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Moins de temps partiel subi, plus de temps partiel choisi
Pour bien commencer cette nouvelle année, le temps partiel « se refait une jeunesse pour gommer quelque peu ses effets précaires et lui donner un peu l’éclat du teint d’un contrat à durée indéterminée ». Depuis le 1er janvier 2014, la durée minimale de travail d'un salarié à temps partiel est de 24 heures par semaine. Pour les contrats en cours à cette date, il est toutefois prévu un régime transitoire. Ainsi, sauf disposition conventionnelle contraire, pendant deux ans, tout employeur pourra refuser au salarié qui la demande cette durée minimale d’activité s’il justifie « d’une impossibilité d’y faire droit compte tenu de l’activité économique de l’entreprise ».
C’est notamment le cas :
- lorsque le salarié le demande (par une demande écrite et motivée) en raison de contraintes personnelles ou parce qu’il cumule plusieurs emplois lui permettant d’atteindre au moins cette durée minimale d’activité ;
- si une convention ou un accord de branche étendu le prévoit ;
- lorsque le salarié est un étudiant âgé de moins de 26 ans qui a besoin d’une durée du travail compatible avec ses études.
Étant précisé que les représentants du personnel sont informés des demandes de dérogations individuelles à la durée minimale de 24 heures afin de lutter contre les dérives et le risque de pressions ou de chantage de l'employeur.
Par ailleurs, lorsqu’une convention ou un accord de branche étendu le permet, il est possible, par avenant au contrat de travail, d’augmenter temporairement la durée de travail d’un salarié.
L’avantage est que les heures accomplies dans la limite de cet avenant ne constituent pas des heures complémentaires et ne sont donc pas concernées par la nouvelle majoration de 10 % (sauf disposition contraire dans l’accord de branche étendu). S’agissant des heures accomplies au-delà du nombre d’heures inclues dans l’avenant, celles-ci constituent des heures complémentaires majorées à 25 %.
À noter que cette latitude décisionnelle laissée aux entreprises reste limitée à 8 avenants par salarié par an (sauf remplacement d’un salarié absent), voire moins selon ce que prévoit l’accord de branche étendu.
- Dans notre affaire, un salarié avait verbalement été engagé en CDI à temps partiel par une société, en qualité d'ouvrier avicole plumier. Suite à sa démission, il avait saisi la juridiction prud'homale pour obtenir notamment le paiement d'un rappel de salaires. La société contestait la requalification du contrat de travail en contrat à temps complet ainsi que sa condamnation à verser au salarié diverses sommes à titre de rappel de salaires et congés payés afférents.
Quid juris : L'absence de contrat à temps partiel écrit mentionnant la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, fait-elle présumer que l'emploi est à temps complet ?
En l'espèce, le salarié ne niait pas avoir été employé qu'à temps partiel par la société. En effet, il avait travaillé certains jours bien déterminés et selon des horaires qu'il fixait lui-même, de sorte qu'il n'avait pas à constamment se tenir à la disposition de l'employeur. De plus, sur une période de deux années consécutives, il avait un horaire mensuel fixe de 91 heures, dont rien ne démontrait qu'il aurait été dépassé.
Quid : Néanmoins, en requalifiant le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, la Cour d'Appel avait-elle violé l'article 3123-14 du Code du travail ?
La Haute Cour a relevé qu’en l'absence de contrat écrit, l'extrême variabilité des heures de travail du salarié d'un mois sur l'autre (et ceci durant trois années consécutives) mettait l'intéressé dans l'impossibilité de connaître à l'avance son rythme de travail et dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de l'employeur.
La Cour de Cassation a rajouté que l'employeur ne rapportait pas la preuve qu'une répartition de la durée du travail ait été prévue entre les jours de la semaine et que le salarié ait travaillé selon des plages horaires bien définies. Dès lors, les hauts magistrats ont confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Lyon. Le contrat de travail conclu entre le salarié et la société était réputé conclu à temps complet, et la société a été condamnée à payer à son ex-ouvrier diverses sommes aux titres de rappel de salaires et des congés payés afférents (outre les intérêts au taux légal).
Les statistiques économiques relevées par l’INSEE ont fait ressortir que 27 % des personnes en temps partiel souhaiteraient travailler plus. Il s’agit essentiellement de femmes mais ce sont aussi plus de 40 % de jeunes et 37 % d’ouvriers, contre 15 % de cadres supérieurs. Quant aux hommes, ils ne représentent que 20 % des salariés à temps partiel. Dès 2014, souhaitons que la loi sur la sécurisation des emplois amenuise le temps partiel subi pour laisser place au temps partiel choisi…