000 en 2006 et 2007.
En 2009, la loi de financement de la Sécurité sociale a rétabli la condition d’âge à 55 ans pour l’accès à la pension de réversion se traduisant par une baisse entre 2008 et 2013 du nombre de nouveaux bénéficiaires de moins de 55 ans. Néanmoins, le nombre total de nouveaux titulaires devrait continuer d’augmenter du fait de la part de plus en plus importante d’assurés des générations nombreuses du baby-boom parmi la population en âge de percevoir une pension de réversion. En effet, les prestataires nés après 1945 représentent 30 % des nouveaux bénéficiaires en 2008 et devraient en représenter 40 % en 2013.
La pension moyenne de réversion versée par le régime général devrait légèrement progresser sur la période 2009-2013, passant de 282 euros mensuels en 2009 à 306 euros en 2013 (voir graphique 3 de la pièce jointe). Outre l’effet de l’indexation des pensions sur l’inflation, la majeure partie de cette hausse s’explique, comme pour les droits directs, par la différence entre la pension moyenne des nouveaux prestataires (entrants) et celle des décédés (sortants). Une petite partie de la hausse peut être imputée au rétablissement de la condition d’âge. En effet, les pensions des nouveaux bénéficiaires de moins de 55 ans étaient plus faibles par rapport à celle de l’ensemble des nouveaux bénéficiaires.
À partir de 2010, une majoration sur les pensions de réversion va être mise en place ; l’impact financier de cette mesure serait en partie compensé par le rétablissement de la condition d’âge.
Les évolutions démographiques expliquent une part importante de l’évolution des effectifs des retraités du régime général et des masses de pensions versées. Néanmoins, à court terme, les changements législatifs peuvent avoir une incidence forte, à l’instar du dispositif de retraite anticipée pour les droits directs, ou encore du rétablissement de la condition d’âge pour la pension de réversion. Les prévisions effectuées annuellement visent à éclairer ces fluctuations afin d’avoir une vision à court terme des besoins de financement du régime. Les projections effectuées périodiquement sur un horizon de long terme par la Cnav et les autres régimes, à destination du Conseil d’orientation des retraites, complètent la vision prospective du système de retraite en France.
Prisme, le modèle de projection de la Cnav
Prisme est le modèle de projection des retraites de la Cnav. Conçu en 2004 pour l’élaboration de projections à long terme (à l’horizon 2050) à destination du Conseil d’orientation des retraites, il fournit également depuis 2006 les prévisions à court terme des pensions de retraite du régime général pour les projets de loi de financement de la Sécurité sociale. Prisme est aussi l’outil mobilisé par la Cnav pour la simulation et le chiffrage de réformes potentielles et de modifications législatives et réglementaires.
Alimenté par les données issues des fichiers de gestion de la Cnav, Prisme est un modèle de microsimulation, c’est-à-dire de projection individuelle. Il repose sur un échantillon de 3,8 millions de personnes, soit 1/20ème de la population des assurés et des retraités du régime général.
Prisme est organisé par modules retraçant les événements vécus par les assurés et ayant une incidence sur leurs droits à la retraite : démographie (naissances, décès, descendance, immigration), carrières (activités, salaires), puis liquidation des pensions de droit direct et de réversion (calcul des droits et date d’effet de la pension).
Outre l’atout d’une alimentation par des données administratives fines, Prisme fonctionne sur un pas de projection trimestriel, permettant notamment de prendre en compte l’impact des aleas de carrière infra annuels. Il se caractérise également par une modélisation rigoureuse de la réglementation de la retraite, avec la possibilité d’introduire de nouvelles mesures à l’étude ou de revenir à des réglementations antérieures (par exemple, avant la réforme Fillon).
Hypothèses
Pour les prévisions de court terme effectuées en 2009, les comportements constatés les dernières années, tant pour les transitions sur le marché de l’emploi que pour les départs à la retraite, sont reproduits dans Prisme.
Les évolutions législatives connues sont prises en compte en projection, comme la progression de la durée d’assurance requise pour le taux plein appliquée aux générations nées à partir de 1949.
En accord avec la direction de la Sécurité sociale et le Conseil d’orientation des retraites, plusieurs hypothèses macroéconomiques sont définies en matière de taux de chômage, de nombre de cotisants au régime général, d’évolution du salaire moyen et d’inflation (cette dernière ayant plus d’impact que les autres sur un horizon de court terme). Des hypothèses démographiques sont également posées, fondées principalement sur des données de l’Insee et de l’Ined (une mortalité différenciée par type de pension a toutefois été introduite dans le modèle à partir des données de prestataires de la Cnav).
Pour approfondir :
- Albert C, 2007, « La retraite anticipée avant 60 ans », Cadr@ge n°1, Cnav.
- Albert C, Berteau-Rapin C et Di Porto A, 2009, « Prisme, a dynamic microsimulation model for the French pension scheme CNAV », présenté à la deuxième conférence générale de l’Association internationale de microsimulation, 8-10 juin 2009, disponible sur demande à cadrage@cnav.fr
- Deloffre A, 2008, « Les retraites en 2006 », Études et Résultats n° 662, Drees.
- Ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique, 2008, « Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009 », disponible sur le site de la Sécurité sociale.
- Protection sociale parrainé par MNH